APRÈS LA VICTOIRE EN COUPE D’ALLEMAGNE La capitaine Magaly Meynadier est encore sur son petit nuage après la victoire de Sarrelouis, dimanche à Berlin.
Qu’est-ce que cela fait de remporter votre premier titre en club en tant que joueuse pro ?
Magaly Meynadier : Enfin ! Enfin, j’ai le titre que j’attendais depuis toutes ces années. C’est vraiment une sensation exceptionnelle. Je n’arrive toujours pas à y croire! Je suis vraiment fière de mon équipe. On n’arrêtait pas de crier. C’était complètement dingue. C’est génial de voir que tout ce travail a enfin payé.
Et on peut dire que vous êtes allées la chercher. Le week-end avait plutôt mal démarré avec seulement 4 pts inscrits au premier quart contre Berlin. Que s’est-il passé ?
J’avoue que je ne comprenais pas. On était super motivées. On savait que c’était une chance qui n’allait pas se répéter. Mais on a mal démarré. On a vu qu’on était sous pression, qu’on était nerveuses. Et c’est pour cela qu’on a mal démarré. On met quatre points dans le premier quart et on est menées de 17 pts à la pause.
Et alors, comment avez-vous réussi à inverser la situation ?
Pour la première fois depuis que je suis capitaine, j’ai élevé la voix dans les vestiaires. J’ai balancé mes quatre vérités. J’ai dit aux filles que ce n’était pas possible de se présenter comme cela. Qu’on valait bien mieux que ce qu’on avait montré durant cette première mi-temps. Que je n’avais pas de problème à perdre si on donnait tout et qu’on jouait notre meilleur basket. Mais ce qu’on avait proposé était tout simplement inacceptable. On avait un plan donné par le staff et on ne l’a pas du tout respecté. Ils jouent tout sur les grandes, on se fait détruire à l’intérieur. On a identifié leurs shooteuses, la n° 12 nous met trois paniers à trois points. Qu’elle le fasse si les tirs sont contestés et qu’on met la main devant, bravo à elle. Mais là, c’étaient des tirs sans opposition. C’était un manque d’effort. Et ça, c’était inacceptable. Après, en attaque, j’avais le sentiment que ça allait venir. On avait de bons tirs, de bonnes actions mais qui ne sont pas entrées, ça peut arriver. Mais en défense, ce n’était pas possible que ce soit aussi facile pour elles. Qu’elles n’aient pas besoin de se fatiguer.
Pour la première fois, j’ai élevé la voix dans les vestiaires
Visiblement, le discours a porté ses fruits ?
On est revenues sur le terrain comme des bulldozers! On s’est jetées sur tous les ballons. Une interception, un rebond, un panier à trois points. Rapidement, la motivation est montée d’un cran. Il y avait beaucoup plus d’interactions entre nous, de communication. On était à fond dedans. Bien sûr, on savait qu’on n’allait pas pouvoir revenir au score dans le troisième quart, 17 pts, ce n’est pas rien. Mais il fallait réduire au maximum leur avance. On fait un super troisième quart (NDLR : 26-12) et l’idée, c’était de continuer sur notre lancée. Je pense que quand on revient à trois ou quatre points, la peur et la frustration montent chez l’adversaire. Tu commences à douter, tu prends de mauvaises décisions. Et quand on passe devant, à 60-59, j’ai dit aux filles qu’on allait le faire. Elles avaient énormément de mal. On jouait beaucoup mieux en défense. On continuait de leur piquer plein de ballons. Pour nous, c’était une sensation énorme mais j’imagine ce que ça devait être pour les fans!
Et le lendemain, la finale contre Keltern. Qui n’est pas l’équipe la plus appréciée de la Bundesliga visiblement ?
Oui. On partageait le même hôtel que nous. Et leur manière de se comporter déplaît à beaucoup d’équipes. Bien sûr, elles sont très fortes, elles sont en tête de la Bundesliga, elles jouent en Coupe d’Europe. Mais il faut savoir rester à sa place. Et on voit certaines joueuses, même le management, le staff. Par exemple, on avait réservé la salle vidéo pour préparer notre match vers 11 h 30. Et quand on descend, elles y sont encore alors que ça faisait plus d’une heure qu’elles étaient là. Elles sont restées plus longtemps juste pour nous embêter. Finalement, notre coach a décidé qu’on allait d’abord manger avant de faire notre séance vidéo.
Et visiblement, ça ne vous a pas gênées plus que cela ?
