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Carrières scientifiques : des femmes comme modèles pour inspirer les lycéennes


L’Université du Luxembourg lance ce jeudi sa nouvelle campagne valorisant l’expertise des femmes dans les sciences. 

Alors que les adolescentes du Luxembourg restent peu nombreuses à choisir la recherche ou l’ingénierie pour leur carrière, des actions ciblées commencent à porter leurs fruits.

Selon les données d’Eurostat publiées en 2024, l’Union européenne comptait 7,3 millions de femmes scientifiques et ingénieures en 2022, représentant 41% de l’emploi total dans le domaine des sciences et de l’ingénierie sur le continent.

Et avec 49% de femmes occupant désormais ce type de postes sur son territoire, le Luxembourg a fait un pas de géant, puisqu’en 2019, elles atteignaient à peine 28%.

Des stéréotypes tenaces

Cependant, le challenge n’est pas tout à fait relevé si on considère que la majeure partie de ces salariées ont grandi à l’étranger, et que les jeunes Luxembourgeoises, elles, ont encore du mal à se projeter professionnellement dans les voies scientifiques ou techniques.

Parmi les freins qui persistent, on peut citer les stéréotypes sexistes à l’œuvre dès le plus jeune âge dans la sphère familiale (éducation différente des frère et sœur, activités et jouets genrés). Des idées ancrées qui pèseront lourd par la suite, au moment du choix de carrière.

En parallèle, dans leur parcours scolaire, trop peu de professeurs les incitent à s’orienter vers la recherche ou l’ingénierie. Enfin, le manque de modèles de femmes scientifiques auxquelles s’identifier n’aide pas non plus.

Des actions pour inverser la tendance

C’est pourquoi plusieurs initiatives lancées au Grand-Duché ces dernières années permettent aux élèves de se confronter aux domaines des sciences et de l’ingénierie :

  • On peut notamment citer l’organisation WeStem+, anciennement Girls in Tech, engagée en faveur des groupes sous-représentés dans les domaines des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques (Stem).
  • L’asbl Jonk Entrepreneuren a mené, de son côté, le projet européen «Girls Go Circular» auprès des jeunes filles de 11 écoles et lycées du pays, avec l’objectif de booster leurs compétences numériques et entrepreneuriales via un programme d’apprentissage en ligne.
  • L’entreprise sociale Wide And Co anime des formations tout au long de l’année pour combler l’écart entre les sexes dans le domaine des technologies de l’information et de la communication (TIC) et encourager davantage de femmes à se lancer dans cette branche.
  • Le ministère de l’Éducation nationale a, quant à lui, introduit des cours de codage à l’école et au lycée dès 2020.
  • Enfin, depuis 2022, à travers des témoignages en vidéo, l’Université du Luxembourg met en lumière les parcours brillants de certaines de ses anciennes étudiantes pour en inspirer d’autres.

12 portraits en vidéo

Une opération renouvelée ce jeudi, avec le coup d’envoi de sa nouvelle campagne «GirlsinSciTech» destinée à promouvoir les études en ingénierie, informatique, mathématique et physique auprès de futures candidates.

Ces prochains mois, une série de 12 portraits filmés seront diffusés en ligne : une visibilité essentielle pour motiver les plus jeunes à suivre des chemins similaires.

27% de professeures

Cette mission, l’Université la poursuit aussi pour ses propres effectifs, alors qu’elle ne compte que 27% de femmes parmi ses 300 professeurs (2023), et qu’elles sont encore rares dans les disciplines scientifiques.

À la suite d’un audit en 2020, des mesures ont été instaurées pour réduire ce déséquilibre, à commencer par des efforts particuliers au niveau des procédures de recrutement, incluant des comités plus représentatifs et des formations spécifiques pour les présidents.

De plus, dans les départements les plus désertés par les femmes, à qualification égale, l’Université fait désormais pencher la balance en faveur des candidatures féminines. Avec l’espoir d’atteindre 30% de professeures en poste avant la fin de cette année.

Portrait : Marie-Alix Dalle, ingénieure

«Sans leurs encouragements, je ne serais jamais lancée»

À 34 ans, Marie-Alix Dalle a un impressionnant parcours derrière elle : ingénieure depuis deux ans chez ArcelorMittal Luxembourg où elle travaille notamment sur la décarbonisation dans la production de l’acier, la jeune Française est passée par Polytechnique, où elle a suivi un cursus en ingénierie de l’environnement, puis Berkeley, où elle s’est spécialisée dans le traitement de l’eau, avant de décrocher son doctorat en thermodynamique à l’Université de Luxembourg en 2022.

Pourtant, elle ne le cache pas, ce sont avant tout des rencontres qui ont guidé son destin : «Sans les encouragements de mes professeurs, je ne me serais jamais lancée!»

Car malgré sa passion dévorante pour les maths et la physique dès son plus jeune âge, l’adolescente n’envisage pas une seconde d’en faire son métier. «Je ne me pensais pas à la hauteur. Et puis, je ne connaissais même pas l’existence des écoles d’ingénieurs! Au lycée, ma prof de maths m’a poussée à faire une prépa, et grâce à elle, je m’en suis sentie capable.»

Avec les filles de sa classe, elles sont conviées à un événement dédié aux femmes dans l’industrie : les discours qu’elle y entend renforce un peu plus sa confiance. Elle se souvient s’être sentie «à sa place».

À son arrivée en classe préparatoire à Paris, elles ne sont que cinq ou six filles sur une trentaine d’étudiants dans son groupe. Là encore, un prof repère vite son potentiel : «J’étais persuadée que Polytechnique, c’était inaccessible. Il m’a convaincue du contraire et j’ai réussi le concours d’entrée. Il n’y avait que 14% de filles parmi les élèves», note-t-elle, parfaitement consciente de faire partie de l’«exception».

«Les milieux dans lesquels j’ai évolué restent très masculins. Les femmes dans la recherche se concentrent dans des disciplines comme la biologie ou la médecine, donc on retrouve cette notion de soin, liée à ce qu’on attend traditionnellement d’elles», pointe-t-elle. «Et du côté des professeurs, ce ne sont quasiment que des hommes.»

Sur son temps libre, Marie-Alix Dalle crée et anime des ateliers de vulgarisation scientifique pour enfants et ados. Le public peut découvrir son témoignage dès maintenant en vidéo.