Une passerelle enjambera l’Alzette afin que l’ouest et l’est de la capitale puissent être reliés à vélo. Sa dernière section a été transportée en grande pompe dimanche dans le Grund.

Réputé pour son calme, à l’abri de l’effervescence de la capitale, le quartier du Grund a connu une matinée pour le moins animée hier. Pour les lève-tard du dimanche matin, la grasse matinée a sûrement été perturbée par un bruit assourdissant au pas de leur porte. Sur la chaussée, aucune voiture, mais un drôle de spectacle : celui d’un bout de passerelle de 15 mètres de long transporté sur une remorque autonome du parking de la rue Saint-Ulric jusqu’au mur médiéval Maierchen, au pied du viaduc Pulvermühle.

La scène est d’autant plus insolite que la remorque, à l’allure de mille-pattes du fait de ses douze roues, n’est tirée par aucun camion. Son avancée obéit à une manette de commande actionnée par les doigts habiles d’un technicien, qui la suit de près. Cette section de passerelle semble donc se déplacer d’elle-même dans les rues étroites du Grund, suivie par un petit cortège d’ouvriers et d’élus, dont la bourgmestre Lydie Polfer, le tout sous les regards curieux et les prises de photos de promeneurs, joggeurs et cyclistes.

«Mais qu’est-ce qu’il se passe?» s’interroge une habitante de longue date du quartier. Comme elle, beaucoup l’ignorent, mais ils assistent à une étape symbolique du renforcement de la mobilité douce à Luxembourg. Ce bout de passerelle n’est autre que la quatrième et dernière section de la future passerelle de 30 mètres qui traversera l’Alzette dans le cadre de la future liaison cyclable Bisserwee-Kraus Eck.

Financée à hauteur de 1 198 735 euros par la Ville de Luxembourg, cette passerelle va relier la piste cyclable du Centre (PC1), au Bisserweg, à la piste cyclable qui longera la Pétrusse, près de la rue Saint-Ulric. Afin de réaliser les chemins et travaux de terrassements nécessaires autour de la passerelle, 2 455 182 euros sont également prévus.

À terme, la liaison entre les deux pistes, actuellement séparées par l’Alzette, permettra d’améliorer durablement la mobilité douce grâce à un futur axe cyclable qui traversera la ville d’ouest en est, en longeant la Pétrusse depuis Merl et en empruntant la PC1 depuis Polfermillen. 

Hier matin, ce projet ambitieux a donc franchi un cap qui était loin d’être évident. «Nous avons eu chaud», confie Simone Beissel, échevine en charge de la coordination des chantiers. Et pour cause, pour le passage de la remorque sous l’une des arches du Maierchen, cela s’est joué à seulement quelques centimètres. L’homme aux manettes a dû jouer de patience et de précision afin de réussir ce tour de force qui a impressionné les badauds. «Il devrait être honoré par le Grand-Duc pour cela», lance même une spectatrice.

«Dans le pire des scénarios, nous avions un plan B qui consistait à soulever la passerelle au-dessus du mur avec des grues et la poser de l’autre côté», assure l’échevine. À noter également que l’ouvrage sera «situé largement au-dessus des niveaux de crue de l’Alzette» et ne devrait donc exercer aucune influence sur l’hydraulique de la rivière et ne présenter aucun risque du point de vue de la stabilité en cas de crue intense.

Si la pièce manquante de la passerelle a été acheminée, il ne faut cependant pas être pressé de l’emprunter. Ripage, peinture et ajustements techniques de rigueur : quatre à cinq semaines de travaux sont encore nécessaires dans un premier temps. «L’objectif est de pouvoir l’ouvrir le 7 mai, pour le lancement de la Luga», annonce Simone Beissel. La Luga, cette exposition nationale de jardins urbains, d’installations éphémères et de projets agricoles, prendra notamment place dans la vallée de la Pétrusse. À cette occasion, les visiteurs devraient donc pouvoir franchir l’Alzette et rejoindre le Bisserweg.

Cependant, «seuls les piétons et les fauteuils roulants pourront aller dessus», prévient l’échevine. «La piste cyclable ne sera ouverte qu’au début de l’année prochaine», ajoute-t-elle, le temps notamment d’installer des garde-corps afin de sécuriser chaque côté de la passerelle.

«Alors, je vais devoir vivre jusque-là!» lance en plaisantant une riveraine retraitée qui affectionne particulièrement le vélo pour se déplacer. Comme pour elle, cette passerelle promet de changer le quotidien de nombreux Luxembourgeois et d’améliorer la circulation des cyclistes, pas toujours évidente en ville.