Après une semaine de reprise qui l’a déjà vu perdre ses deux piliers défensifs (Simao et Lemeray) et alors que des tractations devraient encore affaiblir son effectif dans les semaines à venir, le technicien hesperangeois demande à avoir enfin une visibilité sur la suite. Que visera son club sur la phase retour? Et avec qui? Un cri du coeur pour un homme qui voudrait s’investir mais manque d’informations.
Il est ardu de pouvoir parler avec quelqu’un du Swift, par les temps qui courent. A-t-on le droit de faire un point?
Emmanuel Da Costa : Ah si vous voulez, on peut faire un point. Mais moi-même, je ne suis pas très au courant.
C’est un comble.
Oui, mais c’est un fait.
Cet hiver, votre limogeage a été évoqué par certains médias. Et pourtant, vous revoilà à l’entraînement.
Comment un club pourrait-il envisager de limoger un coach alors qu’il a déjà rejeté deux fois sa démission?
Deux fois?
Oui, deux fois. C’est sans doute flatteur, d’ailleurs, qu’on l’ait refusée deux fois. Mais si on me licenciait après ces deux refus, alors ce serait une question d’égo et uniquement d’égo. Cela dit l’égo, par les temps qui courent, cela peut faire faire beaucoup de choses.
Ce groupe, on l’a pas trop mal géré parce que des grèves, avant Mondorf, on en avait déjà évité deux!
Qu’y a-t-il à en dire, de ce limogeage inexistant et jamais démenti officiellement? Avez-vous été surpris par cette rumeur?
J’en ai entendu parler à vrai dire, parce qu’on m’a envoyé les articles. Mais il apparaît qu’il s’agissait en fait exclusivement du staff de l’équipe féminine, ce qui s’est d’ailleurs révélé exact, après coup. Moi, on m’a juste appelé pour me prévenir que cela n’avait rien à voir avec moi.
Cela ressemble à une ébauche de communication interne, non?
Vous allez peut-être me traiter de menteur, mais depuis mon retour, je n’ai vu personne, ni discuté avec personne. Après, jusque-là, je n’étais pas demandeur. Mais maintenant, il y a besoin d’éclaircissements. Alors on va laisser passer encore quelques jours parce que beaucoup de choses peuvent survenir.
En fait, il continue de se passer beaucoup de choses tout le temps. Je ne veux pas prendre mes dirigeants à la gorge, mais on ne peut pas continuer à vivre ce qu’on a vécu durant la phase aller ad vitam aeternam.
Comment ont été les fêtes, à cet égard?
Les joueurs les ont passées avec trois mois de salaires en retard. Au moment où on a le plus besoin d’argent. Ils ont passé des repos soucieux. Et moi, là, je mène un travail psychologique intense qui n’est jamais mis en avant et alors que certains collègues crachent dans la soupe en assurant qu’avec eux, cela ne serait jamais arrivé, cette grève. Ça me fait sourire. Pour anticiper la grève de Mondorf, il aurait fallu être médium.
C’est facile de dire qu’on aurait pu l’éviter quand on n’a jamais, étant soi-même coach, rencontré ces problèmes de versements de salaires. Moi je vais vous dire, je crois que ce groupe, on l’a pas trop mal géré parce que des grèves, avant Mondorf, on en avait déjà évité deux!
Alors c’est bien beau de salir les gens dans la presse, mais je remarque que longtemps, toutes les choses qu’on a fait de bien, le nombre de clean-sheets consécutifs, le nombre d’expected goals par match où l’on était mieux que tout le monde, notre jeu… tout ça, personne n’en parlait.
Parce que les gens pensent que c’est normal, ils pensent qu’on est le PSG du Luxembourg. La réalité est bien loin de ça. Dans le cercle privé, j’ai dit aux gens que vu les conditions, ce qu’on réalisait était tout bonnement exceptionnel. Si j’avais dit ça à l’extérieur, à des gens qui ne savaient pas, on m’aurait ri au nez.
J’ai mené pas mal d’entretiens individuels et pas un seul joueur ne m’a dit qu’il était sûr d’être là, avec nous, en février!
Revenons sur ces défauts de versement de salaires : on ne sait toujours pas s’ils sont totalement indépendants de la volonté du club…
Je ne suis pas dans les confidences et quand on veut parler de quelque chose, je pars du principe qu’il faut maîtriser les tenants et les aboutissants.
