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Trois Anonymous devant le tribunal à Nancy


Trois militants des Anonymous comparaissent lundi à Nancy pour des attaques informatiques qui ont bloqué plusieurs sites institutionnels, dont celui du ministère de la Défense. (Photo : AFP)

Ils voulaient manifester «d’une nouvelle façon, exercer une pression citoyenne»: trois militants des Anonymous comparaissent lundi à Nancy pour des attaques informatiques qui ont bloqué plusieurs sites institutionnels, dont celui du ministère de la Défense.

Plus d’une centaine de personnes, certaines portant le masque de Guy Fawkes, devenu le symbole planétaire des Anonymous, se sont rassemblées dès 09h00 du matin devant le TGI de Nancy (Meurthe-et-Moselle) pour soutenir les trois prévenus.

Dans une salle d’audience pleine à craquer, où certains se sont assis par terre, Loïc Schneider, 20 ans, David Druart, 41 ans, et Cédric Sibille, 36 ans (absent lundi) comparaissaient pour des attaques informatiques contre le site de l’Agence nationale de gestion des déchets radioactifs (Andra), ceux du conseil régional de Lorraine, du conseil général de la Meuse, et celui du ministère de la Défense.

Aux faits qui leur sont reprochés – «accès frauduleux dans un système de traitement informatisé de données», «suppression de données résultant d’un accès frauduleux à un système de traitement automatisé de données» et «entrave au fonctionnement d’un système de traitement de données», est ajoutée la circonstance aggravante qu’ils ont été commis en bande organisée.

L’attaque du ministère avait été revendiquée pour «venger» la mort, le 26 octobre 2014, du militant écologiste Rémi Fraisse, opposé au barrage de Sivens.

Les autres, commises dans le cadre de l’opération des Anonymous contre «les Grands Projets Inutiles et Imposés» (GPII), visaient le projet de l’Andra d’un site d’enfouissement des déchets nucléaires à Bure (Meuse).

«Pour moi, GPII est une démarche citoyenne. Le but n’était pas de détruire un site internet ni de faire des dégâts mais simplement de manifester en rendant le site inaccessible», a déclaré à la barre David Druart. «C’est une nouvelle façon de manifester, d’exercer une pression citoyenne.»

«Sisyphe, David et Goliath»

Selon l’avocat de Loïc Schneider, Me Etienne Ambroselli, les sites attaqués sont des «sites vitrines destinés à l’information du public» et ne contenaient pas de données confidentielles.

«Ces attaques, il faut vraiment les relativiser, elles ne sont pas si incroyables que ça», a réagi Loïc Schneider. «Ce n’est pas du piratage, c’est une action de contestation comparable en DDOS (déni de service, ndlr) à une manifestation, un blocus d’université.»

Le «déni de service» consiste à saturer des serveurs de requêtes pour les rendre inaccessibles au public. «François Hollande, quand il était député de Corrèze, était fermement opposé à l’enfouissement dans sa région», a ajouté Loïc Schneider.

«Ce combat, c’est Sisyphe, David et Goliath, un combat très difficile, l’enjeu est énorme», a déclaré Me Ambroselli. Son client, comme les autres, risquent 10 ans de prison et 150 000 euros d’amende.

Selon l’avocat, «il y a une disproportion» entre les poursuites engagées «et la réalité de l’attaque. Cela ouvre le champ aux discussions. Est-ce politique? Pour museler la parole? On peut se poser la question», a dit Me Stéphane Vallée, l’avocat de Cédric Sibille – son client nie les faits qui lui sont reprochés.

Pour l’Andra, qui demande un euro de dommages et intérêts et 1 500 euros par prévenu au titre des frais de justice, «on a dépassé la ligne jaune», a expliqué l’avocat Marc D’Haultfoeuille.

«Si à chaque fois qu’on est contre un projet on se met à attaquer les sites internet des organisations qui le portent, là, c’est un acte illégal», a ajouté l’avocat, qui assure aussi la défense du Conseil régional et du Conseil général.

Pour la défense de Loïc Schneider, il s’agit là tout simplement d’un «moyen moderne de militantisme», qui n’a causé «aucun dommage».

«Il faut relativiser. Il s’agit d’une toute petite attaque, et elle est mise au même niveau que (Edward) Snowden. On est loin d’être dans le même cas. Les infractions n’ont rien de comparable» avec les révélations du lanceur d’alerte américain et leurs conséquences, a encore plaidé Me Ambroselli.

AFP/M.R.