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Un entraîneur de foot risque 18 ans de prison


Les faits se sont produits sur et aux abords du centre d’entraînement de la Jeunesse Esch, dans le quartier Hiehl. (Photo : archives lq/tania feller)

En janvier 2023, une rixe a eu lieu sur un terrain d’entraînement de la Jeunesse Esch. L’agresseur, armé d’un couteau, a pu être maîtrisé, avant d’être mortellement blessé. Le procès s’est achevé vendredi.

Le principal prévenu dans le procès de l’incident mortel, survenu lors d’un entraînement des minimes de la Jeunesse Esch, en janvier 2023, n’a ni fait preuve de compréhension ni de remords, mais s’en est pris à la juge. L’entraîneur des jeunes, accusé d’homicide involontaire, a failli se mettre lui-même dans le pétrin. Le parquet a finalement requis 18 ans de prison, dont une partie sans sursis.

Jeudi, le troisième et avant-dernier jour du procès, débuté lundi, a permis d’entrer dans le vif du sujet. Après que les témoignages de la veille n’ont pas permis d’y voir plus clair, l’entraîneur des jeunes L., accusé d’homicide involontaire, et le père d’un joueur, D., qui s’est également retrouvé sur le banc des prévenus, ont donné leur point de vue sur les évènements du 23 janvier 2023. Le procès a dû être brièvement interrompu à la demande de l’avocat de L., Me Mioli, afin de calmer son client.

Le père d’un joueur également accusé

Auparavant, il avait répondu de manière impulsive aux questions de la présidente de la 13e chambre criminelle, Sylvie Conter. Jusqu’à ce que la juge en ait eu ras-le-bol. À plusieurs reprises, Sylvie Conter a attiré l’attention de L. sur la gravité de sa situation, sans que celui-ci change d’attitude. «Pensez-vous toujours avoir bien fait les choses?», a interrogé la juge. Et même si L. a répondu «non», ses déclarations dans la salle d’audience n’étaient pas vraiment empreintes de remords.

L. a maintenu que le père du joueur, D., accusé de coups et blessures, avait frappé la victime A. avec une pierre, ce que ce dernier a nié et ce qui a été exclu par le médecin légiste lors du premier jour du procès. L. serait donc à considérer comme seul responsable de la rixe. L. a bien reconnu avoir frappé A. à la tête avec une pierre, puis de l’avoir poignardé à trois reprises. L’un des trois coups de couteau avait entraîné la mort du demandeur d’asile irakien.

En raison de la gravité des faits reprochés, le procureur a requis contre L. une peine de 18 ans de prison pour homicide, dont une partie sans sursis. L. aurait continué à frapper A., immobilisé et allongé sur le ventre, avec une pierre et aurait enfoncé le couteau profondément dans sa fesse ou l’entrecuisse. La situation aurait pourtant été sous contrôle, la victime était sans défense et L. aurait été incité à plusieurs reprises par D., le père du joueur, d’arrêter. Le fait que L. n’ait pas exprimé de remords pendant le procès serait à considérer comme un facteur aggravant.

Le procureur a accordé des circonstances atténuantes à D., et a requis une amende.

Retour sur les faits

Le 20 janvier 2023, A. s’est présenté en état d’ébriété au complexe d’entraînement de la Hiehl, où l’entraînement des minimes était sur le point de justement commencer. C’est à ce moment qu’a eu lieu la première altercation. Lorsque A. a balancé le ballon au visage de l’entraîneur des jeunes, L. a répondu par un coup de poing. La police a été appelée une première fois. L. ayant renoncé à porter plainte, les agents sont repartis.

Au même moment, A., fou de rage, s’est rendu dans un magasin, où il a acheté un set de couteaux, avant de revenir une bonne demi-heure plus tard sur le terrain d’entraînement, armé cette fois de deux grands couteaux. À ce moment, 26 enfants s’entraînaient sous la surveillance de l’entraîneur L. et de son demi-frère C., mineur à l’époque. Avec D. (le père d’un joueur), ils se sont opposés à l’agresseur, qui allait devenir leur victime peu de temps après. D. a lancé une brique sur A. et l’a touché à la poitrine. L. s’était armé d’une poubelle en métal, C. d’une barre en plastique.

A. s’était finalement enfui du centre d’entraînement. Les deux entraîneurs et le père ont poursuivi l’agresseur et ont réussi à l’immobiliser après que ce dernier a trébuché. Selon les enquêteurs, A. avait laissé tomber ses couteaux, ce que D. a confirmé. Les hommes ont donné des coups de poing à A. et l’ont maintenu au sol.

L. a frappé la victime avec une pierre, son frère a également donné plusieurs coups de pied à la tête de A.. Le père a tenté de calmer la situation en s’allongeant sur la tête de la victime pour la protéger. Mais la rixe s’est poursuivie. L. s’est emparé du couteau et a poignardé A. à trois reprises. Deux fois dans les fesses et une fois à l’entrecuisse. Une artère principale a été touchée. L. a expliqué qu’il avait voulu empêcher A. de prendre la fuite. La question de savoir qui a jeté l’arme du crime dans un buisson n’a pas pu être définitivement élucidée jeudi.

«On aurait pu réagir autrement»

«C’était l’instinct, on ne peut pas l’expliquer», a répondu le principal prévenu, à la question de savoir pourquoi il avait poignardé A., qui avait été immobilisé et qui était à ce moment-là sans défense. «On aurait pu réagir autrement, mais on ne l’a pas fait.» Il aurait voulu protéger les enfants présents. La rixe qui a suivi, une fois la situation calmée, pourrait maintenant lui coûter cher.

En tant que partie civile, la famille de A. a en demandé des dommages et intérêts d’un montant total de 200 000 euros.

L’entraîneur de jeunes devra également répondre de violences domestiques lors d’un second procès.

Selon les informations du Wort, son demi-frère C. devra répondre de ses actes devant le tribunal de la jeunesse

Légitime défense ou homicide?

Dans sa plaidoirie, l’avocat de L., Me Frédéric Mioli a demandé une peine avec sursis pour son client. Il estime que l’entraîneur a agi en légitime défense. Il n’y aurait pas eu d’intention de tuer l’agresseur, armé d’un couteau. Ce dernier aurait provoqué la rixe mortelle. Me Mioli a aussi émis un doute sur la teneur des différents témoignages. Il estime que son client aurait d’abord donné un coup de couteau à l’agresseur avant que ce dernier n’ait pu être immobilisé.

L’avocat du père, Me Laurent Moyse, plaide aussi la légitime défense et demande l’acquittement de son client. D. n’aurait pas sa place sur le banc des prévenus. Bien au contraire, il aurait fait preuve d’un grand courage et mériterait plutôt une mise à l’honneur lors de la fête nationale.

Le prononcé est fixé au 24 avril.