Les efforts des Occidentaux pour freiner les exportations chinoises de véhicules électriques sont compliqués par l’ascension fulgurante de la Chine dans ce secteur et pourraient même aller à l’encontre de la lutte contre le changement climatique, avertissent des analystes.
Les Etats membres de l’Union européenne (UE) doivent confirmer lors d’un vote vendredi l’imposition de droits de douane sur les voitures électriques importées de Chine, pour tenter de protéger leur industrie contre cette concurrence à bas prix. Les Etats-Unis aussi ont cherché à empêcher les voitures électriques chinoises d’inonder leur marché, afin de sauvegarder leurs géants de l’automobile de protéger les emplois.
Les Occidentaux s’inquiètent depuis longtemps des risques de « surcapacité » chinoise, alimentés par de généreuses subventions et une baisse de la consommation en Chine.
Mais au vu des objectifs climatiques ambitieux des Occidentaux, le soutien à leur propre industrie automobile pourrait être contre-productif, soulignent des experts. « Il n’y a aucune chance que l’UE et les Etats-Unis atteignent leurs objectifs climatiques dans les délais qu’ils ont initialement fixés sans l’aide des véhicules électriques chinois », indique à l’AFP Tu Le, directeur général de Sino Auto Insights. « Ils devront soit adapter leurs objectifs, soit autoriser l’entrée, au moins partielle, des véhicules électriques chinois. »
La Chine a longtemps été à la traîne dans l’automobile et les énergies bas carbone devant endiguer la production de gaz à effet de serre, dont elle reste le premier pays émetteur. Mais ses vastes efforts ont permis un grand bond en avant de la production de véhicules électriques.
Pékin a consacré au total 230 milliards de dollars à ce secteur de 2009 à 2023, selon une étude du Centre d’études internationales et stratégiques (CSIS) de Washington.
Grandes ambitions à l’étranger
En 2023, plus de la moitié des véhicules électriques vendus dans le monde étaient fabriqués par des groupes chinois, selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE). Si 69% des véhicules vendus sur la planète en décembre l’ont été en Chine, selon le cabinet Rystad Energy, les géants chinois ne cachent pas leurs grandes ambitions à l’étranger.
BYD a dit vouloir se hisser parmi les cinq premiers constructeurs automobiles en Europe et a prévu d’ouvrir des usines en Hongrie et en Turquie. Les analystes de la société de conseil AlixPartners estiment que les constructeurs chinois conquerront 33% du marché mondial de l’automobile d’ici 2030.
Washington a annoncé en juillet des subventions de 1,7 milliard de dollars pour aider les constructeurs nationaux face au défi de l’électrique. Le « Inflation Reduction Act », grand plan américain pour la transition énergétique de 2022, a permis en outre d’injecter quelque 370 milliards de dollars de subventions pour la transition énergétique, dont des allègements fiscaux pour les véhicules électriques et les batteries fabriqués aux Etats-Unis.
Mais la croissance rapide de la concurrence chinoise a sonné l’alerte à Washington et à Bruxelles. « La crainte est suscitée par les parts de marché gagnées rapidement par ces entreprises », explique à l’AFP Ilaria Mazzocco, du groupe de réflexion CSIS. « Il y a une pression pour l’électrification – et ils ont les meilleurs véhicules électriques, les moins chers. »
« Drapeau blanc »
Les analystes estiment que l’Union européenne ne peut pas adopter une position aussi dure que celle des Etats-Unis, qui ont accusé Pékin de tricher et imposé des droits de douane de 100% sur les véhicules électriques de Chine.
« Les constructeurs automobiles allemands dépendent fortement du marché chinois pour leurs bénéfices », souligne M. Tu de Sino Auto Insights. « Les deux plus grands constructeurs automobiles européens (Stellantis et Volkswagen) ont maintenant des participations significatives dans les marques chinoises de véhicules électriques (…) il est dans leur intérêt que ces entreprises réussissent », a-t-il ajouté.
Ces entreprises « ont déjà brandi le drapeau blanc et décidé qu’elles ne pouvaient pas rivaliser et préféraient s’associer ». Cette question est également compliquée par les efforts mondiaux de lutte pour réduire les émissions.
La lutte contre le changement climatique nécessite d’accélérer la transition énergétique, y compris dans l’automobile. Le « Pacte vert » adopté par la Commission européenne comprend des mesures telles que l’interdiction à la vente de voitures thermiques neuves en 2035. Mais sans l’arrivée massive de véhicules électriques sur les routes européennes, cet objectif sera difficile à atteindre.
Si les efforts de l’UE « visent à protéger les industries locales et à garantir une concurrence loyale, ils pourraient involontairement limiter la disponibilité et l’accessibilité financière des véhicules électriques », avertit MingYii Lai, de Daxue Consulting. Ce qui « pourrait ralentir la transition vers les véhicules électriques, essentielle pour lutter contre le changement climatique ».
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