La moitié des musulmans vivant dans l’UE disent subir des discriminations au quotidien, selon un rapport publié ce jeudi 24 octobre, une situation qui s’est fortement aggravée, y compris au Luxembourg.
Il est «de plus en plus difficile d’être musulman dans l’Union européenne», a déclaré la porte-parole de l’Agence européenne des droits fondamentaux (FRA), Nicole Romain, au moment de la parution de son étude, ce jeudi. Les données collectées regroupent les réponses de 9 600 personnes, interrogées entre octobre 2021 et octobre 2022 dans 13 pays de l’UE, dont le Luxembourg.
Et le constat est sans appel : près d’une personne musulmane sur deux s’est dite confrontée au racisme dans sa vie quotidienne, comparé à 39 % en 2016 quand la précédente étude a été réalisée.
L’Autriche (71 %) et l’Allemagne (68 %) sont les deux pays où les musulmans se plaignent le plus d’être victimes de racisme. La France se situe à 39 %, l’Espagne et la Suède affichant les meilleurs résultats.
Au Luxembourg, ce sont près de 60 % (!) des musulmans qui disent avoir été confrontés au racisme ces cinq dernières années, et 50 % au cours des 12 mois précédant l’étude. Un chiffre particulièrement important, qui classe le pays dans la liste des pires élèves de l’UE.
La couleur de peau particulièrement visée
Dans le détail, c’est surtout sur le marché de l’emploi et lors de la recherche d’un logement que l’étude fait part d’une «montée en flèche» du racisme. Au Grand-Duché, 26 % des répondants affirment avoir subi une discrimination au moment d’acheter ou louer un logement, les femmes portant des vêtements religieux étant plus exposées que celles n’en portant pas et que les hommes.
D’après cette étude, «les musulmans sont pris pour cible non seulement en raison de leur religion, mais aussi en raison de la couleur de leur peau et de leur origine ethnique ou immigrée».
La couleur de peau reste d’ailleurs le facteur de racisme numéro 1 au Luxembourg, affirme le document. Les sondés sont en effet tous originaires de pays situés au sud du Sahara : «par conséquent, la couleur de peau est le motif de discrimination le plus courant dans ces pays, affectant 52 % des musulmans au Luxembourg», souligne le document de 154 pages.
Et les chiffres ne s’arrêtent pas là : 28 % des musulmans luxembourgeois interrogés ont subi du racisme ces douze derniers mois lors d’un rendez-vous médical. 40 % des ménages musulmans affirment également vivre dans de mauvaises conditions, avec des toits qui fuient, des murs moisis ou encore des fenêtres ou sols pourris… Plus de la moitié des musulmans du Luxembourg estiment aussi que leur dernière interpellation par la police était due à un profilage racial.
Plus d’un tiers (35 %) indiquent avoir été insultés et 5 % ont confié avoir été victimes de violence.
Une normalisation inquiétante
Devant ces conclusions «préoccupantes», la FRA recommande à l’UE de se concentrer sur le racisme contre les musulmans, «aggravé» selon sa présidente Sirpa Rautio «par la rhétorique déshumanisante que l’on observe sur tout le continent».
«L’un des aspects les plus alarmants est la fréquence de ces phénomènes» racistes «dans nos rues, dans les écoles et au travail», qui sont «aujourd’hui presque normalisés» et «ne peuvent qu’affaiblir le sentiment de sécurité et d’appartenance».
Les musulmans représentent le deuxième groupe religieux de l’UE et sont 26 millions à y vivre selon les estimations les plus récentes du Pew Research Center, qui datent de 2016, soit 5 % de la population totale. La plupart résident en France et en Allemagne. Ce nombre a «considérablement augmenté ces dernières années en raison des personnes fuyant les conflits en Afghanistan, en Irak et en Syrie», souligne le rapport.
Au Luxembourg, près de 3 % de la population luxembourgeoise pratique le culte musulman.