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L’ancien gérant de l’Octogone Gym «refuse d’être le bouc émissaire»


Ouverte en 2016, la salle de sport n’a pas réussi à décoller et tous les espoirs de Serge sont partis en fumée.

Les rôles sont troubles. Kamel a tenté de mettre le feu et Serge a escroqué son assurance. Les autres disent avoir cru récupérer une dette, pas ourdir un incendie et une arnaque.

Les images de vidéosurveillance prêtent à rire tant l’incendiaire s’y prend comme un manche. L’homme, un toxicomane tout juste sorti de prison, a été recruté dans le quartier Gare pour mettre le feu à la salle de sport Octogone Gym à Sandweiler. Au final, celui qui semble doté de deux mains gauches et de deux pieds gauches ne parviendra à brûler que ses gants abandonnés sur place, à la grande satisfaction des enquêteurs et du parquet.

L’homme avait été déposé devant la salle avec un bidon d’essence et les clés du local dans la nuit du 15 octobre 2018. Cette fois, il ne devait pas se louper.

La veille, il n’avait pas réussi à s’introduire dans la salle et avait dû renoncer à son entreprise. Rapidement après les faits, après avoir étudié la situation financière de la salle de sport, les enquêteurs de la police judiciaire avaient suivi la piste de l’incendie volontaire et de l’escroquerie à l’assurance. Ils avaient cependant buté sur l’implication des six prévenus dans cette affaire.

Serge, le gérant de la salle, avait changé de version à de nombreuses reprises et une histoire de recouvrement de dette était venue brouiller la compréhension de l’affaire. Le procureur a démêlé l’histoire mercredi après-midi dans son réquisitoire.

Pour lui, cela ne fait pas un pli, Serge est le cerveau de l’histoire, «le protagoniste avec la plus grande énergie criminelle», même si ce dernier n’a pas hésité à incriminer son père. «Cette version n’est absolument pas corroborée par l’enquête», affirme le magistrat. Serge était celui qui avait le plus à gagner dans cette histoire.

Le père du prévenu a apporté des fonds pour payer un homme de main dégoté par des intermédiaires connus d’une amie à lui. L’intermédiaire devait récupérer une dette auprès d’un «escroc». Kamel, l’homme de main pas très malin – le procureur le qualifie de «dindon de la farce» –, était sans doute «celui avec la plus petite intention criminelle».

C’est aussi celui contre qui le magistrat a requis la plus petite peine : 5 ans de réclusion criminelle pour une tentative d’incendie volontaire et une destruction de biens immobiliers appartenant à autrui.

Le père et son amie encourent une peine de 10 ans de réclusion criminelle, les deux intermédiaires, une peine de 11 ans et Serge, 13 ans, «dont la plus grande partie ferme», pour la tentative d’incendie volontaire et l’escroquerie à l’assurance, la compagnie réclamant, elle, plus de 200 000 euros au civil.

Questions de responsabilité

«Je refuse d’être le bouc émissaire dans cette affaire», a lancé Serge hier à la 12e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg. «J’ai ma part de responsabilité, mais chacun doit assumer la sienne pour que nous puissions avancer.»

Par le biais de son avocate, Me Sadler, le quinquagénaire continue de nier avoir été celui qui tirait les ficelles et avoir planifié seul l’incendie. Son père en serait l’instigateur. Il n’avait pas osé l’accuser au tout début de l’enquête pour le protéger.

Il n’aurait non plus jamais été en contact direct avec l’incendiaire. Son avocate a demandé au tribunal de le condamner à la peine la plus basse prévue par la loi, assortie du sursis intégral ou probatoire.

Me Says, l’avocat du père, a une autre lecture du dossier. Le septuagénaire apparaît comme une sorte de poule aux œufs d’or toujours prête à venir au soutien du fils, peu chanceux en affaires.

Or le père aurait coupé le robinet, «ce qui a rendu Serge furieux au point de l’impliquer de plus en plus». «Mon client n’a jamais participé ou adhéré au projet», qui ne lui aurait valu aucun profit. «On ne peut lui reprocher qu’une chose, c’est d’avoir trop aidé son fils», conclut l’avocat, pour qui «le retraité sans histoires» doit être acquitté.

Tout comme son amie qui, «par gentillesse», aurait accepté de trouver un intermédiaire, financé par le père, pour recouvrer l’argent perdu dans une arnaque aux bitcoins. «Elle a été une entremetteuse, sans plus», a assuré Me Stroesser hier matin.

Sa cliente n’aurait jamais eu vent des projets d’incendie, contrairement à ce que Serge a prétendu, mais «Serge raconte des histoires». «Elle n’avait aucun intérêt, aucun bénéfice et aucune initiative dans cette histoire.»

Les trois autres coauteurs n’étaient pas présents à l’audience. Les deux hommes semblent s’être volatilisés dans la nature et la première recrue qui s’était fait remplacer par l’incendiaire était représentée par Me Stroesser.

Le prononcé est fixé au 26 juin.

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