Piqure de rappel dimanche pour clore une semaine de cérémonies autour des 80 ans de la double libération de Vianden, dernière commune assiégée par les troupes allemandes en février 1945.
Vianden a été libérée deux fois. Une première fois le 10 septembre 1944 avec l’ensemble du Luxembourg et une dernière fois le 22 février 1945 après dix jours de combats. Ses pavés ont été les derniers sur lesquels les bottes allemandes ont résonné au Luxembourg. Quatre-vingt ans plus tard, la bourgade a commémoré cet instant depuis mercredi, entre fête et recueillement. Ces célébrations se sont clôturées dimanche après une messe en mémoire des onze soldats américains tombés pour la liberté, une cérémonie de commémoration en présence du couple grand-ducal et une parade de véhicules militaires anciens dans les rues de la ville.
Une ultime offensive avait permis à la Wehrmacht de reprendre certains territoires luxembourgeois entre décembre 1944 et janvier 1945. Dont Vianden, bastion stratégique jusqu’à l’arrivée du 1255th Engineer Combat Bataillon et de la 28th Cavalry Reconnaissance Squad de la 3e armée menée par le général Patton.
L’oncle de William Evanow, Cyrel, était un de ses libérateurs au même titre que Jack Bender, Nathan Corley, Ira Gambill, Vincent Gambino, David Glatter – dont la famille avait également fait le déplacement pour l’occasion –, Edward Griffin, Marion Hanson, Charles Nance, Harold Smith et William Tiff. Le caporal et médecin militaire est décédé à l’âge de vingt ans comme la plupart de ses dix autres compagnons d’armes. Avant que des gerbes de fleurs ne soient déposées au pied du monument commémorant leur sacrifice, il a très humblement évoqué leurs mémoires.

«La semaine passée, nos familles ont été invitées par le Grand-Duc au château de Colmar-Berg. Depuis le jardin, il a pointé du doigt des impacts de tirs dans la façade et nous a dit que les murs du château continuent de raconter l’histoire de nos oncles et de Vincent Gambino qui sont décédés à l’hôpital qui y avait pris ses quartiers, le 101e hôpital d’évacuation US», a conté le neveu, avant d’ajouter que «la paix n’est jamais gratuite». Leur sacrifice doit, selon lui, être un phare contre l’injustice et «nous devons aspirer à un monde en paix pour que les esprits de ceux tombés au combat puissent continuer de reposer en paix». Depuis cette époque, «les blessures ont guéri, mais les souvenirs restent», a estimé le bourgmestre de Vianden, François Weyrich, faisant face au monument aux morts du point de vue Op der Plank où avait lieu la cérémonie commémorative dimanche matin.

«Les soldats américains qui ont combattu pour libérer l’Europe ont livré un sacrifice que nous ne devons pas oublier. Ils ont mis leurs vies en jeu pour que nous puissions vivre en démocratie, en paix et être libres. Nous leur serons à jamais redevables», a indiqué à son tour le ministre de la Culture, Eric Thill. «Il est de notre responsabilité de transmettre ces souvenirs aux générations à venir.» Et ce, tout particulièrement en cette époque troublée par divers conflits menaçant l’ordre mondial. «Il est essentiel d’entretenir des endroits de mémoire et de les inclure activement dans les programmes culturels.»

«Des hommes ordinaires»
La transmission, la gratitude, la liberté, le sacrifice, l’amitié entre nations étaient les mots clés des discours prononcés face à l’imperturbable château de Vianden par les différents acteurs de cette cérémonie du souvenir. Un autre de ces mots, comme aussi un rappel «à conserver une société où règnent tolérance, équité et humanité», selon le ministre. Ces deux derniers ne doivent pas être vains. L’histoire mondiale doit continuer à avoir une signification pour les générations à venir et rester accessible à tous.

Et ce pour que «des hommes ordinaires» n’aient plus à «répondre à un appel extraordinaire» et à perdre leur vie comme les onze GI’s qui ont donné la leur pour libérer Vianden. «Leur bravoure a laissé une marque permanente, un héritage qui continue de dessiner le monde actuel», a avancé Michael Konstantino, chargé d’affaires de l’ambassade des États-Unis à Luxembourg. «Car à travers ces commémorations, nous célébrons également l’amitié durable entre les États-Unis et le Grand-Duché, basée sur des valeurs communes et un respect mutuel forgés par l’épreuve des guerres et maintenus par des générations de coopérations et de bonne volonté.»
Et d’insister : «Nous nous tenons côte à côte et, côte à côte, nous avons réaffirmé notre promesse de ne jamais oublier les sacrifices qui ont garanti l’avenir du Luxembourg.» Il a conclu son discours par une citation du président Truman, dont l’administration a notamment envoyé la bombe atomique sur Hiroshima : «La seule chose nécessaire au triomphe du mal est l’inaction des hommes bons.» À méditer.
Après tous ces discours et ces promesses rassurantes, la sonnerie aux morts a retenti devant l’imperturbable château de Vianden, témoin d’innombrables batailles.
