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[Cinéma] Emmanuel Mouret : «L’amour, ça va, ça vient !»


(Photo : Capture écran Youtube)

Avec Trois Amies, Emmanuel Mouret entraîne des quadragénaires dans une ronde sentimentale, dont l’actrice Camille Cottin. Tous deux racontent cette comédie dramatique, où l’amour et l’amitié sont mis à rude épreuve.

Le roi du marivaudage à l’écran : Emmanuel Mouret, le réalisateur d’Un baiser s’il vous plaît (2007), Mademoiselle de Joncquières (2018) ou Les Choses qu’on dit, les choses qu’on fait (2020), revient avec Trois Amies, film qui conjugue amour et amitié. Ce chroniqueur inlassable du sentiment amoureux réunit une nouvelle fois un ambitieux casting, autour d’un trio de Lyonnaises ordinaires jouées par Sara Forestier, India Hair et la très demandée Camille Cottin. Cette dernière, et le réalisateur décryptent leur collaboration pour cette comédie libre et délicate.

Comment résumeriez-vous la trame de ce film?

Emmanuel Mouret : C’est le destin de trois amies dont l’amitié, finalement, ne bouge pas durant tout le temps du film, mais dont les destins amoureux et familiaux sont mouvementés (…) Car l’amour, ça va, ça vient! Ces trois-là ont des conceptions, de l’amour et de l’honnêteté très différentes, mais qui me semblent tout à fait concevables, valables ou honnêtes, d’une certaine manière, pour l’une comme pour l’autre (…) En tant que spectateur, j’aime être pris par différentes couleurs de récits et passer de l’un à l’autre, c’est ainsi que la pensée est stimulée, en comparant les histoires entre elles, en les soupesant.

Comment être honnête avec soi-même sans blesser l’autre?

Arriveriez-vous à le définir simplement?

E. M. : Trois Amies est pour moi une comédie dramatique dans le sens où le tragique et le comique y sont entrelacés tout du long. Et le film pose cette question : comment être honnête avec soi-même sans blesser l’autre?

Et vous, comment présenteriez-vous votre personnage?

Camille Cottin : Sandrine, c’est un personnage plein de certitudes et qui va faire exactement le contraire de ce qu’elle clame. Elle est presque à la limite de donner des leçons au début, elle se pose comme quelqu’un qui a tout compris. Et, finalement, elle va faire exactement le contraire et va se laisser surprendre par Cupidon, alors qu’elle pensait qu’elle l’avait sagement enclos quelque part…

Pourquoi avoir choisi trois femmes plutôt que trois hommes?

E. M. : Peut-être que, pour un auteur masculin, il y a paradoxalement moins de pudeur, et je n’ai pas l’impression d’être le seul à s’exprimer à travers les personnages féminins. Donc, oui, ce sont des personnages féminins mais qui auraient pu être masculins d’une certaine manière.

Les femmes ont-elles enfin obtenu une juste représentation devant la caméra?

C. C. : Sigourney Weaver, qui a reçu un Lion d’or d’honneur à Venise, a été l’une des pionnières. C’était dans les années 1990. C’est en train de changer… Le fait qu’il y ait de plus en plus de réalisatrices aussi permet d’avoir plus de films qui sont portés par des rôles féminins parce que ça les intéresse aussi d’explorer ce point de vue. Donc, oui, je pense qu’il y a un vrai changement à cet endroit-là.

Au point de vouloir vous-même passer derrière la caméra?

C. C. : En tout cas, je peux vraiment percevoir à quel point ça doit être enrichissant et passionnant de réaliser un film. Aujourd’hui, je ne m’en sens pas capable mais peut-être plus tard. J’aime bien les fresques parce qu’on revisite un peu l’Histoire. On va revisiter les vies de peintres, de journalistes, de femmes qui ont laissé une empreinte et dont on n’a absolument pas parlé.

Le directeur de la Mostra de Venise, Alberto Barbera, où votre film était présenté, vous a comparé à Éric Rohmer et Woody Allen. Qu’en pensez-vous?

E. M. : Ce sont deux cinéastes qui, pour moi, jouent un rôle très important (…) Ce sont des réalisateurs majeurs qui, quelque part, m’aident quasi quotidiennement pour des raisons un peu différentes l’un et l’autre, dans l’écriture et la pensée du cinéma. Donc, évidemment, deux cinéastes, comme bien d’autres aussi, qui sont obsédés par les questions autour du couple, du désir, du sentiment et de la morale.

Vous qui avez désormais une carrière américaine, comment définiriez-vous la spécificité du cinéma français?

C. C. : C’est difficile de répondre à cette question parce que je trouve qu’il y a des réalisateurs français qui sont tellement incomparables. On ne peut pas comparer Robin Campillo et Emmanuel Mouret, on ne peut pas comparer Julia Ducournau et Christophe Honoré (…) Après, je pense que le cinéma français est moins friand de compositions. Là où les Anglo-Saxons prennent volontiers 20 kilos, portent des perruques… Oui, il y a un vrai plaisir de transformer, c’est-à-dire de prendre les acteurs et de les amener complètement ailleurs. Et moi, j’aime beaucoup ça!

Trois Amies
d’Emmanuel Mouret.