Un cintre et un étui de thermomètre, le butin importe peu par rapport aux chocs consécutifs à une effraction pour les victimes. Le mal est fait et Edmundas n’a pas su émouvoir le parquet.
Mesure exceptionnelle hier après-midi : le prévenu comparaissait à la barre menotté et entouré de près par trois policiers. Le président de la 12e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg en a décidé ainsi pour couper court à tout débordement éventuel de la part de l’accusé. Lors de son audition par le juge d’instruction, Edmundas, un Lituanien de 45 ans, avait essayé de se défenestrer depuis le troisième étage du tribunal d’arrondissement à la cité judiciaire.
Le jour des faits dont il est accusé, au mois d’octobre dernier, le prévenu était sorti de prison depuis une semaine. Il venait d’y purger une peine de 30 mois de réclusion. Avant cela, il avait déjà été incarcéré à deux reprises pour des peines de 18 et 3 mois de prison. Edmundas, longue barbe grisonnante, explique s’être alors trouvé à la rue sans domicile avec pour seul bien le contenu de son sac à dos d’une quinzaine de kilogrammes répertorié sur une liste qu’il a remise au président. Malade, sous la pluie et dans le froid, il aurait cherché un abri où passer la nuit de son anniversaire, explique-t-il à la barre. Aujourd’hui, il est accusé de vol et de tentative de vol alors qu’il jure ne jamais en avoir eu l’intention.
À 3 h du matin, Rachel a été réveillée en sursaut par un grand bruit. Somnolente, elle s’est dirigée vers la cuisine, d’où provenaient les coups répétés. «J’ai entendu la porte donnant sur le jardin céder. J’ai crié depuis la cage d’escalier que j’allais prévenir la police et j’ai entendu la porte se refermer», raconte le témoin. Au téléphone avec la police, ne sachant pas si l’intrus avait pénétré dans son domicile, elle met ses filles à l’abri dans sa chambre à coucher et verrouille la porte derrière elles. «Dans le jardin, j’ai vu un homme avec un sac à dos qui me fixait.» Il pensait la maison inoccupée.
En sandales dans la rue
Edmundas a été arrêté par la police dans le champ voisin de la maison et embarqué au commissariat. Ses chaussures lui ont été confisquées pour les besoins de l’enquête et il a été relâché en sandales dans la rue au petit matin. «J’étais encore plus fatigué, encore plus malade», a précisé le prévenu qui s’était offert un dîner d’anniversaire exotique et pensait souffrir d’une intoxication alimentaire. «J’ai demandé une aide médicale qui m’a été refusée.»
Le prévenu a fait le tour du pâté de maisons autour du commissariat avant de s’engager dans une cour où il avait repéré une porte dont une des vitres étaient brisées. «Je l’ai ouverte avec un cintre que j’avais dans mes affaires et je suis descendu au sous-sol», raconte-t-il. «J’ai décidé de ne pas rester. Je ne pouvais pas dormir là, il y avait trop d’objets précieux.» Dans l’escalier qu’il remonte, il ramasse l’étui d’un thermomètre avant de tomber nez à nez avec le propriétaire des lieux.
«Des faits étranges»
«J’avais déjà eu une alerte quelques jours plus tôt. La porte avait été fracturée. Ce jour-là, l’alarme s’est à nouveau déclenchée», rapporte le témoin, qui ajoute que l’intrus était blessé à la main. «Je ne me suis jamais senti en danger», précise-t-il encore avant de refuser de se porter partie civile. «Il a peut-être pris un jean dans la buanderie.» Edmundas se serait présenté à lui comme étant un policier et lui aurait proposé de l’accompagner au commissariat. Le prévenu prétend avoir été mal compris : il aurait juste proposé d’accompagner le propriétaire au commissariat d’où il sortait lui-même.
Me Stoffel a tenté d’expliquer que son client n’avait pourtant pas l’apparence d’un policier et elle a ajouté qu’il parlait très mal le français et pouvait être victime «d’un malentendu». Une incompréhension, «des faits étranges» et «un butin inhabituel» – un cintre et un thermomètre – caractériseraient, selon elle, cette affaire. Mais le butin a peu d’importance pour le parquet qui, au final, lui reproche une tentative de vol et le vol avec effraction en se basant sur les déclarations de ses victimes présumées. Étant donné les précédentes condamnations d’Edmundas, le procureur a requis une peine de 16 mois de prison ferme à son encontre.
Le prononcé est fixé au 12 juin.