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[Bande dessinée] «Son odeur après la pluie» : la vie à hauteur de chien


"Son odeur après la pluie" de José Luis Munuera est publié aux éditions Le Lombard. (photo Le Lombard)

Succès d’édition, le roman Son odeur après la pluie, qui raconte le lien indéfectible entre un homme et son chien, bénéficie désormais du dessin délicat de José Luis Munuera. Une adaptation belle, sensible… et fidèle.

Parfois, un livre, sans vraiment le chercher, trouve son public. Le plus souvent, cette équation invisible ne tient pas à grand-chose : un sujet fédérateur, une écriture originale, des sentiments à la pelle, une honnêteté qui déborde des pages… Son odeur après la pluie, premier roman de Cédric Sapin-Defour, coche toutes les cases.

Sorti en 2023 chez Stock, son ambition était réduite, comme son tirage : 4 800 exemplaires. Mais vite, ça ne suffit plus : les lecteurs se ruent sur l’ouvrage, et aujourd’hui, de bouche à oreille, ils sont plus d’un million à l’avoir lu. À avoir ri et pleuré aussi. Un best-seller surprise pour une histoire d’amour, de vie et de mort particulière, car elle unit deux êtres n’appartenant pas à la même espèce : un homme et son chien.

Il y a donc Cédric. La trentaine, professeur de sport, amateur d’escalade et de littérature, il trompe son ennui et son célibat dans les hauteurs de Haute-Savoie, lui, l’«aventurier nomade» comme l’appelle un couple d’amis, les seuls qu’on lui connaisse, retraités de la Sorbonne et sorte de «grands-parents» d’adoption.

Loin de se satisfaire de cet isolement, il croit aux forces du destin, selon un mantra qu’il se répète : «Les rencontres destinées à embellir notre vie surgissent toujours aux journées les plus mornes.» Alors, quand il tombe sur l’article d’un journal local annonçant une portée record de chiots, il fonce vers «l’inattendu» et adopte l’un de ces bouviers bernois. Le douzième. Un petit «boubou» qui tient dans le creux de la main. Il ne le sait pas encore mais ce qui l’attend, c’est un «amour aux vertiges supérieurs» qui va durer treize années.

C’est magique !

Ubac – c’est son nom (qui détermine le versant le moins ensoleillé d’une montagne) – est un chien comme les autres : aimant, joueur et plein de vie. Dans son sillage et à travers ses yeux, au fil de longues promenades et des saisons qui passent, Cédric va réapprendre à voir le monde. «La vie, pour qui veut la voir, est partout», dit-il.

Un art d’être «attentif» aux détails et de s’enthousiasmer des petits bonheurs. En somme, être sensible à «l’invisible» et au «vivant». De cette belle complicité qui traverse la douce banalité du quotidien naîtront d’autres amours (notamment celui avec Mathilde) mais aussi des larmes. Car la bête n’est pas éternelle, et après les joies, il y a aussi le manque. Celui de le voir, le sentir, l’entendre. Ces bruits de griffes que l’on croit discerner sur le plancher et cette odeur, malgré la pluie, à jamais disparue…

Avec ce récit intime, Cédric Sapin-Defour reconnaissait au départ un geste égoïste et cathartique : «Je voulais me promener une dernière fois avec Ubac», explique-t-il. Désormais, il le partage, car l’hommage prend aujourd’hui d’autres formes. Avant une pièce de théâtre programmée à Avignon cet été et un film (toujours en préparation), le «flambeau» a été attrapé par José Luis Munuera qui, bien qu’en ayant pris des libertés avec l’œuvre originale, en garde la saveur et le charme.

C’était risqué, avoue l’écrivain (qui s’apprête à sortir son second roman en août, Là où tombent les étoiles), qui étale en postface ses interrogations sur la notion de souvenirs, de mémoire et de transmission. Car oui, comment «visiter l’intérieur de ma propre vie». Heureusement, il ne s’est pas trompé de client.

Avec son talent habituel, l’auteur-dessinateur redonne vie, en image, à Ubac, lui consacrant même un chapitre entier tout en odeurs et en couleurs ! S’il s’éloigne de la narration du roman, il reste fidèle à son esprit, à ses émotions et au mordant de l’écriture, le tout d’un trait délicat.

Dans les bois ou sur les pics, à travers des moments de tendresse et de tristesse, José Luis Munuera rappelle les thèmes chers au livre : l’horizontalité du lien entre l’homme et l’animal, l’altérité gracieuse du chien, l’importance de la nature, mais aussi la création comme outil de guérison et l’amour, bien sûr, sous toutes ses formes.

Une réussite, au point que pour Cédric Sapin-Defour, cette adaptation, d’abord redoutée, tient à quelque chose de «magique». Il conclut d’ailleurs de la sorte : «Si j’avais su que ce druide aux crayons détenait le pouvoir de faire revivre Ubac et sa joyeuse compagnie, je lui aurais demandé qu’ils ne meurent jamais.»

La vie, pour qui veut la voir, est partout

L’histoire

C’est une histoire d’amour, de vie et de mort, entre un homme, Cédric, et son chien, Ubac, un bouvier bernois dont la présence devient vite essentielle. Mais le vrai héros, c’est leur lien : unique, universel, dépassant bien des relations humaines. Pendant treize ans, ils partagent rires, inquiétudes et moments fugaces d’intensité, jusqu’à ce que la mort impose son absence. Véritable ode à la vie, ce récit explore l’amour inconditionnel, la vie qui file trop vite, et ces souvenirs persistants, comme une odeur aimée qui reste gravée, même après la pluie…

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