Haytem a été blessé à la machette. L’auteur du coup et son frère accusent Mohamed de les avoir manipulés pour qu’ils fassent le sale boulot. Leurs «aveux» sont à peine croyables.
Difficile de séparer le vrai du faux. Peu ou trop bavards face au juge d’instruction, Sami et son frère ont décidé de passer à table. Chacun à sa manière. Ces aveux cependant n’apportent pas plus de clarté à cette affaire de tentative de meurtre à la machette. Chamseddine a menti face au juge d’instruction et a bien du mal de s’en dépêtrer à la barre. Sami, lui, a apporté de nouveaux éléments.
Saïf aurait cherché Mohamed qui «avait repris son business de drogue pendant qu’il était en prison». Haytem, la victime de l’attaque à la machette, et Saïf auraient attaqué le domicile de Chamseddine «avec une machette et un fusil à pompe» deux jours avant les faits qui occupent la 13e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg depuis le début de la semaine.
Le 5 février 2022, par hasard selon Sami, Mohamed, Chamseddine, Ahmed et lui ont croisé Salim, un ami de Saïf et Haytem devant le café Replay à Pétange. «Ce sont des mecs mortels, nous a dit Mohamed. Nous devions nous armer», explique le prévenu. «Les deux frères devaient se trouver à l’intérieur.» Sami avoue avoir été «à l’initiative» du coup de machette qui a scalpé Haytem. «Je n’avais pas dormi depuis trois jours et j’avais mélangé les stupéfiants.» Mohamed n’aurait pas commandité l’attaque, comme le pense la présidente de la chambre criminelle.
Cette version inédite des faits ajoute de la confusion à la confusion qui règne déjà dans cette affaire. Ainsi que de la tension. Les différents protagonistes se tiennent en joue du regard depuis les quatre coins de la salle d’audience qui a pris des allures de poudrière.
Sami aurait voulu faire peur à Haytem. «Le coup est parti tout seul. J’étais sous l’influence de la cocaïne que Mohamed m’avait donnée», explique le jeune homme qui n’ose pas se mouiller davantage, mais il apparaît que Mohamed aurait conditionné ses coprévenus au cours des jours qui ont précédé l’attaque. «Il ne m’a pas payé, mais il m’a bien manipulé.»
«Vous mentez depuis le début»
Chamseddine, à son tour, mouille Mohamed. «Si nous sommes condamnés, ce sera à cause de lui», constate le jeune homme de 22 ans. Pourtant, Mohamed jure ne pas s’être trouvé sur les lieux de l’attaque et ne pas en être à l’origine. «Je savais que Mohamed avait un problème avec les frères Saïf et Haytem. Nous ne voulions pas le laisser seul», précise le prévenu qui a tiré à trois reprises avec un pistolet d’alarme à l’intérieur du café. «Mohamed m’a manipulé avec l’argent. Il m’a proposé du travail.» Ou menacé avec un couteau en fonction des versions livrées par le prévenu au fil de l’instruction.
Pressé par la juge, il se dégonfle. «Face au juge d’instruction, vous l’accusez aussi d’avoir porté le coup de machette. Pourquoi l’accuser de tentative de meurtre?», lui demande la présidente. «Pourquoi vous être mêlé de ses affaires avec la victime et son frère?» Chamseddine prétend aujourd’hui avoir entendu Mohamed leur dire devant le café, «c’est lui, Haytem, il faut le frapper». La juge pense qu’il a accusé Mohamed pour protéger son frère. «Vous mentez depuis le début.»
Le présumé chauffeur de la bande n’a pas non plus contribué à amener de la lumière sur cette affaire. «J’ignorais ce qu’ils allaient faire. Jamais je n’aurais conduit quelqu’un pour aller faire du mal», a-t-il prétendu. « Je les ai conduits à la station-service à Rodange et je leur ai laissé ma voiture en échange de cocaïne et de fumette.» Une version qui change de celle livrée au juge d’instruction. De plus, «trois prévenus vous ont désigné comme chauffeur», précise la présidente. «Vous ne seriez pas ici si vous aviez uniquement prêté votre véhicule.»
S’il devait effectivement les avoir conduits, ce n’était pas en connaissance de cause, se défend le prévenu. «J’étais toxicomane. Va savoir si je les ai conduits ce jour-là.» « Saïf nous a dit hier que vous lui aviez confié les avoir conduits le 5 février 2022. Il nous a menti alors?», lance la juge. Le prévenu est un sacré personnage. Il cause, il cause, il cause… «Ils étaient au moins cinq ou six dans ma voiture et deux autres dans une voiture immatriculée en Belgique», s’est souvenu le prévenu. «Mohamed n’était pas là.» Puis, il revient sur ses propos. «Ils ont changé. Ils ont grossi. C’était il y a deux ans.»
Haytem et Saïf avaient, la veille, témoigné à la barre ne pas avoir d’explication quant à la raison de l’attaque à la machette et compter sur la justice pour leur en donner une. Le procès se poursuivra les 10 et 11 décembre.