Dire que son quotidien a totalement été bouleversé serait un euphémisme. Le 13 mai 2023, Kenzo est touché à la tête d’une balle de 9 mm lors d’une fusillade en plein centre-ville de Villerupt. Deux ans plus tard, le jeune homme rescapé garde sa rage de vivre et son sourire éclatant.
Depuis notre dernière rencontre , Kenzo a fait tomber sa casquette. Deux ans après avoir reçu une balle de fusil-mitrailleur dans la tête, dont des fragments n’ont pu être extraits, le jeune adulte de 19 ans ne se cache plus. « Quand je suis sorti pour la première fois, je n’aimais pas ma tête. J’avais la boule à zéro, on voyait mon impressionnante cicatrice. Maintenant je le vis bien ». La victime la plus grièvement blessée ne garde aucun souvenir de cette funeste journée du 13 mai 2023. Elle la suivra pourtant à jamais. « C’est vraiment une leçon de vie… Sans la mériter ».
« La vie est une chance. Elle mérite d’être vécue »
« Quand je me suis réveillé du coma, mon cerveau voulait que je me lève mais mes jambes n’ont pas suivi ». Aujourd’hui Kenzo ne peut sortir sans son nouveau fidèle compagnon, dont il se passerait bien, son fauteuil roulant. Mais il le clame haut et fort : « Je remarche déjà ! J’ai déjà fait 60 mètres avec une orthèse au niveau du pied ». La route vers l’autonomie est encore longue, toutefois il en fait la promesse, il ne lâchera rien. C’est au Rehazenter, centre national de rééducation fonctionnelle et de réadaptation de Luxembourg, que le miraculé, hémiplégique, se bat pour retrouver l’usage de son bras et de sa jambe gauches.
La « star » de la structure de soins, comme il se qualifie modestement, a changé sa façon de voir la vie depuis son admission. « Quand j’ai vu ce qu’avaient certaines personnes, je me suis demandé comment je pouvais me plaindre. Ça m’a directement fait relativiser. La vie est une chance. Elle mérite d’être vécue, peu importe comment on est ».
Des rêves de Marseille
Kenzo avait l’habitude de passer du bon temps avec ses amis et collègues. Ils « traînaient » régulièrement à Villerupt à la recherche de plaisirs simples qu’offre la vie. La veille du drame, ils étaient d’ailleurs de sortie, se remémore le jeune homme. Sans savoir que 24 heures plus tard, il serait héliporté au CHU de Nancy où il s’en ira tutoyer la mort.
L’ex-footballeur, privé de son loisir numéro un, reste un grand passionné du ballon rond, qui ne s’empêche pas de rêver. De quoi ? L’amoureux de l’Olympique de Marseille va droit au but. « Je veux rencontrer les joueurs et leur parler un peu ». Il ne se priverait pas non plus d’un moment privilégié avec « l’Ovni » du rap français. « Même si je ne peux plus faire son signe avec les mains, je rêve de voir Jul ». C’est très clair, Kenzo chérit la cité phocéenne.
Justice
Le rescapé n’est pas du genre à s’apitoyer sur son sort. Lui et sa mère Cindy , qui l’épaule au quotidien, ont déjà surmonté bon nombre d’épreuves jusqu’à ce jour. Et ce n’est pas fini. D’autres batailles se jouent en parallèle de la rééducation de Kenzo. D’abord judiciaire avec le renvoi de l’auteur de la fusillade de Villerupt devant la cour d’assises de Meurthe-et-Moselle à une date ultérieure. Mais aussi celle du préjudice subi par le jeune adulte. Le Fonds de garantie refuse de l’indemniser, arguant qu’il était impliqué dans le trafic de drogue. Son avocat, Maître Thomas Kremser, a plaidé ce mardi 20 mai contre cette thèse devant la commission d’indemnisation des victimes du tribunal judiciaire de Val de Briey. Réponse le 16 septembre prochain.