Sans domicile fixe, le prévenu à peine majeur a passé à tabac un autre sans-abri sans aucune raison il y a deux ans. Une agression brutale. Dwayn et Marcel ne se connaissaient pas.
Marcel, 41 ans, a été victime «d’un déferlement de violence» dans la nuit du 26 juin 2022. À l’époque, Marcel était un sans-abri. Il dormait sur un banc dans un arrêt de bus à Luxembourg-Kirchberg quand il a été attaqué par trois jeunes hommes, dont Dwayn, 20 ans à l’époque des faits, et lui aussi sans domicile fixe.
Le jeune homme était passablement éméché. Pas assez pour perdre le contrôle, mais suffisamment pour être refoulé par un agent de sécurité qui avait refusé de le laisser accéder au concert où il voulait se rendre à Luxexpo. Il s’était alors replié sur les Rives de Clausen. Dans un des bars, il mélange alcool et stupéfiants. Il reconnaît avoir l’habitude d’en consommer depuis l’adolescence. Dwayn est un garçon sans repères qui enchaîne les séjours et les fugues au Centre socio-éducatif de l’État, puis, sans formation et sans emploi, les canapés des connaissances.
Il est également violent et agressif quand la frustration monte, décèle un expert judiciaire face à la 7e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg, réunie hier. Ce soir-là, c’était le cas quand Marcel lui a demandé de bien vouloir faire moins de bruit, «s’il vous plaît». Il assène un premier coup à la tête de Marcel. De nombreux autres suivront, filmés par un des jeunes.
Marcel s’en tire avec deux côtes cassées, une fracture du pied et de nombreuses autres blessures. «J’ai essayé de leur échapper, mais, blessé, je courais mal», témoigne Marcel. Roué de coups, il tombe à terre. «Ils ont essayé de me prendre mon téléphone pour m’empêcher d’appeler de l’aide, ainsi que mon sac. Ils ont répandu mes affaires partout.» Marcel est aujourd’hui encore traumatisé par ce qui lui est arrivé.
Il a laissé éclater sa rage
«Il a agressé plus faible que lui pour se rassurer. Il est intolérant à la frustration et impulsif», selon le neuropsychiatre. «Il a une personnalité dissociale qui ne lui permet pas de reconnaître les situations et de ne pas retomber dans ses anciens travers. Les personnes dissociales vont au plus simple.» Le pronostic du médecin à l’égard du prévenu est réservé, malgré le fait qu’il prétende être sevré depuis les faits et «être une autre personne».
Face aux juges, le jeune homme ne sait pas quoi dire. Il ne se souvient plus de tout, paraît perdu, buté. «Je ne sais pas pourquoi j’ai fait cela. Ma mère était très malade à l’époque», explique le prévenu. «Je connais beaucoup de personnes qui ne vont pas bien. Ce n’est pas une raison pour casser les os des gens», lui répond le président. «Vous avez eu de la chance, au départ, vous étiez poursuivi pour tentative de meurtre.» Les faits ont été requalifiés en vol avec violence.
La violence, il la connaît depuis son plus jeune âge, selon son avocat. Il aurait perdu pied quand la maladie de sa maman, son seul pilier, s’est déclarée. «Cela a eu des conséquences sur sa personnalité, sur sa scolarité» et «sa rage n’a fait qu’augmenter». Me Kreutz explique que son client ne cherche pas à nier les coups. Il rejette cependant l’accusation de vol retenue à son encontre. «Il n’a pas fouillé dans le sac de la victime, il voulait juste laisser éclater sa rage. À aucun moment, il n’a touché à ses effets personnels.»
Les faits ont déjà valu à Dwayn six mois de détention préventive. La substitut du procureur d’État requiert une peine de 24 mois de prison contre lui, soulignant «sa mémoire sélective». Elle ne s’oppose pas à ce que la peine soit assortie du sursis probatoire avec obligation de soins et de trouver un emploi. «Il est dehors depuis deux ans et, depuis, il ne s’est rien passé de négatif», pointe son avocat. Dwayn se débat pour trouver sa voie, avance Me Kreutz, qui plaide contre un retour derrière les barreaux.
Le prononcé est fixé au 12 décembre.