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Mauvaise publicité pour les notaires


Les transactions immobilières avec des clients azerbaïdjanais portaient sur des magasins et des bureaux situés au Forum Royal, à Luxembourg.  (photo archives LQ)

La condamnation de la présidente de la Chambre des notaires, qui a rendu son mandat depuis, fait désordre dans la profession, tenue à des obligations en termes de lutte contre le blanchiment.

La présidente de la Chambre des notaires, Martine Schaeffer, a été poussée vers la sortie à la suite de sa condamnation à 70 000 euros d’amende, le 2 mai dernier, pour violation de ses obligations professionnelles en matière de lutte contre le blanchiment et se retrouve sous le coup d’une procédure disciplinaire, selon la ministre de la Justice, Elisabeth Margue. À la suite de l’assemblée générale annuelle de la Chambre des notaires, c’est Edouard Delosch qui a repris le mandat de président.

L’affaire révélée par Reporter.lu avait suscité l’intérêt des députés Sam Tanson (déi gréng) et Franz Fayot (LSAP), tous deux avocats, qui s’étaient empressés d’interroger la ministre de la Justice sur les suites à réserver à cette condamnation, alors que la notaire, en aveu, avait négocié un accord transactionnel avec le procureur d’État, validé par la chambre correctionnelle. Elle était poursuivie pour avoir négligé ses obligations légales lors de transactions immobilières avec des ressortissants d’Azerbaïdjan.

«Les affaires en question sont relatives à des faits datant de 2017», rappelle la ministre de la Justice, précisant que «le cadre légal en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme est en constante évolution». Dans ce contexte, le ministère affirme avoir des contacts réguliers avec la Chambre des notaires qui est également membre du comité de prévention blanchiment, présidé par le ministère de la Justice.

«Prenant en compte l’évolution rapide des textes légaux et leur application, la Chambre des notaires est dans un processus continu d’adaptation et d’amélioration des procédures», informe la ministre Elisabeth Margue. Elle insiste sur le fait que les notaires «se sont dotés de procédures internes robustes», relatives à la prévention du blanchiment et du financement du terrorisme, «ce que le Groupe d’action financière (GAFI) a pu effectivement constater lors de sa visite sur place», souligne-t-elle.

Le député Franz Fayot rappelle qu’une autre affaire du même type, relative à un manquement aux devoirs de diligence antiblanchiment par un notaire lors d’opérations immobilières, avait déjà été révélée. Il estime que ces affaires laissent entrevoir «des vulnérabilités» dans le dispositif contre le blanchiment d’argent sale au niveau du notariat.

«Le fait que la présidente de la Chambre des notaires soit en aveu dans un jugement sur accord revêt évidemment un caractère extrêmement problématique à cet égard», écrit le député socialiste dans sa question parlementaire. Il demande si les ministres comptent prendre des mesures pour s’assurer d’une mise en œuvre plus stricte des règles antiblanchiment au niveau du notariat et si oui, lesquelles.

Depuis 2017, date de l’affaire concernant la notaire Martine Schaeffer, «la situation a dès lors déjà évolué», et ne cessera de s’adapter, lui répond Elisabeth Margue.  Elle assure que «les actions recommandées par le GAFI dans son rapport d’évaluation sur le Luxembourg de septembre 2023 sont en cours de mise en œuvre».

L’enquête se poursuit

De son côté, la députée Sam Tanson (déi gréng) demande si une telle condamnation pourrait conduire à ne pas conférer le titre de notaire à un candidat. «Il est probable qu’une condamnation éventuelle d’un candidat-notaire ait une incidence sur les avis qui sont requis dans la procédure de nomination», lui répond la ministre. La nomination d’un candidat-notaire à un poste de notaire se fait après consultation du parquet général et de la Chambre des notaires.

La ministre est d’avis «qu’une clarification est à apporter dans le cadre de la réforme visant une modernisation du notariat». Selon Reporter.lu, la justice luxembourgeoise enquête encore sur des flux financiers en provenance de Russie, des îles Vierges britanniques et d’autres centres offshores qui ont été, entre autres, investis dans l’immobilier, à Merl, au centre-ville et à Esch-sur-Alzette. La Cellule de renseignement financier avait alerté, vainement, la notaire du risque de blanchiment dans l’immobilier.

La Chambre des notaires est composée de sept membres élus parmi les 36 notaires du pays par l’assemblée générale. Elle est tenue de maintenir la discipline entre les notaires et d’exercer le pouvoir disciplinaire par son conseil de discipline. Le conseil de discipline comprend le président du tribunal d’arrondissement de Luxembourg ou le juge qui le remplace, comme président, et quatre membres de la Chambre des notaires désignés d’après leur rang d’ancienneté dans la profession.

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