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[Musique] Praetor : tout pour le thrash !


Praetor célèbre l’esprit du thrash à l’ancienne à travers une musique puissante, engagée et sans fioriture. Leur second album, The Spiral Of Addiction, arrive en fin de semaine. Ça méritait bien une pause, et des confidences.

Avec ce quatuor, on a l’impression de revenir aux années 1980 : les cheveux sont longs, les maillots de basket, comme les Converse, s’affichent, et depuis les enceintes, un metal frénétique emporte tout sur son passage. Depuis 2019, Praetor, en équilibre entre la France et le Luxembourg, honore le metal «old school», celui de Metallica, de Sepultura et autre Anthrax, qu’il met à sa sauce.

Après un premier disque pur jus en 2023, la bande remet le couvert avec un second, tout aussi agité et techniquement supérieur. Avant de filer à travers l’Europe dès le printemps, Hugo Nogueira Centeno (guitare-chant), Noémie Bourgois (guitare), Sébastien Gouttes (basse) et Alex Raising (batterie) font étape à la maison, du côté de la Rockhal. On baisse alors le volume, et on écoute. Entretien.

D’où vous vient votre passion pour le thrash des années 1980 ?

Noémie Bourgois : Mon père collectionnait des vinyles, fan de rock progressif des années 1970. J’ai grandi avec ça. C’est ma base. Le metal est arrivé après.

Alex Raising : Pour ma part, je voulais être skateur professionnel! Du coup, j’avais sur cassette du Iron Maiden, AC/DC, Black Sabbath… Du soft, mais déjà puissant!

Depuis plus de quarante ans, le thrash est resté fidèle à ses origines. Pour quelles raisons ? 

N.B. : Il y a eu une évolution ces dernières années, avec cette tendance à aller vers le death metal où l’on va retrouver du «blast beat» (NDLR : technique de batterie à un tempo très élevé). Mais c’est vrai que ça fait peu.

A.R. : En même temps, pourquoi faire évoluer un truc qui défonce déjà? C’est le meilleur style de metal qui existe! Autant qu’il reste comme à ses débuts.

N.B. : Surtout qu’il est difficile de modifier quelque chose de brut, de minimaliste. Globalement, le thrash, c’est une batterie, deux guitares, une basse, un chant. Il est viscéral de par son ADN. Ça empêche certaines évolutions.

A.R. : Oui, c’est cela. Et alors que le metal devient de plus en plus gentil, pop même, le trash garde en lui cette violence pure. Dans le bon sens du terme, évidemment.

Au Luxembourg, où se situe le thrash parmi la scène metal ?

N.B. : Déjà, on n’est pas les seuls, que l’on cite Fusion Bomb ou Sublind. Ensuite, il y a un public très réceptif ici. Ce qui n’est pas le cas partout, notamment en France…

A.R. : C’est clair, de l’autre côté de la frontière, faire du thrash, c’est un peu ringard! Ça s’apparente à un vieux truc.

Vous vous êtes familiarisés et spécialisés dans le genre à travers vos groupes «tribute». Vous en êtes-vous inspirés pour créer votre propre style ? 

A.R. : De manière consciente ou non, vos différentes inspirations infusent dans votre jeu. C’est comme ça. Moi, j’ai joué du Metallica ou du Pantera des heures durant. Forcément, ça s’en ressent.

N.B. : Oui, c’est ce qui vous construit, induit la façon d’aborder la musique, les morceaux, la scène… D’ailleurs, dans le groupe, on partage certaines influences, ce qui permet d’avancer rapidement sur certaines choses. Et à l’inverse, quand c’est moins fluide, ça permet de s’ouvrir, et surtout, de s’enrichir. Dans tous les cas, on est gagnant!

C’est quoi, d’ailleurs, votre groupe «suprême» de thrash ?

N.B. : Sepultura! (Elle montre alors son bras) J’ai neuf tatouages qui reprennent des détails de tous leurs albums. En plus, pour les avoir rencontrés, ils sont adorables, simples et engagés. Une attitude qui résonne fortement en moi.

A.R. : Metallica, sans l’ombre d’un doute! Ce groupe a changé ma vie, et ce n’est pas une formule de style. Sans Lars Ulrich, je ne serais pas batteur. Ça m’a tellement passionné, transcendé même. Quelque chose de très fort.

En 2023, vous avez sorti votre premier album. Quel regard portez-vous dessus aujourd’hui ? 

A.R. : Je l’ai écouté dernièrement, et dans mes souvenirs, il envoyait un peu plus!

N.B. : Il a un côté frontal, rentre-dedans. Je sais, c’est moi qui l’ai composé pour l’essentiel (elle rigole). Le second, écrit par Hugo, est plus technique, avec quelques fioritures, des arrangements… Il y a plus de travail derrière et marque une évolution. C’est bien que ce soit dans ce sens-là. Du coup, pour le troisième, il va falloir faire moitié-moitié!

