Accueil | Culture | Mon roi, de Maïwenn : plongée dans un amour toxique

Mon roi, de Maïwenn : plongée dans un amour toxique


Emmanuelle Bercot et Vincent Cassel dans l'histoire d'un amour toxique.

Avec son quatrième film, Mon roi, la réalisatrice française Maïwenn plonge au cœur d’un couple. Une belle réussite tout en bruit et fureur.

Directe, elle ne s’est jamais embarrassée avec les mots. Les faux-fuyants, très peu pour Maïwenn, 39 ans et dont le quatrième film, Mon roi, arrive sur les écrans. Ainsi, elle lance : « On me décrit folle, écorchée… Bien sûr que je ne me reconnais pas dans ces qualificatifs. Mais ça m’est totalement égal. Ce qui compte pour moi, c’est de pouvoir faire les films que j’ai envie de faire. »

Des films où le thème central est l’incommunicabilité entre les hommes et les femmes. Il y eut les intéressants Pardonnez-moi (2006) et Le Bal des actrices (2009) puis le très réussi Polisse (2011), récompensé par le Prix du Jury à Cannes. En mai dernier, la réalisatrice est revenue sur la Croisette en sélection officielle – et pour son rôle de Tony, la comédienne Emmanuelle Bercot a partagé le prix d’interprétation féminine avec Rooney Mara.

Mon roi, c’est l’histoire d’un amour. Toxique. L’histoire de l’horreur conjugale. Tony et Georgio. Elle est avocate et, côté vie privée, en quête de l’homme idéal; lui est un monstre d’égoïsme flamboyant et se définit dès le début de leur histoire comme «le roi des connards» avec tout ce qui va avec : lâcheté, infidélités et mensonges… « Je voulais que le spectateur comprenne à la fois ce qui les avait tant liés et pourquoi ils se remettaient sans cesse ensemble… »

Difficile reconstruction

Mon roi, c’est Tony qui, après une grave chute de ski, se retrouve dans un centre de rééducation. Dépendante du personnel médical et des antidouleurs, elle se souvient. Du temps passé et proche, de l’histoire tumultueuse avec Georgio, interprété par un Vincent Cassel tout feu tout flamme, plus félin que jamais. Les questions surgissent, fusent – des questions que le personnage de Tony et la réalisatrice Maïwenn nous posent, à nous spectateurs : pourquoi se sont-ils aimés? Qui est réellement l’homme que Tony a adoré? Comment a-t-elle pu succomber à la passion aussi étouffante que destructrice? Et puis, pour l’avocate, arrive le temps de la reconstruction. Difficile. Un travail corporel qui lui permettra peut-être de définitivement se libérer…

De Tony, Maïwenn se plaît à dire et répéter : « J’en ai fait une avocate et ce n’est pas un hasard. Même si on ne la voit jamais au travail et si le film se concentre uniquement sur son histoire d’amour avec Georgio, j’aimais l’idée qu’elle passe son temps à défendre les autres, salauds ou innocents, et qu’elle défende son homme de la même façon. Elle a attendu longtemps, elle a rencontré un amour fulgurant, elle fait tout pour le garder. Et, oui, elle se bat. »

Pour ce film, la réalisatrice a tenu à tourner une partie des scènes avec Tony dans un vrai centre de rééducation parce que, explique-t-elle, « on est peu de chose lorsqu’on marche avec une béquille ou qu’on est cloué dans un fauteuil. Cela permet de relativiser la vie d’avant… » Et techniquement, pour ce film qui, au festival de Cannes à l’issue de la projection, avait été salué par une standing ovation, Maïwenn a utilisé sans retenue les flash- backs : « Cette structure narrative permettait à Tony d’avoir un double regard sur elle et Georgio en revisitant des moments de leur histoire. »

Serge Bressan

Mon roi, de Maïwenn. (France, 2h04) avec Vincent Cassel, Emmanuelle Bercot, Louis Garrel…