Les hivers sous la neige se font de plus en plus rares à Luxembourg. Pourtant, il y a une soixantaine d’années, un épais manteau blanc recouvrait les pentes du Grund… Et faisait des heureux!
C’est l’un des spots favoris des amateurs de glisse dans la capitale luxembourgeoise : si le Grund continue d’attirer du monde lorsque les premières neiges tombent, le célèbre quartier de Luxembourg n’a plus vu de skieurs depuis bien longtemps.
Non, vous ne rêvez pas, nous avons bien mentionné des «skieurs». Dans les années 50-60, le quartier était en effet pris d’assaut pour réaliser quelques descentes. Plusieurs photos issues de la Photothèque de la Ville de Luxembourg sont là pour en témoigner.
Il faut dire que les températures descendaient alors sous la barre des -20 °C. Des extrêmes devenus inexistants dans le pays depuis… 37 ans. Les températures minimales observées au Findel font état d’un dernier jour de grand froid à -17,2 °C le 12 janvier 1987. Du jamais vu depuis.
La faute au changement climatique qui, d’année en année, ne cesse de s’amplifier. L’hiver dernier a été qualifié de «beaucoup trop doux et humide» par MeteoLux, qui l’a même placé «troisième hiver le plus chaud jamais observé au Findel depuis 1947».
Attendez-vous à une tendance similaire pour cet hiver 2024/2025 : la station météorologique prévoit à nouveau un «hiver plus chaud que la normale», à l’image des années précédentes.
De la dynamite sur l’Our
Le Grund n’est donc pas près de revoir ses skieurs. À titre de comparaison, la moyenne des températures l’hiver dernier était de 4,1 °C. De quoi laisser les luges au placard. Les plus nostalgiques se souviendront des sentiers de glisse improvisés ou encore du patinage sur la Moselle gelée lors de l’hiver 1970. La terrible vague de froid de 1956 a, elle, laissé un moins bon souvenir.
Elle s’était abattue sur toute l’Europe et avait fait plus de 800 morts. Au Luxembourg, la journée du 2 février avait été particulièrement éprouvante avec -20,2 °C au thermomètre. C’est d’ailleurs le jour le plus froid jamais connu au Grand-Duché depuis le début des relevés météorologiques du Findel en 1947.
Il y a 68 ans, à Vianden, les habitants devaient dégager les rues à coups de hache. L’armée luxembourgeoise avait même utilisé de la dynamite pour dégager l’Our, gelée. Des scènes surréalistes, immortalisées également dans les archives de nos confrères de RTL.
Face à ces conditions dantesques, certains habitants, ingénieux, avaient fixé des skis sur leur vélo, pour leur permettre de se déplacer plus facilement. Les tracteurs venaient dégager les routes impraticables. Des scènes qui n’ont plus lieu d’être aujourd’hui.
En voie de disparition
L’institut de recherche américain Climate Central a publié une étude à ce sujet la semaine passée. Il estime que plus d’un tiers (44) des 123 pays et près de la moitié (393) des 901 villes qu’il a analysées ont perdu au moins l’équivalent d’une semaine de jours de gel chaque année en raison du réchauffement d’origine humaine.
L’étude conclut que le changement climatique a particulièrement augmenté le nombre de journées d’hiver aux températures positives en Europe, le continent qui se réchauffe le plus vite dans le monde. Les pays les plus concernés ont été le Danemark et les pays baltes.
«La neige, la glace et le temps froid, qui étaient des symboles de la saison hivernale, sont en train de rapidement disparaître en de nombreux endroits, menaçant les écosystèmes, les économies et les traditions culturelles», souligne Kristina Dahl, la responsable scientifique de Climate Central. Or ces journées d’hiver glaciales sont «cruciales» pour un ensemble de secteurs allant des sports d’hiver à la production d’eau potable, qui dépendent de la quantité de neige, note-t-elle.
Les auteurs soulignent également les conséquences sur la santé : le froid permet de réguler les populations d’insectes porteurs de maladies comme les moustiques et les tiques, tandis que des hivers plus courts favorisent la dissémination du pollen, et donc les allergies.
L’agriculture peut aussi être affectée par le phénomène, en particulier pour la croissance de certains fruits comme les pommes ou les pêches, qui requièrent des périodes fraîches prolongées.