Pour prendre Reinhold Breu, la Jeunesse a choisi de dire non à un gros investisseur qui voulait venir avec son propre coach (Sébastien Allieri). Quelques jours après l’annonce, Marc Theisen justifie cette décision de politique sportive majeure.
Pourquoi Reinhold Breu plutôt que le projet mis en avant par un investisseur qui débarquait avec 200 000 euros pour faire passer un cap budgétaire au club, mais qui voulait installer Sébastien Allieri ?
Marc Theisen : Parce que déjà, pour la première fois depuis longtemps, nous avions pléthore de candidatures sur la table, une vingtaine. On cherchait un coach avec une expérience du football luxembourgeois et une autre de la gestion du secteur jeunes pour nous permettre de franchir un nouveau palier dans ce domaine. C’est ce que d’autres, dans le coin, comme la Jeunesse, le F91… ont réussi à faire et nous sommes d’avis que nous devons approfondir notre approche pour essayer d’avoir, chaque année, un à deux juniors capables d’intégrer l’équipe 1. Il nous est resté trois candidats qui étaient d’un très haut niveau et Breu avait tous les critères.
C’est un projet qui se tient autant qu’un autre. Mais beaucoup plus que cet afflux d’argent inespéré qui permettait presque de doubler le budget alloué à l’équipe première ?
Ça veut dire quoi, investir? Ces dernières années, certains sont venus me trouver pour « racheter le club« ou, effectivement, comme ils disent : « investir« . Mais on est une ASBL! Et ce genre d’offres, j’en ai vu arriver dix fois en trois saisons. Nous, on discute avec tous ceux qui désirent soutenir le club. Certains à qui l’on dit directement « non« , d’ailleurs. Mais je me suis aussi assis trois fois très concrètement, avec des gens, pour un tour de table. Pour ce projet dont vous parlez, le plus récent, il y a des choses qui ne peuvent pas sortir du comité et je ne dévoilerai rien de ce qui doit rester en interne.
Dans ce budget, on n’est plus comme en 2022, où un mois de salaire des joueurs représentait 70 000 euros. Aujourd’hui, on est à 30 000 euros
La mauvaise expérience grecque quatre ans en arrière, a-t-elle laissé de telles traces, au niveau psychologique, qu’il faille se méfier d’absolument tout le monde ?
Attention, je ne veux pas dire que c’est impossible que nous accueillions de nouveau quelqu’un, même si l’expérience grecque – que j’ai vécue de l’extérieur – a été particulièrement désastreuse et nous a laissés quasiment pour morts. On examine tout, on n’exclut personne, mais il faut juste que le projet de cette personne entre dans la philosophie du club. On ne se vendra pas corps et âme. Les séquelles de l’expérience grecque restent. On sait désormais que dans les structures désuètes comme la nôtre, il faut rester vigilant quand quelqu’un vient de l’extérieur. Mais l’on sait que si l’on veut progresser, l’argent ne peut pas faire de mal.
Justement, ça ne coûte pas cher, un Reinhold Breu ?
Qu’est-ce que c’est, cher? Nous avons un budget avec beaucoup de postes et si l’on dépense un peu plus d’un côté, il faut juste savoir dépenser moins d’un autre. Alors disons que c’est un effort raisonnable! Dans ce budget, on n’est plus comme en 2022, où un mois de salaire des joueurs représentait 70 000 euros. Aujourd’hui, on est à 30 000 euros.
Et mettre plus d’argent dans un coach qui est aussi un coordinateur, quitte à réduire l’effectif de deux ou trois joueurs, cela nous semble un bon calcul. Et puis vous savez, Breu ne viendra pas avec deux adjoints, comme Arnaud Bordi. Sachant que Breu a un carnet d’adresses et que l’on pourrait devenir un bon tremplin pour des U18 ou des U21 de la FLF, cela nous semble rentable. Et puis le ministère subventionne plus les clubs qui possèdent des entraîneurs diplômés, donc c’est joindre l’utile à l’agréable. Avec son savoir-faire, il va pouvoir installer les choses dans un délai raisonnable.
L’équipe, ce n’est pas un syndicat d’entreprise (…) Le choix du coach, c’est celui du comité, pas le leur
Il paraît que certains joueurs de votre effectif, notamment les garçons formés au club, ont pas mal poussé pour Breu. C’état important de les écouter ?
Je suis toujours à l’écoute! Mais chacun ses responsabilités et la leur, ce n’est pas de choisir l’entraîneur. Mon expérience, c’est qu’il y a toujours la moitié de l’équipe qui veut garder le coach et l’autre qui veut le virer. L’équipe, ce n’est pas un syndicat d’entreprise, sinon, on leur donnerait un siège au comité. Le choix du coach, c’est celui du comité et surtout pas des joueurs! Il ne faut pas toujours aller dans leur sens.
Il se murmurait que vous ne seriez pas totalement opposé à l’idée de laisser la main en 2026, à la fin de votre bail de président. Cherchez-vous un repreneur ?
Pour le moment, je n’en cherche pas. Mais à 71 ans dont quarante dans le sport, je n’ai plus rien à prouver et je ne suis donc pas particulièrement aussi attaché à ce poste que si j’avais 40 ans. J’étais juste arrivé en tant que gestionnaire, pour éviter la liquidation du club. Ces dernières années, j’ai croisé des gens venus investir mais encore aucun qui m’a dit vouloir prendre mon poste. Et de toute façon, comme avec les Grecs, c’est en assemblée générale que la décision se prendrait.