La dernière étude du Statec montre que les adolescents ayant grandi au sein d’une institution connaissent une plus grande précarité une fois arrivés à l’âge adulte.
Foyers d’accueil, centres pénitentiaires, hôpitaux… Tous les adolescents n’ont pas la chance de grandir au sein de leur famille. Une expérience qui a un impact durable sur leur vie future et ne fait que creuser les inégalités. La dernière étude du Statec s’appuyant sur l’enquête EU-SILC 2023 qui s’intéresse aux revenus et conditions de vie des ménages a permis d’analyser leur situation et de mettre en lumière les difficultés qu’ils rencontrent à l’âge adulte.
En recoupant les chiffres, le Statec a pu calculer qu’en 2023, 4,1 % des résidents âgés de 25 à 59 ans ont vécu en institution à leurs 14 ans, 2,7 % étant orphelins de père et 0,7 % orphelins de mère. «Cette différence entre les deux parents, observée dans d’autres pays, peut s’expliquer, au moins en partie, par une espérance de vie plus faible pour les hommes», analyse le Statec. La perte des deux parents à l’âge de 14 ans reste marginale puisqu’elle ne concerne que 0,1 % de la population.
Cette vie en institution, et parfois sans aucun des deux parents, favorise plus tard le cumul des difficultés financières et sociales. Les résidents concernés sont 41,2 % à avoir connu une expérience d’absence de logement personnel au cours de leur vie (logement chez un ami, dans la rue, un squat, un hébergement d’urgence…) contre 6,6 % parmi les personnes ayant grandi avec leurs parents. «Ces difficultés de logement sont la conséquence d’une situation financière moins favorable, ajoute le Statec. Les personnes ayant vécu en institution sont 67 % à habiter dans un ménage déclarant avoir des difficultés à joindre les deux bouts.» Un chiffre qui tombe à 22,9 % pour le reste de la population. Leur taux de pauvreté est également bien plus élevé : 64,9 % contre 14,2 %.
Des études plus courtes
Ces inégalités commencent très tôt puisque l’accès à l’éducation est également plus complexe pour les jeunes grandissant en institution. Ils sont seulement 25,1 % à être titulaires d’un diplôme égal ou supérieur à un bachelor contre 51,3 % des gens ayant vécu avec leurs deux parents à l’adolescence. «Parmi les orphelins de mère, 34,6 % sont titulaires d’un diplôme de niveau bac+3 ou plus, contre 41,9 % des orphelins de père.»
Ce manque d’opportunités pour faire des longues études les pénalisent par la suite pour trouver un emploi bien rémunéré et donc un logement. «Les études traitant du devenir à l’âge adulte des jeunes placés en protection de l’enfance soulignent la rupture subite qui survient une fois l’âge légal de fin de prise en charge atteint. À la sortie de l’accompagnement, le jeune est contraint de s’insérer avec souvent l’absence de lien
familial pour faciliter l’entrée dans la vie adulte.»
Mais cette relation entre vie en institution et précarité à l’âge adulte reste complexe et ne doit pas jeter la pierre aux organismes de placement. Parmi les autres causes possibles se trouve l’expérience, par cette population, de traumatismes durant l’enfance et l’adolescence ayant pour conséquence une santé mentale fragilisée à l’âge adulte. Une difficulté supplémentaire qui fragilise encore un peu plus ces personnes une fois qu’elles deviennent adultes.

(Photo Statec)