Le gouvernement sait désormais à quoi s’en tenir et ses membres présents jeudi sont repartis avec des bleus. Le LCGB s’est livré dans les règles à une démonstration de force.
Luc Frieden a encaissé les uppercuts assénés à la chaîne par Patrick Dury sans broncher, jeudi matin, à Remich et tendu l’autre joue. Assis au premier rang, le Premier ministre chrétien-social affichait une mine crispée sous les applaudissements et les sifflets des plus de 1 200 membres du LCGB venus assister au discours de leur président. Le gouvernement veut démonter le modèle social et le rôle des syndicats, le syndicat démonte le gouvernement et ses représentants.
Patrick Dury cogne dur et montre ses muscles avant la manifestation syndicale du 28 juin. Non, le gouvernement n’est pas près de se débarrasser des syndicats, de leurs valeurs et des acquis sociaux. Le front syndical, formé par le LCGB et l’OGBL, est prêt à prendre le chemin d’une grève générale pour barrer la route à celui qui est qualifié de «fossoyeur» et accusé de jouer le jeu du patronat ainsi que d’ouvrir la voie au populisme et l’extrémisme de droite.
Le gouvernement chercherait à réduire l’influence des syndicats dans le secteur privé pour «flexibiliser le temps de travail, remettre les salaires en question et baisser les retraites». Le dialogue serait d’ailleurs rompu et le syndicat attend toujours une réponse de la ministre quant aux pistes qu’il lui a soumises en matière de réforme des pensions. «Elle fait son show», un «enfumage» servant à masquer les décisions prises par le gouvernement et les patrons pour les faire passer en douce, tout en oubliant au passage la question du financement de la Caisse nationale de santé (CNS).

Front commun
«Réduire les montants des retraites de manière substantielle comme le revendique le patronat n’est pas une approche acceptable pour les syndicats, car cela n’aboutirait qu’à la pauvreté des personnes âgées et à de la misère», note Patrick Dury qui critique également la remise en question des «baby years», une approche «misogyne» du patronat. Mais aussi «néolibérale» inacceptable pour le front commun.
Piqué au vif par le gouvernent qui lui préfère un nouveau partenaire et oublie son héritage, le syndicat se sent floué et dénonce un démantèlement des acquis «voulu» par l’Union des entreprises luxembourgeoises (UEL), Frieden et consorts. Démantèlement qui va mener à «un apartheid social» entre la fonction publique et le secteur privé, dénonce le syndicaliste.
«Le gouvernement doit reconnaître notre modèle social qui consiste en des tripartites avec trois partenaires au même niveau et mettre directement un terme aux attaques contre la loi sur les conventions collectives», résume le président du LCGB. «Des éléments comme le travail du dimanche ou les heures d’ouverture doivent être débattus à trois lors du Comité permanent du travail et de l’emploi (CPTE). Les modifications basées sur des négociations de contrats collectifs sont à privilégier», poursuit Patrick Dury. «Toutes les discussions en rapport avec le renforcement de notre système de retraites ont leur place dans une réunion tripartite.»
Avant de savourer une standing ovation de plusieurs minutes, Patrick Dury a profité de la présence de Frieden, ainsi que des ministres Thill et Deprez, pour à nouveau marteler les revendications du front syndical, à commencer par une meilleure loi sur les conventions collectives qui renforcerait les droits des syndicats. Il appelle également de ses vœux une meilleure protection des salariés contre le chômage, notamment par le renforcement des plans de maintien dans l’emploi ainsi que contre le risque de maladie en privilégiant le reclassement interne et l’abolition de «la règle des 78 semaines».
En un siècle d’existence, le syndicat n’en est pas à sa première «tempête». Patrick Dury espère que ces revendications et ces coups de gueule ne sont pas tombés dans l’oreille d’un sourd. Le discours du 1er-Mai terminé sous les vivats, Luc Frieden s’est tourné vers son voisin de gauche et a soufflé un grand coup.
