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Hygie Group, dépité, contre-attaque 


Les deux responsables d’Hygie Group, Christophe Mignani et Alain Elemquies, disposent des autorisations d’utilisation des appareils.  (Photo : hervé montaigu)

Le groupe a renoncé à l’utilisation de certains des appareils d’Hygie Imagerie à Esch pour lesquels il avait toutes les autorisations requises. C’est bien ce qui ne va pas dans le système.

Le projet leur a coûté quatre années de démarches administratives et quelque trois millions d’investissement pour, au final, se heurter à un mur. Difficile de comprendre cette technique de construction qui aboutit à un effondrement, alors que tous les feux étaient au vert à chaque étape de l’élaboration du projet. Les dirigeants du cabinet privé Hygie Imagerie à Esch-sur-Alzette ont préféré l’entendement à l’affrontement et se retrouvent aujourd’hui avec des autorisations accordées par le même ministère qui leur interdit d’exploiter leurs appareils.

«Chaque étape a été vérifiée par des spécialistes de la radioprotection», assure le PDG d’Hygie Group, Alain Elemquies. Rien n’y fait, la ministre Paulette Lenert, encore en poste à l’époque, leur adresse un courrier le 9 juin 2023 leur indiquant qu’en l’absence d’une collaboration avec un centre hospitalier, les médecins ne peuvent exercer dans ce centre.

Les conseils du groupe fustigent une restriction à la liberté d’exercice des médecins, telle qu’elle avait été pointée dans un précédent arrêt de la cour administrative.

Régler le différend à l’amiable

Le courrier de Paulette Lenert ne leur suffit pas pour renoncer. Ils attendent une décision administrative «en bonne et due forme comportant les délais et voies de recours», faute de quoi le cabinet commencerait son activité le 26 juin 2023. Ce qu’il a fait. Et depuis, il a reçu 19 800 demandes de rendez-vous.

Les actes ont été remboursés jusqu’à ce que la nouvelle ministre, Martine Deprez, décide de tout stopper, jugeant l’activité illégale sans une convention avec un centre hospitalier. Finalement, Hygie Group introduit une demande avec une proposition de collaboration auprès de l’hôpital d’Esch, le CHEM, en novembre dernier. «Nous n’avons toujours pas de réponse à ce jour», indique Christophe Magnani, cofondateur du groupe.

Tous ces atermoiements sur un parcours déjà semé d’embûches n’entament pas leur volonté de régler le différend à l’amiable. Jusqu’ici, ils se sont montrés dociles et ont obéi aux injonctions du ministère. «Le ministère nous a demandé d’arrêter d’exploiter les appareils lors de notre rencontre du 11 mars, nous l’avons fait, tout comme nous avons renoncé aux frais pour convenance personnelle», rappelle Alain Elemquies.

Les tribunaux trancheront

 S’ils ont tout tenté pour satisfaire le ministère, les dirigeants d’Hygie Group comptent désormais fourbir leurs armes. Comment autoriser un tel investissement matériel pour décider qu’il ne serait pas exploité? C’est la question qui taraude les esprits. Les autorisations obtenues sont antérieures à la loi de juillet 2023 sur le virage ambulatoire et les soins extrahospitaliers. Selon la lecture de l’étude Chevrier & Favari, avocats du groupe, l’obligation de rattachement à un centre hospitalier ne peut s’appliquer rétroactivement. Ils demandent à ce que le ministère justifie sa décision de vouloir interdire à Hygie Imagerie d’exploiter les appareils «dont l’utilisation a fait l’objet de toutes les autorisations requises», écrivent les avocats dans un courrier daté du 14 mars, trois jours après la rencontre avec Martine Deprez.

«Nous avons fait tout ce qui était nécessaire, nous avons dit oui à tout, mais si on nous accule, nous allons réagir», annonce dans un calme olympien Christophe Mignani. Les dirigeants ne voulaient pas la guerre, mais les investissements sont trop lourds pour ne pas se lancer dans la bataille, et surtout, «il y a les patients, car c’est à eux que l’on pense avant tout», assure Alain Elemquies, qui, comme son associé, n’est pas de nature belliqueuse.

Alors qu’ils n’entendaient pas devenir, à la base, une antenne d’un hôpital, ils se sont résolus à suivre les instructions du ministère. Le CHEM ne les a plus contactés depuis décembre dernier.

Georges Mischo, ancien président du CHEM et ancien bourgmestre de la Ville d’Esch, avait mis 15 mois avant de donner une autorisation de construire à Hygie Group. Il a fallu une assignation pour faire débloquer le dossier du jour au lendemain.

Dans l’affaire qui les oppose au ministère de la Santé, ce sont aussi les tribunaux qui trancheront. Hygie Group ne compte pas en rester là et attendre une hypothétique réforme de la loi qui n’interviendra pas avant quelques années et qui ne changera pas fondamentalement le texte actuel. Le nouveau gouvernement semble se désengager de ses promesses.