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Décharges luxembourgeoises : quels impacts pour la Moselle ?


La Moselle concentre un quart des décharges du Grand-Est. Malgré cette surcapacité, elle abrite encore quelques décharges illégales. (Photo Pierre Heckler)

Le Luxembourg dispose de capacités limitées pour stocker ses déchets du BTP. Face au risque de saturation de ses décharges, le pays est parvenu à les doubler entre 2022 et 2024. Peut-il y avoir un impact en Moselle, qui importe chaque année 2 millions de tonnes de déchets luxembourgeois ?

En 2022, le Grand-Duché exportait encore plus de 2 millions de tonnes de déchets inertes (issus du BTP) vers la France. En volume, le pays concentre à lui seul 40 % des importations françaises.

Si le Luxembourg est contraint d’exporter autant ses déchets, c’est parce que ses décharges arrivent à saturation. En 2020, le gouvernement envisageait le point de rupture à l’horizon 2035, pour ses neuf décharges alors en activité.

Depuis, la situation a évolué. Entre 2020 et 2022, elle s’est d’abord dégradée. Les décharges ont continué à se remplir à un rythme effréné. Le Luxembourg excave 7 millions à 8 millions de tonnes de terre chaque année, soit plus de 30 000 tonnes par jour ouvrable. Il y a deux ans, 140 camions avaient été comptabilisés à l’entrée de la décharge de Colmar-Berg, dans le centre du pays.

Une aubaine économique en Moselle

Pressé par l’urgence, le gouvernement grand-ducal a pris des dispositions dès la fin 2021 pour accélérer la recherche de terrains susceptibles d’accueillir de nouvelles décharges. Selon le Groupement des entrepreneurs et la Fédération des entreprises de construction et de génie civil luxembourgeois, huit nouveaux sites étaient nécessaires pour absorber la production de gravats.

Malgré la simplification des procédures, les obstacles pour ouvrir une décharge restent nombreux et une seule a ouvert après 2022, sur le crassier de Differdange (6 millions de mètres cubes). Néanmoins, le remblayage d’une carrière à Rinnen (5,5 millions de mètres cubes) et à Altwies (17 millions de mètres cubes), a permis de doubler la capacité totale du pays, passée de 24 millions de tonnes à plus de 50 millions de tonnes fin 2023.

La tentation des décharges illégales

Ce phénomène peut-il avoir un impact en France et notamment en Moselle, qui concentre un quart des décharges du Grand-Est ? Dans le département, six installations ont ouvert entre 2014 et 2020. Les investisseurs avaient eu le nez fin en facturant les gravats à prix d’or. Mais depuis 2021, il n’y a eu aucun projet d’ouverture de nouveau site d’enfouissement. Quant aux décharges illégales, il en subsiste quelques-unes dans le département, mais le renforcement des contrôles à la frontière et les coups de filet ont réduit la tentation du trafic international.

Reste le cas délicat des déchets dangereux. Le Grand-Duché ne dispose d’aucune décharge capable de les absorber. Le Grand-Est en compte deux : en Meurthe-et-Moselle et en Meuse. Les importations devraient se poursuivre plusieurs années.

Concernant les déchets inertes, la situation reste fragile : sur les 14 décharges luxembourgeoises en activité, quatre pourraient arriver à saturation dans les cinq ans.

Damien Golini