Trop à l’étroit dans ses locaux actuels, le centre culturel Altrimenti cherche à s’agrandir avec l’ambition de construire un village des cultures pour créer un espace de vie hybride.
«Tout est éparpillé !» Un gros trousseau de clés entre les mains, Diego Lo Piccolo fait le tour du propriétaire. Le directeur du centre culturel Altrimenti connaît par cœur les locaux de l’association : salle de spectacles, cours de danse, d’informatique… il déambule avec aisance dans le complexe de l’avenue Saint-Thérèse, à Luxembourg.
Mais depuis plusieurs années, ces vieux bâtiments ne permettent plus d’accueillir les nombreuses activités du centre, comme l’école de musique qui compte pas moins de 80 élèves et cinq professeurs. «Nous sommes obligés de refuser plus de 50 % des demandes», se désole Diego Lo Piccolo.
En un peu plus de dix ans, l’Altrimenti est en effet devenu un acteur culturel incontournable du Luxembourg voire de la Grande Région, si bien que l’ASBL est aujourd’hui à l’étroit dans ses 400 m2. «Tout le monde vient nous demander des espaces, car il y a un manque à ce niveau.» Associations, partis politiques, institutions… Ils sont nombreux à pousser la porte du centre. «Mais nous ne sommes pas qu’un loueur de salles, nous essayons aussi d’offrir un support à tout le monde.»

Une solution s’est donc imposée peu à peu : déménager. L’ensemble de bâtiments qui accueille l’association doit de toute manière être détruit dans les années à venir, autant donc prendre les devants. Mais pour le futur de l’Altrimenti, Diego Lo Piccolo voit grand. Plus qu’un centre culturel, c’est un village des cultures que veut bâtir le directeur. Un lieu qui pourrait étendre l’offre d’activités tout en restant à dimension humaine.
Cette nouvelle structure s’articulerait autour de trois pôles : des espaces culturels (pour organiser concerts, expositions, résidences, projections, activités…), des espaces commerciaux en lien avec la proposition culturelle (bar des artistes, restaurant, animations familiales…) et un espace central permettant aux gens de se rencontrer, imaginé comme la place d’un village.
Si chaque secteur doit pouvoir être indépendant, avec sa dynamique financière propre, ils profiteront aussi les uns aux autres en attirant du public. Souhaitant 3 000 m2, l’Altrimenti estime pouvoir accueillir 120 000 à 150 000 personnes par an contre 55 000 actuellement.
«Tout ce qui nous manque, c’est le lieu»
Tout le projet a déjà été pensé et ficelé. Pour gérer ce futur tiers-lieu, l’ASBL a monté une société, Altrimenti Services, qui gèrera toutes les opérations financières, commerciales ou immobilières de la future entité. Gérée par le conseil d’administration de l’association, ses revenus seront tirés des différentes locations que proposera l’Altrimenti (location des surfaces commerciales, pour les activités culturelles, des évènements) mais aussi d’une offre de services (catering, support technique, publicité…).
Le capital de cette nouvelle entreprise doit permettre de fournir les fonds nécessaires au bon fonctionnement pour les trois premières années. Une planification nécessaire pour la petite association de six salariés qui doit jongler avec un budget de 450 000-500 000 euros par an.
«Nous sommes en train de mettre en place les financements. Tout ce qui nous manque, c’est le lieu.» Ancien dépôt, usine désaffectée, ferme abandonnée… L’Altrimenti est preneur de tout lieu dans un rayon de 10 à 12 km du centre de la capitale. Les anciens abattoirs, à Hollerich, auraient été parfaits pour Diego Lo Piccolo qui se voyait déjà là-bas. «Le lieu est magnifique.»
Mais la Ville a voulu s’occuper elle-même de la restructuration. «On aurait pu tout récupérer, mais ils ont préféré tout détruire pour installer un nouveau centre culturel qui sera le même que tous les autres.» Bien que très attaché à son indépendance, le directeur regrette ce manque de soutien des pouvoirs publics, notamment financier.
Car au-delà d’animer la région au travers de ses activités culturelles et de servir de lieu de rencontre, l’Altrimenti a aussi un rôle économique à jouer, en tant que créateur d’emplois et de circulation. «Les artistes que nous invitons vont à l’hôtel ou au restaurant, rappelle Diego Lo Piccolo. Il faut arrêter ce discours sur la culture qui ne produit rien. C’est une vraie industrie.»