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Kartheiser, le voyage de trop


Fernand Kartheiser est devenu trop encombrant et embarrasse son groupe au Parlement européen, le CRE, qui décide de l’expulser. 

L’eurodéputé Fernand Kartheiser, seul représentant de l’ADR à Bruxelles, est à Moscou depuis dimanche et cette initiative lui vaut son exclusion du groupe des eurosceptiques, le CRE.

À la tribune de la chambre des députés, quand il y siégeait encore avant de partir à Bruxelles, Fernand Katheiser ne ratait jamais une occasion pour marteler que la liberté d’expression était trop souvent bafouée au Luxembourg. Il visait, avant tout, les lois qui sanctionnent les discours de haine.

Ce prorusse appréciera l’état de la liberté d’expression sous Poutine. Le chef du Kremlin l’a verrouillée, interdisant toute critique du pouvoir. Mais cela ne dérange pas l’eurodéputé  luxembourgeois, en visite politique à Moscou depuis dimanche. Sur les réseaux sociaux, depuis la capitale russe, il écrit qu’il est temps «de renouer le dialogue avec la Russie».

Invité par la Douma, il compte discuter avec ses homologues «des nombreux problèmes urgents auxquels nos pays et notre continent sont confrontés», écrit-il. Il va rencontrer des membres du gouvernement et des deux chambres du Parlement «pour discuter des relations bilatérales, des droits de l’homme, de la paix en Ukraine et en Europe, ainsi que des relations des organisations internationales avec la fédération de Russie», précise-t-il avant de promettre de livrer les résultats de ces échanges.

Ce déplacement est celui de trop pour la fraction des Conservateurs et réformistes européens (CRE) au sein du Parlement européen qui entend l’expulser. Ces menaces lui pendaient déjà au nez en décembre dernier, tant les positions prorusses de ce membre encombrant faisaient désordre, surtout après l’interview qu’il avait accordée au quotidien russe Izvestia, en dépit des sanctions européennes dirigées vers les médias. Ceux que le Conseil reconnaît comme étant «sous le contrôle permanent, direct ou indirect, des dirigeants de la fédération de Russie» et qui contribuent à «alimenter et soutenir la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine et à déstabiliser les pays voisins».

Regroupant les partis eurosceptiques, les membres du CRE condamnent fermement l’agression russe et soutiennent l’intégrité territoriale et la souveraineté de l’Ukraine. L’eurodéputé luxembourgeois, seul représentant de l’ADR dans l’hémicycle, savait très bien qu’il allait provoquer sa sortie du groupe.  Les deux chefs de la fraction des Conservateurs et réformistes européens, Nicola Procaccini et Patryk Jaki, ont confirmé à RTL qu’une procédure serait très prochainement lancée afin de l’exclure le plus rapidement possible, et l’intéressé a déclaré ne pas comprendre les critiques, convaincu que l’UE reconsidérera sa position et cherchera, tôt ou tard, à négocier avec la Russie, confie-t-il à nos confrères.

Dans les colonnes du Wort, la présidente de l’ADR, Alexandra Schoos, assure que le comité national du parti a été informé en début d’année de ce voyage.  Elle précise même que le voyage a été reporté à une date ultérieure à la demande du groupe CRE. La présidente de l’ADR ne voit aucun problème à accepter une telle invitation des Russes, et trouve normal que des hommes politiques se rencontrent pour échanger des idées et c’est, selon elle, la définition de la démocratie.

L’agent double

Fernand Kartheiser a eu plusieurs vies, déjà, d’officier de l’armée luxembourgeoise, affecté à l’état-major de l’OTAN, à diplomate, jusqu’à être un agent double, dans les années 80. Une information révélée par le Land en juin 2013, en plein cœur des affaires qui secouaient le service de renseignement de l’État avec lequel il a commencé à travailler à partir de 1988, à la fin de la guerre froide.

Fernand Kartheiser avait confirmé l’information et reconnu avoir été un agent double pour la CIA et le GRU, les services secrets militaires soviétiques. «J’ai fait comme si je me laissais recruter et j’ai ensuite travaillé contre les russes», avait-il indiqué à l’époque sur les ondes de RTL radio.

Pour lui, il s’agissait d’une mission de contre-espionnage, une pratique courante pendant la guerre froide. En 2009, le service de renseignement allemand demandera l’aide des Luxembourgeois à la suite d’une demande de visa pour l’Allemagne d’un des anciens contacts russes de Fernand Kartheiser, selon le Land en 2013.

Lundi, l’eurodéputé tenait des discours sur les réseaux sociaux pour condamner toute forme de russophobie.

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