Les députés, dans leur grande majorité, sont opposés au retour des contrôles aux frontières. Ils voient un danger planer sur l’accord historique qui va fêter ses 40 ans. Le gouvernement promet d’agir.
Seul l’ADR, sans grande surprise, a voté contre une motion présentée hier à la Chambre des députés pour défendre la libre circulation symbolisée par l’accord de Schengen. Un débat initié par le groupe socialiste l’avait précédé, au cours duquel l’ensemble des interlocuteurs, à l’exception de Tom Weidig (ADR), ont critiqué le retour des contrôles aux frontières décidés par plusieurs pays signataires, dont l’Allemagne et la France.
«Schengen est en danger», a introduit Yves Cruchten, le ton grave. Il décrit une dégradation des termes de l’accord depuis une dizaine d’années pour des motifs divers ayant conduit à la réintroduction de 400 contrôles douaniers. Un pays de l’espace Schengen peut à titre exceptionnel réintroduire les contrôles aux frontières, au départ pour une période maximale de 30 jours, si la politique publique ou la sécurité intérieure est gravement menacée. Il en informe les autres pays de l’espace Schengen, le Parlement européen, la Commission européenne et le public.
L’actualisation des règles vise à faire en sorte que la réintroduction des contrôles aux frontières intérieures demeure une mesure de dernier recours. Actuellement, tout État membre qui décide de réintroduire des contrôles doit évaluer le caractère adéquat de cette réintroduction et son incidence probable sur la libre circulation des personnes, comme l’indique la Commission européenne. En application des nouvelles règles édictées en 2021, il devra en outre évaluer l’impact sur les régions frontalières. Par ailleurs, tout État membre envisageant de prolonger les contrôles en réaction à des menaces prévisibles devrait d’abord évaluer si d’autres mesures, telles que des contrôles de police ciblés et une coopération policière renforcée, pourraient être plus adéquates.
Une évaluation des risques devrait être fournie pour ce qui concerne les prolongations de plus de 6 mois. Lorsque des contrôles intérieurs auront été rétablis depuis 18 mois, la Commission devra émettre un avis sur leur caractère proportionné et sur leur nécessité. Dans tous les cas, les contrôles temporaires aux frontières ne devraient pas excéder une durée totale de 2 ans, sauf dans des circonstances très particulières.
«Faire plaisir à l’extrême droite»
«Il y a eu des situations exceptionnelles, telles que la pandémie, les vagues migratoires», rappelle Yves Cruchten, pour qui ces motifs ne sont pas acceptables. «Il faut surtout savoir que si les contrôles intérieurs devaient être remis en place, cela coûterait 18 milliards d’euros par an!», chiffre-t-il. «Que se cache-t-il derrière ces contrôles, la peur des réfugiés?», questionne Yves Cruchten.
Stéphanie Weydert, pour le CSV, invite aussi à défendre «le plus grand succès de l’Europe», qui est en danger. Elle estime que les raisons qui poussent les pays à remettre des contrôles «ne sont plus exceptionnelles» en lançant un appel au gouvernement pour défendre cet acquis, en espérant fêter les 40 ans de l’accord prévu l’année prochaine.
Le libéral Gusty Graas, estime qu’il y a «d’autres moyens de lutter contre la migration illégale que de fermer des frontières», d’autant que si les contrôles devaient s’intensifier, cela mettrait l’économie du pays en danger avec ses 200 000 frontaliers. «Le DP est clairement contre les contrôles aux frontières», dit-il.
Les verts ont cosigné la motion présentée par le groupe socialiste et Meris Sehovic rejoint en tous points les arguments développés par ses prédécesseurs. La même position est défendue par Sven Clement (Parti pirate) alors que Marc Baum (déi Lénk) est exaspéré de voir que ces fermetures ne sont «qu’une réaction irrationnelle des gouvernements à la montée des partis d’extrême droite», ajoutant «qu’on ne combat pas l’extrême droite en lui faisant plaisir et en s’essayant avec elle à table».
Le ministre des Affaires intérieures, Léon Gloden, rassure les députés en leur promettant que le gouvernement s’engagera à sauver Schengen. Exactement ce que demande la motion, pour laquelle 55 députés ont voté favorablement.
La Palestine attendra…
En revanche, une motion introduite par déi Lénk lors d’un débat sur la reconnaissance de l’État palestinien n’a pas eu le même succès. Il est encore trop tôt pour prendre une telle décision alors qu’aucun plan de paix n’est encore sur la table. Une telle reconnaissance ne ferait pas avancer le processus de paix, estime la majorité des députés. Seuls les verts ont soutenu la motion de déi Lénk. Une autre motion déposée par les libéraux, et demandant la poursuite des efforts en vue d’une paix juste, a été acceptée par la majorité.