Mais je pars aussi du principe que Flavio Becca, qui est une personne brillante dans les affaires, n’est pas non plus suicidaire! Si les règlements ne sont pas faits, ce n’est pas par volonté, en tout cas c’est ce que je veux croire. C’est qu’il y a un autre problème. Je ne veux pas m’imaginer qu’il joue avec les gens, ce n’est pas l’impression que j’ai eue de lui et des valeurs qu’il porte.
Pour revenir au terrain, quitte à ce que cela soit brièvement, vous avez découvert les départs de vos deux défenseurs centraux en arrivant, lundi 6 janvier?
Cela aussi, m’a irrité. Simao a été très classe et m’a appelé pour m’expliquer sa situation. Il m’a téléphoné juste avant d’envoyer sa lettre de résiliation. Mais pour Lemeray, je n’étais pas au courant. Alors pour moi qui suis, soi-disant, garant du sportif, là, j’estime qu’il va falloir se mettre à table pour discuter de la façon dont les choses sont faites.
Parce que j’ai besoin de savoir où je vais. Si je perds encore trois ou quatre joueurs, je fais quoi, sur quel pied est-ce que je dois danser? Là, clairement, je suis très inquiet. Et c’est aussi parce qu’on n’a pas un fonctionnement dans lequel je me reconnais. Moi, je suis juste un coach qui a déjà vu beaucoup de choses dans ma carrière… mais jamais ça.
Depuis août, j’ai avalé beaucoup de choses, j’ai montré beaucoup de résilience, mais maintenant, quitte à me casser la figure, j’aimerais que ce soit avec mes idées. Parce que si on perd, c’est sur mes doigts qu’on va taper. Alors que là, je ne sais rien de ce qui se passe.
J’ai confiance en M. Becca : s’il avait vu que notre situation était sans issue, il m’aurait laissé partir
Savez-vous justement avec quel effectif vous reprendrez la saison, début février?
J’ai mené pas mal d’entretiens individuels et pas un seul joueur ne m’a dit qu’il était sûr d’être là, avec nous, en février! En fait, aujourd’hui, je suis comme vous. Vous en savez même peut-être plus que moi. Pour savoir, j’écoute, j’entends et je lis, aussi. Au club, personne n’est capable de me dire avec qui je pourrai jouer en février.
Est-il envisageable de vous voir continuer à embarquer des juniors à la remorque du bus de l’équipe première, comme vous l’avez fait contre le Progrès pour clôturer l’année, au cas où une nouvelle grève survienne et pour éviter un nouveau forfait qui serait fatal?
Non, ce n’est pas viable. On ne peut pas continuer toute la phase retour comme ça. Au Progrès, on avait sept gamins dans le vestiaire, il y avait du monde partout. Alors on les a envoyés dans le froid, en tribunes, pour avoir de l’espace, avant de les rappeler pour ne pas qu’ils gèlent. Mais on ne peut pas se permettre de faire ça.
Et c’est bien pour cela qu’il faut une conversation avant la reprise. J’ai cet avantage, ou cet inconvénient, de faire confiance aux gens. Donc j’ai confiance en M. Becca : s’il avait vu que notre situation était sans issue, il m’aurait laissé partir.
À quoi votre deuxième partie de saison va-t-elle bien pouvoir ressembler?
Je pense que certains joueurs ont atteint le point de non-retour. Chez certains, le ressort est cassé. Je suis transparent : tant que les joueurs ne retrouvent pas la banane, leur joie de vivre…
Vous me demandez si j’ai des doutes sur les arrêts de travail de mes joueurs? Et bien oui, j’en suis là.
On évoque aussi des certificats médicaux de complaisance pour ceux qui sont forcés à venir, contractuellement. Avez-vous des doutes quand certains joueurs vous disent être malades ou blessés?
Vous avez mis le doigt sur quelque chose et la réponse à votre question est justement dans la question. Vous vous rendez compte : vous me demandez si j’ai des doutes sur les arrêts de travail de mes joueurs? Et bien oui, j’en suis là. Mais pour l’heure, j’ai en moyenne vingt-et-un joueurs de champ aux séances et on pourra faire l’amical de samedi contre Bissen.
La suite? Et bien si on me dit qu’on ne prend pas de risque et qu’on ne joue plus qu’avec des jeunes, très bien. Je le ferai. Je vous dirai même que cela me fera plaisir parce que j’aime travailler avec eux et qu’au moins, là, les choses seront claires. Qu’on me dise enfin les choses dans les yeux. Moi, je demande juste à pouvoir travailler enfin normalement.
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