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La fin d’une époque ?

Deux actualités se sont violemment télescopées mardi en France. La nouvelle de la mort de Jean-Marie Le Pen est tombée alors que se déroulaient les commémorations en hommage aux victimes de l’attentat ayant visé Charlie Hebdo. Les dessinateurs du journal satirique tués sous les balles des terroristes islamistes étaient souvent ceux qui décrivaient le mieux le patron du Front national, ceux qui montraient son vrai visage.

Jean-Marie Le Pen aura laissé sa marque dans la politique française. Ou, devrait-on dire, sa morsure. Il a fait progresser son parti et ses idées nauséabondes du début des années 80 jusqu’au choc de sa qualification pour le second tour de l’élection présidentielle en 2002. Révisionnisme, antisémitisme, racisme… Le tribun, qui se laissait surnommer «le Menhir», a perdu de nombreux procès. L’héritage était trop lourd pour sa fille Marine Le Pen, qui a repris le parti. Elle a effectué un grand nettoyage pour redorer l’image de cette faction de l’extrême droite française qui aspire maintenant au pouvoir. Et il n’a jamais été aussi près de l’obtenir par ailleurs. Marine Le Pen, quelque temps après sa prise de fonction, a même exclu du parti son propre père après un énième scandale. Elle a fait dégager ses anciens camarades de route et a changé le nom de la boutique, passant du Front national au Rassemblement national. La stratégie a marché. Marine Le Pen martèle à qui veut l’entendre que son parti n’est pas d’extrême droite, qu’il a coupé les liens avec le passé du Front national. Pourtant, lorsqu’on lit les messages publiés par les députés de son parti pour rendre hommage à Jean-Marie Le Pen, les masques tombent. L’admiration pour le «guide» suinte au fil des phrases.

Pour le Rassemblement national, Jean-Marie Le Pen est maintenant plus utile mort que vivant. Les militants et élus de ce parti commencent déjà à broder une légende autour de ce monstre politique dans tous les sens du terme : courageux soldat, élu dévoué à l’Assemblée nationale ou au Parlement européen, défenseur de la France seul contre tous. L’histoire du personnage est terriblement plus sombre, mais la machine à propagande va bientôt se lancer.