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Premières greffes de cornée oculaire au Luxembourg : «Déjà de très bons résultats»


La transplantation de la cornée dure généralement une vingtaine de minutes. (photo archives LQ)

Le Dr Eulufi, spécialiste en chirurgie de la cornée, a réalisé les premières greffes de cornée du pays il y a quelques mois. Un progrès médical qui marque une avancée notable pour le Grand-Duché.

Ophtalmologue au Luxembourg depuis 2016, le Dr Christian Eulufi est un grand spécialiste de la cornée. Formé à l’hôpital universitaire de la Charité de Berlin, il est reconnu pour son expertise en matière de transplantation d’organes. Cette année, il a réalisé plusieurs greffes de cornée au service national d’ophtalmologie spécialisée (SNOS) des Hôpitaux Robert-Schuman.

Ces greffes sont une première pour le pays ?

Christian Eulufi : Les chirurgies de transplantation de cornée étaient jusqu’ici réalisées à l’étranger, par exemple, en France, en Allemagne ou encore en Belgique. C’est un vrai plus pour le pays de pouvoir traiter nos patients au Luxembourg. Depuis cette année, nous avons réalisé plusieurs greffes. Et nous avons eu de très bons résultats.

Ce progrès médical est une grande avancée pour le Luxembourg ?

Évidemment. Cela facilite également la prise en charge. À l’étranger, les patients luxembourgeois doivent attendre parfois plusieurs années pour avoir une transplantation. Ensuite, quand ils se font transplanter, ils doivent revenir plusieurs fois pour des contrôles. C’est quelque chose qui peut être très lourd pour les patients.

Souvent, ils commencent par l’opération d’un œil et sont découragés pour faire l’autre. À présent que nous faisons cela ici, la liste d’attente concernera uniquement notre pays et les contrôles postopératoires pourront se faire ici. Les bénéfices sont donc importants.

Pourquoi certains patients doivent-ils bénéficier de cette greffe ?

C’est souvent lié à des maladies qui affectent la cornée, la partie transparente de l’œil. Elle est composée de cinq différentes couches. Il peut y avoir des problèmes dans la partie avant de la cornée ou dans la partie postérieure. La technique du DMEK (NDLR : Descemet membrane endothelial keratoplasty) que nous développons ici au Luxembourg permet de traiter toutes les maladies se situant dans la partie postérieure de l’œil.

De plus, d’autres pathologies peuvent affecter l’endothélium, une petite partie de la cornée qui gère la quantité d’eau oculaire. Si elle est trop abondante, des patients vont connaître des altérations de leur vue jusqu’à la perdre même totalement. La greffe va donc permettre de retrouver une vision normale ou même la vue complète dans certains cas.

Quels types de maladies provoquent des altérations de la cornée ?

L’une des plus fréquentes est la dystrophie de Fuchs, une maladie héréditaire. S’ils en sont atteints, les patients commencent à avoir certains signes à 30 ou 40 ans. Mais ils n’ont pas encore de symptômes, ils voient encore très bien. Vers environ la cinquantaine, ils commencent à avoir une perte progressive de la vision.

Pour permettre ces greffes, les dons de cornée sont indispensables.

Nous avons des donneurs, mais bien entendu, nous avons besoin de plus de ce que nous recevons. C’est pour cela qu’il faut informer le public et le sensibiliser à ces dons. Il faut savoir que si une personne qui a une bonne santé oculaire meurt, sa cornée peut être utilisée pour sauver la vision d’une autre personne.

Au Luxembourg, toute personne est donneuse d’organes, à moins qu’elle ait signifié qu’elle ne voulait pas l’être. La cornée peut donc être prélevée automatiquement, car c’est un organe comme un autre. Elle peut l’être également chez des patients plus âgés. En général, sauf en cas de maladie, elle tient très bien dans l’œil et pendant de nombreuses années.

Comment se passe cette opération ?

Elle dure plus ou moins vingt minutes. Durant celle-ci, nous faisons une anesthésie locale. Les patients restent généralement de une à deux nuits à l’hôpital. La récupération est extrêmement rapide. En une à deux semaines, les patients retrouvent une excellente vue.

Lors d’une greffe, les cornées doivent-elles êtres compatibles ?

Contrairement aux autres organes, où il peut y avoir des problèmes immunologiques, la réponse immunologique est ici très faible, parce qu’il n’y a pas de vaisseaux sanguins dans la cornée. Ce qui fait que le taux de rejet est très faible : il est généralement de 1 à 5 %.

La demande pour ces greffes était-elle importante dans le pays ?

On ne peut se fixer sur un chiffre exact, étant donné que les patients luxembourgeois allaient auparavant à l’étranger. Nous verrons dans l’avenir combien cela va représenter de patients, mais je pense que le nombre sera assez élevé. Tous les patients affiliés à la CNS pourront bénéficier de cette greffe, qui est prise en charge par la Caisse nationale de santé. Nous avons déjà de nombreuses interventions planifiées pour les prochaines semaines et mois à venir, mais pour le moment, nous arrivons à gérer et nous n’avons pas de liste d’attente.