Vous aimez faire la fête et danser, mais sans vous coucher trop tard ? De Londres à Glasgow, un nouveau concept fait fureur : le «Day Fever», tourné vers une population plus âgée, et avec lequel la boîte de nuit n’a jamais si mal porté son nom. Ambiance.
Devant une boîte de nuit londonienne, une foule patiente dans une excitation bien perceptible que les portes s’ouvrent pour aller danser. Il est alors 14 h un samedi de février, et la fête s’achèvera à 20 h. Profiter d’un «night-club» en pleine journée, c’est un nouveau concept de fête baptisé «Day Fever», dédié à ceux qui n’ont pas abandonné leur goût pour la danse mais qui ne veulent plus faire de nuits quasi blanches pour aller en boîte de nuit.
«J’ai 52 ans, et ça ne se fait plus trop pour un homme de mon âge d’être en boîte de nuit à deux heures du matin… Donc je me suis dit : « Mais pourquoi ne pas essayer d’organiser ça l’après-midi! »», raconte ainsi Jonny Owen, organisateur de l’évènement au club Here at the Outernet en plein centre de Londres, avec son épouse, l’actrice Vicky McClure.
Après une première édition en décembre à Sheffield, dans le nord de l’Angleterre, le couple s’attaque alors à Londres. Et les sept prochaines dates, dispersées dans le Royaume-Uni (Nottingham, Glasgow, Newcastle…), affichent toutes complètes jusqu’au mois de mai. À Londres, la plupart des chanceux ayant pu acheter un ticket d’entrée (à environ 17 livres, soit 19 euros) ont joué le jeu, affichant tenues de soirées et vêtements à paillettes pour les femmes, et chemises élégantes pour les hommes, moins nombreux.
«Je ne suis plus allé en boîte de nuit depuis 35 ans !»
Ce sont principalement des quadragénaires ou quinquagénaires qui ont des responsabilités professionnelles pour certains, ou des enfants, parfois encore jeunes, et qui ne veulent pas souffrir pour se remettre d’une nuit endiablée, voire bien arrosée. Et qui ne trouve plus leur bonheur dans la vie nocturne londonienne actuelle.
Comme Katy Magrane, jeune mère de famille de 41 ans, venue avec quelques amies, et qui espère vivre «un regain de jeunesse». «J’espère m’amuser, boire un verre, avoir l’impression que c’est le soir et qu’on passe une bonne soirée comme nous aurions pu le faire il y a des années… mais en pouvant dormir. C’est parfait pour nous !», dit-elle. «Je ne suis plus allé en boîte de nuit depuis 35 ans !», s’impatiente pour sa part Daren Mew, 58 ans, qui travaille dans la construction et regrette qu’aujourd’hui les occasions qu’il a de danser se limitent aux mariages et aux anniversaires. Sara Willats, 58 ans, se réjouit quant à elle de pouvoir s’amuser avec des gens «d’un certain âge» dans un lieu où «on peut être soi-même et s’amuser sans que des jeunes nous montrent du doigt en disant « regarde celle-là »».
À l’intérieur, on a clairement remonté le temps. Les tubes de Billy Joel, Pulp, George Michael, Blur ou encore Cyndi Lauper s’enchaînent, tandis que sur des écrans géants un kaléidoscope d’images vintage sont diffusées : extraits de clips de David Bowie, de films comme ET, Footlose ou Dirty Dancing, et d’autres choses, comme des dessins animés de la même époque.
Dans la salle, on chante à tue-tête autant qu’on danse, chaque nouveau titre provoquant des cris de joie. Mention particulière pour le classique It’s Raining Men des Weather Girls. «On ne peut pas croire qu’on soit un samedi après-midi à Londres!», s’enthousiasme Kelly Tipton, une fonctionnaire d’une cinquantaine d’années.
Je ne suis plus allé en boîte de nuit depuis 35 ans!
«Quand vous descendez dans le club, c’est comme un saut dans le temps. Comme si j’étais dans ma vingtaine de nouveau. … C’est génial!», ajoute cette habitante de Douvres (sud du pays), qui se réjouit de sortir à temps pour rentrer chez elle par le train de 21 h. «Je pense qu’on a été un peu oublié», regrette Jonny Owen en parlant de sa génération qui veut «encore des expériences comme celle-ci» et surtout «passer du bon temps» ajoute-t-il.
Pour Joe Richardson, directeur adjoint de The Outernet, c’est aussi une opportunité pour son club, plutôt habitué aux musiques électroniques, de capter une nouvelle clientèle dans un monde de la nuit qui fait grise mine.
«Depuis le covid, l’industrie de l’accueil et de l’hébergement a souffert. La plupart des clubs ont fermé, les salles de concert sont vraiment en difficulté», explique-t-il. «Les évènements de jour qui visent ce type de population sont une véritable mine d’or», poursuit-il.
Sur le «dancefloor», par contre, l’heure n’est jamais aux calculs : ça crie, ça rigole et ça ondule dans une ambiance furieuse et moite. Une fois les lumières allumées et la musique éteinte, tout ce beau monde pourra retourner chez lui sans le moindre regard inquiet pour la montre. Il est encore tôt. Une tisane et au lit. C’est que demain, il faut travailler…