Accueil | Editoriaux | Les Vingt-Sept patinent

Les Vingt-Sept patinent

Le risque qui pèse sur l’espace Schengen en raison de la tendance de grands États comme l’Allemagne à refermer partiellement leurs frontières (lire notre édition d’hier) n’est pas le seul défi majeur qui se pose à l’UE. Selon Mario Draghi, l’ancien président de la Banque centrale européenne (BCE), l’Europe subit un décrochage économique par rapport aux États-Unis et accroît sa dépendance envers la Chine. Il recommande notamment l’émission de nouvelles dettes communes pour mieux financer l’innovation, la transition verte et la défense. Entre 700 et 800 milliards d’euros devraient être mobilisés annuellement, faute de quoi l’UE «doit réellement craindre pour sa survie».

Rien que ces deux enjeux démontrent le besoin crucial de former une nouvelle Commission européenne forte et appuyée par une large majorité, à la fois parmi les chefs d’État et de gouvernement et au sein du Parlement européen. La composition de la nouvelle équipe de commissaires, emmenée par Ursula von der Leyen, s’avère cependant très épineuse. Pour commencer, la parité, pourtant réclamée par la présidente, ne sera pas atteinte. Le collège de commissaires ne devrait compter qu’une dizaine de femmes parmi ses 27 membres. La faute revient au non-respect par les États membres de la préconisation de proposer à la fois un candidat et une candidate. À cette première polémique s’ajoute un déséquilibre dans la répartition des postes clés. Les sociaux-démocrates réclament davantage de concessions de la part du Parti populaire européen (PPE) dont est issue la cheffe de l’exécutif européen. Une des revendications est de confier à Nicolas Schmit un portefeuille à haute responsabilité. Pour l’instant, la tête de liste du Parti socialiste européen aux élections du 9 juin reste cependant hors course. En cause, la décision du gouvernement luxembourgeois de donner la priorité à Christophe Hansen (CSV) et non pas au commissaire socialiste sortant. Ce choix pourrait contribuer à remettre en question le soutien du Parlement européen à la nouvelle Commission.

Il reste moins d’une semaine à Ursula von der Leyen pour aplanir les différends. Le Luxembourg devra-t-il faire marche arrière? En tout cas, les Vingt-Sept patinent à l’aube d’années décisives pour l’UE.