Accueil | Grande Région | Librairie L’Entre-Monde à Longwy : la fin d’un chapitre

Librairie L’Entre-Monde à Longwy : la fin d’un chapitre


Bien qu’il ne soit pas encore en liquidation judiciaire, David Da Silva sait que l’issue est inévitable. 

À quelques pas de la place Darche, la librairie L’Entre-Monde s’apprête à tirer sa révérence. Elle était spécialisée dans les univers médiévaux fantastiques et la science-fiction.

Installée dans le local autrefois occupé par la librairie Virgule, L’Entre-Monde était une adresse prisée des amateurs de littérature de l’imaginaire. Mais depuis quelque temps, la situation s’est dégradée. «C’était prévisible, au vu du nombre de librairies qui ferment leurs portes», confie amèrement David Da Silva. Ce natif de Longwy, âgé de 42 ans, a tenté de multiples stratégies pour relancer son activité : collaborations avec des associations, commandes spécifiques sur des ouvrages non référencés, diversification du catalogue, allant même jusqu’à proposer le dernier prix Nobel de littérature. Rien n’y a fait. «Je crois que c’est tout un secteur qui est en train de mourir», lâche le gérant avec résignation.

Si le commerce local est en souffrance, David Da Silva pointe du doigt un phénomène plus large : l’érosion progressive de la clientèle due à la proximité du Luxembourg. «Longwy, c’est une ville-dortoir», explique-t-il. Mais ce n’est pas le seul adversaire de sa librairie. L’essor du commerce en ligne, incarné par des mastodontes comme Amazon, a lourdement pesé sur son chiffre d’affaires. «Mes charges mensuelles dépassent les 2 000 euros, entre le loyer, l’électricité et les frais annexes. Il faudrait vendre un volume colossal de livres pour s’en sortir», déplore-t-il.

Un secteur moins rentable

Bien qu’il ne soit pas encore en liquidation judiciaire, David Da Silva sait que l’issue est inévitable. «Je liquide le stock pour atténuer les pertes, puis j’engagerai la procédure de cessation d’activité», explique le père de famille. Quant à son avenir, il demeure incertain.

Le cas de L’Entre-Monde illustre une tendance alarmante. Selon une étude du cabinet Xerfi, menée à l’occasion des Rencontres nationales de la librairie à Strasbourg, les 3 700 librairies indépendantes en France peinent à maintenir leur rentabilité. Malgré une croissance numérique depuis 2019, leur marge demeure infime. En 2022, leur bénéfice net ne représentait que 1,1 % de leur chiffre d’affaires, classant ce secteur parmi les moins rentables du commerce de détail. Les perspectives ne sont guère encourageantes : la hausse des coûts (loyer, énergie, transport), combinée à la stagnation du marché du livre, condamne les plus fragiles. D’ici 2025, la rentabilité des grandes enseignes devrait stagner autour de 1,7 %, tandis que celle des librairies de taille moyenne pourrait chuter à 0,8 %. Les plus petites structures, elles, pourraient atteindre une rentabilité négative de -1,3 %.