À sa manière, Dream Catcher dessine son rêve depuis des années. Après avoir célébré son quart de siècle en 2023 sur scène et en studio, voilà que le collectif remet ça, avec un orchestre… de 20 musiciens ! Confidences.
Depuis la fin des années 1990, Dream Catcher mélange son folk à la Pogues et ses racines luxembourgeoises à la chanson française et à la pop. Ne reculant devant rien, la formation, emmenée par John Rech au chant, a notamment joué au fond de la mine à Rumelange où se mêle, à l’envi, avec l’harmonie municipale de Dudelange, rebaptisée The Big Gang Theory dans sa version réduite.
Des expériences matérialisées sur disque, d’abord avec Live – Under a Blood Red Ground, sorti en 2023 pour le quart de siècle de la formation, puis avec Liv/f/e in an Empty Space, dévoilé en cette fin de semaine. Douze morceaux, 26 musiciens et un répertoire sans nul autre pareil revisité : ça méritait bien des explications.
2023 était l’année des 25 ans de Dream Catcher. Avez-vous bien fêté ?
John Rech : (Il rit) Oui, on a bien fêté. Il y a eu plein de chouettes concerts en plein air, notamment ceux en première partie de Robbie Williams. On a senti de l’engouement et de l’intérêt de la part du public. Je pense même que l’on s’est fait de nouveaux fans ! Il y a eu également la sortie du double album. Bref, beaucoup de joie, en studio et à l’extérieur.
Justement, entre la sortie du disque et le double concert donné à Luxexpo en juillet, lequel choisissez-vous ?
(Il hésite) L’album ramène à de beaux souvenirs : être là, dans la mine, avec tous les fans, à fond, qui chantaient les chansons du début à la fin… C’était quelque chose d’unique, un moment de communion rare. Jouer devant 10 000 personnes deux soirs d’affilée, juste avant Robbie Williams, ça marque aussi les esprits. Mais si je devais choisir, ce seraient les concerts de Rumelange, parce que l’on était sur scène deux heures chaque soir, et qu’après, on prolongeait les plaisirs.
Il y a aussi la connexion avec l’harmonie municipale de Dudelange. À quand cela remonte ?
Il y a une dizaine d’années déjà, on a travaillé avec l’harmonie de Mamer. Puis est arrivée celle de Dudelange en 2018. On a remarqué qu’il y avait du potentiel pour faire quelque chose ensemble, qu’elle collait à l’énergie et à la fougue de Dream Catcher. Surtout, elle riait et répondait aux bêtises que l’on faisait sur scène ! Une seule contrainte s’est imposée : réduire le nombre de musiciens, de soixante au départ à une vingtaine. Ça s’est allégé au fil des concerts.
Ensemble, soit 26 musiciens, vous avez décidé de sortir un album. Pourquoi ce choix ?
Pour concrétiser cette bonne entente. Pour continuer aussi à jeter ce regard en arrière, ressortir de vieilles chansons du répertoire, surtout celles que l’on ne jouait plus. En réalité, on a fait un « cover » de nous-mêmes en version jeune (il rit). Insuffler une nouvelle âme aux anciens morceaux, j’adore ! Et comme ensemble, on s’amuse tellement sur scène, on a enregistré l’album en live. Ça évite d’en faire trop et de rester honnête.
Qu’apporte The Big Gang Theory aux chansons de Dream Catcher ?
Beaucoup plus de puissance, une nouvelle fraîcheur et l’occasion de se renouveler, de se surprendre aussi. Sans oublier, bien sûr, un côté festif. Pour que ça fonctionne, une forme de connexion est indispensable, comme un sens du partage et de l’amusement. Oui, il faut de la joie, surtout en ce moment.
Est-ce compliqué à gérer quand on passe d’une formation pop-folk classique à un groupe-orchestre ?
Concrètement, trouver des dates de concert, ça devient bien plus compliqué… Musicalement, par contre, c’est quelque chose qui s’est développé de façon lente et naturelle. Rien n’a été forcé, car pour les uns comme pour les autres, le plus important, c’est la chanson et la façon de la jouer. En concert ou en studio, on a toujours beaucoup discuté de ça. Au final, on a la même passion. Ça se voit, et ça s’entend !
Il y a une vie après le Big Gang!
Si vous n’aimez pas la nouvelle version, vous pouvez toujours revenir sur l’ancienne
En live, trouve-t-on la même spontanéité ?
