Les Jeux olympiques de Paris sont lancés : après une parade sur la Seine, aussi pluvieuse qu’inédite, parfois déjantée, ils ont été ouverts vendredi soir face à la Tour Eiffel par Emmanuel Macron.
« Je proclame ouverts les Jeux de Paris célébrant la XXXIIIe olympiade des temps modernes », a déclaré selon la formule rituelle le président français sur l’esplanade du Trocadéro, aux côtés du patron du Comité international olympique (CIO), Thomas Bach, et devant 85 chefs d’État et de gouvernement, qui ont supporté stoïquement le déluge.
En sortant pour la première fois le défilé des athlètes et la cérémonie d’ouverture d’un stade, les organisateurs avaient l’ambition de casser les codes, de réinventer le genre d’un exercice qui pouvait paraître poussiéreux, tout en respectant le rituel olympique jusqu’à l’allumage final de la flamme prévu en fin de soirée dans le jardin des Tuileries.
Le metteur en scène Thomas Jolly, a bâti un spectacle en immersion dans la Ville-Lumière dont il a fait une scène globale.
Dans un mélange d’images enregistrées et de douze tableaux le long de la Seine, il a convoqué l’histoire de France, parfois violente comme est venue le rappeler une Marie-Antoinette tenant sa tête ensanglantée, ses écrivains comme Victor Hugo, ses artistes, Serge Gainsbourg, Jacques Tati ou Georges Bizet, ses sportifs comme Zinédine Zidane.
Communauté LGBT+ en lumière
Mais il entendait aussi célébrer la modernité, la diversité, le respect de la différence et l’inclusivité.
La communauté LGBT+ a été mise en lumière, avec le baiser de deux hommes ou une Cène jouée par des drag queens, au gré de douze tableaux animés par 2.000 artistes.
Ils ont été rythmés par les voix de l’Américaine Lady Gaga et de la Franco-Malienne Aya Nakamura accompagnée de la Garde Républicaine, par les notes de Sofiane Pamart, pianiste virtuose préféré des rappeurs français qui accompagnait cette fois la chanteuse Juliette Armanet, et celles des guitares brutales du groupe de métal français Gojira.
Philippe Katerine, extra-terrestre de la chanson française, coutumier des excentricités et des provocations, n’est pas passé inaperçu, apparaissant en Dionysos, le corps peint en bleu pailleté de doré, pour chanter son morceau « Nu ».
Des femmes dont l’apport historique a souvent été occulté, ont été mises à l’honneur, avec des statues appelées à rester dans les rues de Paris: les héroïnes du droit à l’avortement Simone Veil et Gisèle Halimi, la révolutionnaire guillotinée Olympe de Gouges, la Communarde exilée Louise Michel, ou encore la pionnière du sport féminin Alice Milliat, tant méprisée par le père de l’olympisme moderne Pierre de Coubertin.
« Les prestations sont époustouflantes, j’aurais juste aimé qu’il ne pleuve pas », dit Said Pauline Brett, 69 ans, venue de Chicago, avec son mari et sa fille. « Le spectacle est fantastique. Juste un peu humidifiée par la météo… », s’amuse Mike Smith, 57 ans, un consultant. « Mais nous sommes britanniques, nous sommes habitués. »
La pluie battante s’invite
Beaucoup n’ont pas eu ce flegme. Les secteurs hauts des berges, réservés aux 220 000 invités (pour 100 000 payants), sont souvent apparus clairsemés et beaucoup ont déserté avant la fin. Sitôt passé le bateau français, le dernier des 205 délégations, les spectateurs ont souvent jeté l’éponge, comme Brahim, 19 ans : « Je vais essayer d’arriver à temps pour regarder la fin à la télé. »
Selon les organisateurs, 6 800 sportifs étaient prévus sur les 85 embarcations. Ceux qui sont venus ont conservé leur enthousiasme, souvent protégés par des capes, saluant les berges et profitant d’un lent travelling de six kilomètres, au pied des monuments les plus emblématiques de Paris: Notre-Dame et sa flèche restaurée après l’incendie de 2019, le Louvre, les Tuileries, la Concorde, le Grand-Palais puis la Tour d’Eiffel.
Sur les lieux mêmes où, dans ces Jeux qui se targuent d’être les premiers paritaires de l’histoire, certains tenteront dès samedi de décrocher l’or : des épreuves comme le tir à l’arc, le beach-volley ou l’escrime, seront organisées sur ces sites de cartes postales.
Pendant deux semaines, jusqu’au 11 août, les légendes du sport mondial, Simone Biles, Sha’Carri Richardson, Eliud Kipchoge ou Léon Marchand, vont écrire l’histoire olympique dans la ville qui attendait d’organiser des Jeux depuis 1924, quand Johnny Weissmuller y avait été sacré roi de la natation.
Cette odyssée s’est faite sans la trentaine de Russes et de Biélorusses autorisés à participer à titre individuel, sous bannière neutre, mais privés de parade en raison de l’invasion de l’Ukraine.
Défi sécuritaire
Hors norme, ce pari artistique était aussi sécuritaire et logistique, préparé depuis quatre ans.
Jamais autant de forces de l’ordre n’avaient été mobilisées en France, avec 45 000 policiers et gendarmes déployés, et 10 000 militaires.
Depuis plusieurs jours, l’hypercentre de Paris est bouclé, accessible seulement à qui dispose de son sésame, accréditation ou QR Code. Avant la cérémonie, certains ont dû prendre leur mal en patience aux points de contrôle, de longues queues s’étirant alors que l’agacement transparaissait parfois.
Outre la pluie, les autorités françaises ont dû gérer le sabotage organisé de leur réseau ferroviaire: dans plusieurs régions, des infrastructures de la SNCF ont été la cible de dégradations, notamment des incendies volontaires.
La Société nationale a dénoncé « une attaque massive pour paralyser le réseau ». Les auteurs et les commanditaires de cette attaque ne sont pas connus pour le moment.
Difficile de faire plus abject.
Alors que les monuments qui bordent la Seine étaient une invitation à faire ressortir la grandeur passée de la France avec ses personnages fameux, comme Rabelais, Louis XIII, Montaigne, Mazarin -(devant l’Institut de France) ou les fameux visiteurs comme Alexandre III qui donne son nom à l’un des ponts de Paris, nous avons eu ce qu’il y a de plus vil, de plus woke.
La France en pleine décomposition.