Avec cinq participations, le Giro, qui s’élance samedi, est le grand Tour auquel Laurent Didier, 39 ans et retiré des pelotons depuis octobre 2018, a le plus participé durant sa carrière professionnelle.
Votre plus belle victoire ?
Laurent Didier : Dans le Colorado. C’est mon étape de l’USA Pro Challenge (5e étape, entre Woodland Park et Breckenridge) en 2014. J’étais en échappée sous le mauvais temps. Des orages violents. L’hélicoptère ne pouvait pas transmettre d’images pour la télévision. C’est aussi sous la pluie que je suis devenu champion national (en 2012 à Tétange) et que j’ai remporté mon étape dans la Flèche du Sud (en 2005 à Bourscheid). Ce n’est pas que j’aimais bien la pluie, mais mon corps réagissait bien dans ces mauvaises conditions.
Votre plus grosse chute ?
Dans le Tour d’Italie 2017, je suis tombé dans une descente contre des glissières de sécurité (dans la 11e étape, entre Firenze et Bagno di Romagna). J’étais couvert d’hématomes. Je n’avais pas de fracture, mais je suis resté out pendant presque deux mois. C’est parfois pire de ne rien avoir de cassé. J’étais comme brisé de l’intérieur.
Laurent Didier a été coureur cycliste professionnel pendant neuf ans (Saxo Bank de 2010 à 2011, RadioShack de 2012 à 2014, puis Trek de 2014 à 2018). Il a disputé onze monuments (cinq Liège-Bastogne-Liège, cinq Tour de Lombardie et un Milan-San Remo), neuf Grands Tours (cinq Tour d’Italie, deux Vuelta et deux Tour). Reconnu pour ses qualités de coéquipier, il a remporté une étape de la Flèche du Sud et une étape de l’USA Pro Challenge. Le fils de Lucien Didier (ancien coéquipier de Bernard Hinault et Laurent Fignon dans les années 80) et petit-fils de Bim Diederich (vainqueur de trois étapes du Tour de France dans les années 50) a également remporté le titre de champion national de course en ligne en 2012 et en contre-la-montre en 2014.
Le coureur perdu de vue que vous aimeriez bien revoir ?
Donner un nom, c’est difficile. Mais ce serait bien de revoir toute une équipe avec qui on a couru en course. Les contacts s’arrêtent une fois la carrière terminée. Je n’ai plus de contacts avec les autres coureurs. Comme cela se produit dans certaines universités, ce serait bien de se revoir entre coéquipiers une dizaine d’années après la fin de notre carrière. Par contre, lorsque je suis allé voir mon fils disputer une course d’athlétisme à Rodange, j’ai croisé Ben Gastauer et Frank Schleck qui accompagnaient leurs enfants. C’est en se rendant dans des épreuves d’athlétisme qu’on se revoit (il rit).
Votre plus dure journée ?
Il y en a deux. La première, c’était dans le Tour d’Italie lorsque Alberto Contador (son leader) avait le maillot rose. J’ai roulé en tête de peloton dans une longue étape en montagne (15e étape, entre Conegliano et Gardeccia/Val di Fassa, 229 km) remportée par le Basque Mikel Nieve (vainqueur en 7 h 27′) avec près de 7 000 mètres de dénivelé! À la fin, ça me faisait un peu plus de huit heures de vélo. J’avais été lâché en milieu d’étape. Une galère. La deuxième, c’était dans la Vuelta. J’avais terminé dernier d’une étape et je m’étais retrouvé très proche de l’élimination, hors délai.
Entre Andy Schleck et Alberto Contador, qui ont été tour à tour mes leaders, je n’arrive pas à choisir
Votre meilleur vélo ?
Le Trek Emonda. J’ai été l’un des premiers à utiliser les freins à disque, mais personnellement, je préférais la version à patins.
Un transfert qui a failli se faire ?
Tout était prêt pour que je rejoigne Saxo Bank dès 2009, mais la perte d’un sponsor a fait que j’ai dû retarder d’un an mon entrée dans le professionnalisme.
Le coureur le plus fort avec qui vous avez couru ?
Entre Andy Schleck et Alberto Contador, qui ont été tour à tour mes leaders, je n’arrive pas à choisir. Il y a eu aussi (Lance) Armstrong, (Chris) Froome. (Fabian) Cancellara m’a aussi beaucoup impressionné.
Le Néerlandais Niki Terpstra n’était pas méchant en soi, mais il ne respectait pas les autres coureurs
Le plus méchant ?
Le Néerlandais Niki Terpstra n’était pas méchant en soi, mais il ne respectait pas les autres coureurs.
Le plus gentil ?
Ce n’est pas évident à dire quand tu parles de sport. Quelqu’un comme Richie Porte, qui a été l’un de mes coéquipiers, ou Julien Bernard. Je les trouvais très humains.
La plus grande course à vos yeux ?
La course en ligne des Jeux olympiques, car on ne la dispute pas chaque année. J’ai eu la chance de participer aux JO de Londres (64e). Pour moi, c’est la plus grande. Bon, je n’ai pas pu en profiter. Je sortais du Tour de Wallonie où j’avais remporté le maillot de meilleur grimpeur, puis je suis directement allé à Londres. Je me souviens d’ailleurs que j’avais dans mes bagages la coupe en forme de poule gagnée en Wallonie, que j’ai toujours à la maison d’ailleurs alors que je ne les ai pas collectionnées (il rit). Je n’avais pas eu le temps de la déposer à la maison. Et dans la foulée des JO, je partais directement en stage avant de disputer le Tour d’Espagne.
La course la plus dure du monde ?
J’en mets deux à égalité. Liège-Bastogne-Liège et le Tour de Lombardie, les deux monuments pour grimpeurs. Les courses par étapes, ça fait mal aussi, mais je mets ces deux classiques en premier.
L’anecdote que vous n’avez jamais racontée ?
Lors du Tour de France 2015, j’étais tombé dans la deuxième étape aux Pays-Bas et le soir, notre médecin d’équipe m’avait posé des points de suture. À côté de moi, il y avait le maillot jaune que venait d’endosser Fabian Cancellara, avec qui je partageais la chambre. Le lendemain, pour la 3e étape, c’était à son tour de chuter lourdement sur la route de Huy. C’est aussi ça le cyclisme…
Marié à Carole et père d’un garçon, Maxim, Laurent Didier (39 ans) est installé à Dippach. Ingénieur en génie civil, il travaille aux ponts et chaussées dans la division des ouvrages d’art. Il ne pratique plus beaucoup le cyclisme, hormis pour accompagner son fils lors de petites balades en VTT. Il aime aussi marcher en forêt et en famille !
Est-il le fils de Lucien Didier ?