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La Chambre des salariés alarmée par la pauvreté, pas par les finances


La priorité du gouvernement portée sur la lutte contre la pauvreté n’est que peu visible dans ce budget, selon l’analyse de la CSL. (Photo : fabrizio pizzolante)

La Chambre des salariés ne se fait pas de souci pour les finances publiques, d’autant que d’autres sources de recettes fiscales existent. En revanche, la pauvreté inquiète davantage.

En guise d’introduction, la Chambre des salariés tient à tempérer les craintes de ceux qui dépeignent une situation économique préoccupante pour le Luxembourg. Le PIB en volume dans une économie hautement tertiarisée comme celle du Grand-Duché ne reflète pas fidèlement la situation. Il suffit d’observer l’activité dans le secteur financier qui a chuté en volume, alors qu’en 2023, les établissements de crédit ont enregistré des bénéfices record. En incluant une analyse du PIB en valeur, la situation économique du Luxembourg semble moins tendue, relève la CSL.

La situation des finances publiques est saine et en dépit d’un déficit au niveau de l’administration centrale, «le budget courant de l’État reste largement excédentaire (équivalent à 1 % du PIB), démontrant que l’État n’éprouve aucune difficulté à financer ses dépenses récurrentes», note la Chambre des salariés. Le déficit est dû à un niveau d’investissement important, mais rien d’alarmant, d’autant que la dette publique se maintient autour de 27 % du PIB à moyen terme.

La situation des ménages inquiète

Dans son avis sur le projet de budget transitoire, la Chambre des salariés s’inquiète davantage de la situation des ménages. La levée du plafonnement des prix du gaz et de l’électricité et la fin des aides de l’État aux frais de réseau de gaz, laisse présager un choc inflationniste en 2025. «Face à une augmentation prévue de 17 % pour la facture du gaz et de 60 % pour celle de l’électricité, il est impératif de mettre en place des mesures transitoires pour atténuer ces effets», prévient la CSL.

L’avenir ne sera pas plus rose pour les personnes les plus vulnérables. La priorité du gouvernement portée sur la lutte contre la pauvreté n’est que peu visible dans ce budget, selon l’analyse de la CSL : «À aucun moment, il n’est question d’un plan national de grande envergure pour prémunir les résidents contre la paupérisation». Le gouvernement se contente du minimum, et les mesures jugées «peu ambitieuses», sont d’ores et déjà programmées et prévues légalement. Elles ont le mérite d’exister, mais elles ne font pas partie «d’un programme global» et «ne vont pas faire diminuer la pauvreté et améliorer la cohésion sociale du pays».

Sur les questions fiscales, il est dommage que le gouvernement préfère freiner les dépenses au lieu de chercher des nouvelles sources de recettes fiscales. Certes, les nouveaux produits assimilés aux tabacs seront soumis à des droits d’accise, mais les besoins en investissements et en correctifs sociaux sont tellement nombreux en cette phase de polycrise européenne qu’il est urgent de taxer le patrimoine, les revenus du capital ou encore les hauts revenus, comme le suggère la CSL.

Investissements inachevés

Le gouvernement entend renforcer les investissements publics qui dépasseraient les 4 milliards d’euros par an de 2025 à 2027, mais la CSL sait que les ambitions affichées en matière d’investissement sont rarement réalisées. Les exercices budgétaires précédents le démontrent à souhait. La Chambre ajoute encore que la part des investissements des nouvelles réalisations tend à diminuer : de 60 % du total au début du siècle à moins de 40 % au cours de la période de programmation pluriannuelle actuelle.

Au niveau des fonds spéciaux de l’État, la progression «fulgurante» des dépenses du fonds d’équipement militaire qui répond à l’engagement d’atteindre 2 % du RNB, n’est pas des plus heureuses. La CSL préférerait plutôt que l’aide publique au développement, actuellement à 1 %, soit portée à 2 % du RNB pour s’aligner sur les dépenses militaires.

La hausse des investissements dans le logement est une très bonne chose, en revanche. Mais au vu des prévisions pluriannuelles, la CSL constate avec regret que cette tendance ne se poursuivra pas sur toute la période couverte et que l’évolution des dépenses sera largement plus modeste entre 2025 et 2027.

Le ralentissement récent de l’activité dans les secteurs de la construction et de l’artisanat risque d’amplifier le déséquilibre entre production en logements et croissance démographique, vecteur primaire de la crise du logement, alerte la CSL.

La Chambre attendait mieux, mais tient entre les mains un budget de transition dans l’attente «d’un budget à la hauteur des défis sociaux».