A.R. : Pour le premier, on voulait des chansons courtes, simples, qui vont droit au but. Il fallait marquer le coup. Car le plus difficile, ce n’est pas d’être bon, démonstratif, mais bien d’être écouté. Metallica a attendu trois albums avant de sortir de …And Justice for All. Ça a du sens.

Le plus difficile, ce n’est pas d’être bon, mais d’être écouté

Sur le site de la Rockhal, on peut lire que votre nouvel album, The Spiral Of Addiction, promet «plus de groove, de mélodies et d’adrénaline». À quoi faut-il alors s’attendre ? 

A.R. : Le premier sera sûrement toujours plus accessible que le second, du moins à la première écoute. Après, c’est vrai, il y a deux ou trois trucs qui diffèrent, notamment des passages plus lents. On ne s’était jamais autorisé ça jusqu’alors. Pas sûr toutefois que le terme «groovy» soit le plus approprié. Disons plutôt que ce disque est moins «tuta-tuta» (il rigole).

Dans le texte, que raconte-t-il ? 

N.B. : Il y a plein de sujets abordés, de société bien sûr, mais aussi d’autres plus personnels. Il y a une ancienne chanson, Dormant Brain, pour laquelle on a fait un clip qui met en scène un journaliste et des politiciens face aux maux que connaît le monde, aussi bien au niveau écologique, social et économique. Parler de tout ça, c’est important.

A.R. : Cet engagement physique et intellectuel fait partie des racines du thrash. D’ailleurs, dans le groupe, on s’envoie régulièrement des messages qui parlent de l’actualité. Il y a de quoi dire!

Justement, avec votre chant «clair et distinct», le message passe-t-il plus facilement auprès des auditeurs ?

A.R. : On ne s’est jamais posé cette question. Disons que Hugo a cette voix, et son style qui font que oui, on est dans quelque chose de moins guttural, plus audible.

N.B. : Il faut savoir qu’il est fan de James Hetfield, avec cette façon de chanter, certes moins écrasante, mais sèche et agressive, raccord avec ce qu’il raconte dans les paroles.

A.R. : Et avec ce qu’il est : il est souvent énervé!

N.B. : C’est clair! Quand il chante, au bout de vingt secondes, il a une veine qui gonfle au niveau de la tempe (ils rigolent).

Autre caractéristique de Praetor, c’est le nombre réduit de solos à la guitare. Est-ce un choix esthétique ?

N.B. : Il y en a plus dans le premier disque, et encore, à l’époque, on a dû batailler pour ne pas en mettre partout! Là, l’évolution s’est faite de manière naturelle. Mon accident de voiture (NDLR : qui lui vaudra, il y a un an, de multiples fractures au poignet), a peut-être aussi joué.

J’ai neuf tatouages qui reprennent des détails des albums de Sepultura

Dernière particularité de votre groupe : la présence d’une musicienne, assez rare dans le milieu du metal…

N.B. : La dernière fois, on a été voir un concert d’Exodus; il devait y avoir quinze femmes dans la salle! Et sur scène, en dehors des chanteuses, notamment dans le metal symphonique, elles se font encore plus rares. À l’époque, j’avais dans l’idée de monter un groupe 100 % féminin. Mais j’ai vite oublié le projet. D’ailleurs, j’avais composé une chanson… qui a fini sur le premier album de Praetor.

A.R. : Attention, on n’en joue pas. Dès le départ, il n’y a jamais eu la volonté de jouer avec une femme plutôt qu’un homme. L’idée, c’était de prendre les musiciens qui correspondaient le mieux au projet, à savoir avec du charisme, de l’envie, et l’esprit thrash!

Vous avez déjà de nombreuses dates prévues cette année, en France, Italie, Hongrie, République Tchèque, Allemagne, Belgique et Portugal. Quelles sont vos ambitions ? 

A.R. : Jouer le plus possible, simplement. Ce qui nous plaît, c’est la scène, plus que le studio. On a déjà eu pas mal d’opportunités avec le premier album, mais là, on espère en avoir encore plus. Se faire plaisir, et faire plaisir aux gens, voilà notre objectif. Et bien sûr, défoncer autant que possible!

Votre double nationalité franco-luxembourgeoise est-elle un atout dans ce sens ? 

A.R. : C’est clair, on est un groupe international! (il rigole)

N.B. : Depuis Nancy, on a organisé pas mal de concerts, 130 sur quinze ans. Du coup, on s’est fait un nom, un réseau… Ça aide forcément. Avec Hugo, c’est pareil au Luxembourg : il produit et joue. Dans la sphère metal, c’est une figure connue.

A.R. : Disons que l’on a beaucoup traîné nos guêtres dans ce milieu, et par prolongement, ça ouvre des portes. Maintenant, à nous de nous y engouffrer, et d’assurer.

«Album Release»
Vendredi à partir de 20 h.
Rockhal – Esch-Belval.
Support : Desdemonia 
& Fusion Bomb.