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SOS Détresse se réforme face à des demandes grandissantes


Marcelle Walch, chargée de direction : «Du nouveau personnel arrive.» (photo Isabella Finzi)

Créé il y a 40 ans au Luxembourg, SOS Détresse a fait l’objet d’une réforme qui a visé la forme (horaires élargis) et le fond (possibilité d’échanges par courriel). Une nécessité, vu l’ampleur des sollicitations. SOS Détresse prend désormais les appels de 11h à 23h tous les jours, ainsi que les nuits le week-end.

Près de 3 000 appels par an, un chiffre constant depuis des années. « Nous plafonnons à la jauge maximale, constate Marcelle Walch, chargée de direction de SOS Détresse. Bien souvent, nos lignes sont toutes utilisées .» Avec trente «écoutants» bénévoles, l’association ne peut pas faire de miracle. Créé en 1975, SOS Détresse s’est donc lancée dans une série de réformes.

La plus récente a été annoncée la semaine dernière. Les plages horaires ont été revues à la hausse. L’association passe en libre écoute de 11 h à 23 h tous les jours (contre 15 h-23 h avant), tout en conservant les standards ouverts la nuit le week-end. « Ces nouveaux rythmes nous incitent à recruter, précise la direction. Deux psychologues encadrent les écoutants bénévoles. Ces derniers sont formés pendant un an, car leur mission reste délicate. » Deux formations se dérouleront sur la saison 2015/2016, contre une en temps normal. Il est encore possible de s’inscrire pour celle de janvier (info@sosdetresse.lu).

« Les bénévoles viennent de tous les horizons , insiste Marcelle Walch. Nous sommes limités au trilinguisme du pays, mais les autres langues sont toujours les bienvenues .» Seuls 20 % des écoutants sont d’origine étrangère, un chiffre que l’association aimerait voir grandir. « De plus en plus de situations découlent d’un mal-être dans l’entreprise, explique Marcelle Walch. Et il n’y a pas que les Luxembourgeois qui travaillent au Grand-Duché! »

Des réponses par courriel aussi

La deuxième grande réforme a été lancée en 2013. Elle porte déjà ses fruits. SOS Détresse a ouvert une adresse électronique avec échanges personnalisés et confidentiels, par création d’identifiants neutres. Six bénévoles, également formés pendant un an, répondent aux courriels, encadrés par deux psychologues. Susana Campos, l’une des deux professionnelles du projet, revient sur la démarche : « Avec les réseaux sociaux et les boîtes mail accessibles sur smartphone, l’écrit regagne une vraie place dans la société. L’écrit permet de détailler clairement ses problèmes, l’échange devient tout aussi constructif que par téléphone. » L’an dernier, plus de 400 courriels ont été échangés. « Un première réponse est envoyée sous trois jours maximum. Puis un échange peut s’installer, de façon plus ou moins long selon le problème à résoudre. » Un peu comme au téléphone d’ailleurs, où les écoutants ont une première conversation « qui peut suffire », précise Marcelle Walch, « alors que d’autres personnes ont besoin d’un suivi régulier ».

Dernière évolution, enfin, l’autodocumentation en ligne, comme cela se fait beaucoup sur internet. « Malgré l’anonymat de nos lignes, certaines personnes ont encore peur de nous contacter. Plutôt que de les laisser fouiller sur des sites médicaux douteux, nous leur donnons des premières indications sur les sources éventuelles de leur mal-être. » Une façon, aussi, de protéger des personnes isolées et souvent fragiles de l’esprit malintentionné de certains charlatans qui essaiment dans les forums médicaux.

Hubert Gamelon

SOS Détresse. Tel : 45 45 45.  www.454545.lu

L’isolement avant tout

Dans sa grande réforme, SOS Détresse a failli changer de nom. Sans oser toutefois, « car nous sommes identifiés comme tel depuis 40 ans ». Pourtant, la détresse pure ne constitue plus le noyau central des appels. Sur les 2 826 appels traités en 2014, 27 seulement étaient liés à un risque de suicide et 34 à une situation de crise aiguë (violence imminente, etc.).

« Le gros des communications concerne plutôt le questionnement psychique , explique Marcelle Walch. Les gens s’interrogent sur le sens de leur vie, l’identité, le sentiment de solitude. » Viennent ensuite les problèmes relationnels (886 appels), que ce soit en couple, en famille, ou « avec les contacts sociaux de façon général ». Les problèmes de santé et de travail ferment la marche du podium, avec la toxicomanie. Dernière statistique intéressante : la grande majorité des appels est passée par des femmes, presque 80 %!

Toutes ces données permettent de tirer une conclusion claire : plus que la détresse, c’est bien sur l’isolement que l’association travaille aujourd’hui. «SOS Détresse traite des demandes de toute la société» , insiste la direction. Dans certains milieux pourtant, par peur de l’image renvoyée, on n’ose pas évoquer les problèmes du foyer.

Selon l’association, « SOS Détresse ne distingue pas. Tout est anonyme, nous prenons le temps qu’il faut avec tout le monde. » (NDLR : en principe, une heure par appel). SOS Détresse a, par ailleurs, constitué un vaste réseau de spécialistes (psychologues, services d’urgence des hôpitaux, services de l’emploi…) Bref, un vrai service public!