Dès l’échauffement, j’ai senti qu’on était prêtes. J’ai vu le regard des joueuses. Leur concentration. Je leur ai dit qu’on ne pouvait pas se permettre de débuter comme contre Berlin, sinon c’était foutu. On n’allait pas réitérer le même exploit deux jours de suite. D’autant plus que ça demande énormément d’énergie. Donc, non! On fait le contraire. On tape d’abord pour être dans une position plus confortable. Et c’est ce qu’on a fait. Peut–être qu’elles ont cru que ce serait facile. Peut-être que le fait qu’elles ont eu un match facile alors que nous on a eu un match très compliqué, ça a joué aussi. Mentalement, on était beaucoup plus préparées qu’elles. Et en plus de nos supporters, tous ceux de Berlin et de Nördlingen se sont mis à nous encourager. Tout le monde voulait nous voir gagner!
Et alors, ça fait quoi de battre une équipe que vous n’aimez pas ?
C’est encore meilleur de les détruire. Je pense qu’on n’avait pas la pression. Elles, elles devaient gagner, vu qu’elles n’ont perdu que deux matches cette saison et qu’elles dominent la Bundesliga. Alors que nous, on voulait gagner. Et je pense que c’est ce qui a fait la différence sur ce match.
Et c’est donc vous qui avez été la première à soulever la coupe. Puisque, comme partout où vous êtes passée, vous êtes capitaine ?
J’étais très fière qu’on me propose le poste de capitaine quelques semaines après mon retour à Sarrelouis. C’est d’autant plus satisfaisant d’être la première à pouvoir soulever la coupe devant ton équipe. C’est une super sensation. Et la manière dont l’équipe m’a supportée, en criant mon nom plusieurs fois, c’était trop bien. Il y a une super bonne atmosphère au sein de l’équipe. On s’entend toutes très bien.
Est-ce une surprise pour vous de voir que vous réalisez une si belle saison, puisque vous êtes actuellement également troisième en Bundesliga ?
On m’avait vendu cela au moment de signer. J’ai discuté avec Hermann (NDLR : Paar, ancien entraîneur national qui fait partie du comité de Sarrelouis) et il m’a promis que cette année, on aurait une équipe pour aller chercher quelque chose. Même si j’étais sceptique, je lui faisais confiance. Les débuts ont été compliqués. Il n’y avait qu’une fille qui était restée par rapport à l’an passé. Mais on a beaucoup discuté. Et quand on a commencé à gagner un match, puis deux, puis trois, on a vu le potentiel de l’équipe. Et dès le mois de décembre, j’ai eu la conviction qu’on pouvait gagner quelque chose avec cette équipe.
Maintenant le but, c’est le doublé
Et maintenant, l’objectif c’est le titre ?
Oui! Maintenant, le but c’est de faire le doublé. On sait que ce ne sera pas facile. Mais on a rapporté le premier trophée au club depuis 2010. Et je pense que des équipes comme Keltern ou Berlin, première et deuxième de la Bundesliga, vont nous respecter. On est une équipe qui fait peur à l’adversaire. Et on espère qu’on va attirer encore plus de monde pour venir nous encourager. Les play-offs, ça va être d’enfer!
Et la suite ?
J’ai 33 ans, je suis pro depuis 2016 et je me demandais toujours quand j’arrêterais ma carrière. Tant que je suis en bonne forme et que ça va physiquement, je vais voir année après année. Après, si l’année prochaine on décide de jouer la Coupe d’Europe, bien sûr que c’est une motivation supplémentaire. Après en équipe nationale, j’ai eu mes premières minutes au Luxembourg en 2013. Je me dis que ce serait top de terminer au Luxembourg. Cette année c’est Andorre, dans deux ans c’est Monaco, qui est aussi sympa. Et deux ans après, ce sera le Luxembourg. Je ne sais pas si je tiendrai jusque-là, mais j’aimerais bien.
Est-ce que cette victoire permet de faire passer la déception en équipe nationale ?
Non! Après le match contre le Monténégro, j’ai passé la pire semaine de ma vie. Mentalement et physiquement, j’étais à la ramasse. Et tous les titres en club n’effaceront jamais la déception d’être passées à côté d’une occasion unique d’aller au championnat d’Europe.
Le parcours de Sarrelouis à Berlin
Demi-finale (samedi) : Sarrelouis – Alba Berlin…72-67
Meynadier : 5 pts, 6 rebonds, 1 passe et 1 interception en 27’17″
Finale (dimanche) : Sarrelouis – Rutronik Stars Keltern…97-73
Meynadier : 11 pts, 1 rebond, 1 passe et 2 interceptions en 21’57″