On l’espère (il rit). Non, ça va le faire, mais comme on est aux commandes, on va sûrement changer des choses au dernier moment d’ici vendredi! Disons que ça va être un concert avec un Dream Catcher en version réduite, puis élargie et en compagnie de l’orchestre. Tout en variations.
Le titre de l’album, Liv/f/e in a Empty Space, semble aussi avoir plusieurs variations. Expliquez-nous cela.
C’est très simple en réalité : il y a le terme « live » puisqu’il a été créé en direct, et « life » car il y a une vie après le Big Gang! La suite du titre fait référence à la salle vide lors de l’enregistrement. Le seul public, c’étaient les deux ingénieurs du son… La maison de disques, Jazzhaus Records, s’est aussi demandé ce que ça signifiait.
Le disque, comme vous l’écrivez, propose du « familier » de manière « fraîche et innovante ». C’est-à-dire ?
C’est un voyage dans le temps et la carrière de Dream Catcher. Et aujourd’hui, ces chansons racontent de nouvelles histoires. Surtout que l’on aime jongler avec les humeurs, jouer un même morceau de façon douce, puis en mode punk. Alors, au fil du temps, elles prennent une autre tournure, invitent à une autre interprétation. Un exemple : la chanson Verluer évoque la naissance de ma fille, mais le public, lui, imagine souvent qu’elle se réfère à la mort, la perte d’un être cher. Avec ces nouvelles versions, c’est un peu la même chose que pour nous : elles se dévoilent sous un jour nouveau.
Cette « compilation » est-elle fidèle à ce que représente Dream Catcher ?
Ça parle de la famille, d’amour, du temps qui passe et de l’innocence de la jeunesse. Alors oui, c’est en effet un petit film de notre carrière! Mais ce n’est qu’une face, et pour avoir la version complète, il faut venir au concert. Là, il y aura toutes les facettes de Dream Catcher.
Est-ce important de rafraîchir un répertoire ?
Absolument. Quand je vais voir un groupe que j’aime en concert, je suis content d’écouter les nouveaux morceaux, mais j’attends avec impatience, comme beaucoup, les vieux standards! Ils renvoient à des histoires et des moments personnels de la vie. Déjà, c’est bien qu’ils ne dorment pas dans les cartons, et les rejouer, même différemment, apportent de la fraîcheur, de l’honnêteté.
Inversement, réinterpréter une chanson, est-ce aussi une façon de la dénaturer ?
Il faut respecter la chanson, son histoire. Si on ne le sent pas, ça ne sert à rien d’insister. De toute façon, ça se perçoit quand on la joue : si tout l’amour et l’énergie que l’on y met ne suffisent pas, on la laisse de côté. Après, l’avantage est que si vous n’aimez pas la nouvelle version, vous pouvez toujours revenir sur l’ancienne (il rit).
Que pensez-vous jouer comme rôle sur la scène luxembourgeoise ?
(Il réfléchit) Je n’y ai jamais songé. Je pense toujours à la prochaine chanson, au prochain concert…
Pourtant, vous parlez de « répertoire familier », au cœur d’une longue carrière. Ça compte, non ?
Oui, sûrement. Sur la scène nationale, on est un peu des ovnis. C’est vrai, il y a des groupes qui peuvent parfois ressembler à Dream Catcher, comme Schëppe Siwen. Mais c’est assez rare. C’est que depuis des années, on a développé notre propre style : on chante en trois langues, on mélange les genres et notre son, unique, se reconnaît à l’oreille. Oui, on ne ressemble à personne. On a fait notre truc, et on s’amuse bien avec !
Votre concert de vendredi célèbre les 30 ans de Diddeleng Hëlleft, association qui soutient des projets de développement dans des régions défavorisées du monde. Quels sont vos liens avec elle ?
Dream Catcher est un groupe de Dudelange, avec des musiciens de Dudelange ! On voulait souligner cet enracinement quand l’association nous a contactés pour fêter son trentième anniversaire. C’était une occasion unique d’injecter encore un peu plus de Dudelange dans l’histoire. Tous les bénéfices de la billetterie lui seront reversés.
Après deux années de célébrations et de transformations, qu’est-ce que va alors proposer 2025 ?
De nouvelles chansons, car les premières idées sont là ! Des concerts aussi, et une petite tournée en France, en Allemagne et au Luxembourg. Après, un nouvel album ou pas, on verra. Je ne veux plus me stresser pour ça !
Dream Catcher & The Big Gang Theory
«Liv/f/e in an Empty Space release»
Vendredi à partir de 20 h.
Opderschmelz – Dudelange.