La série documentaire Merci internet retrace l’ascension du youtubeur Squeezie, 27 ans et presque 19 millions d’abonnés, offrant une plongée inédite dans le monde du web.
Comment un ado se filmant dans sa chambre est-il devenu le youtubeur le plus suivi de France? Rare dans les médias traditionnels, Squeezie, la coqueluche de la génération Z, n’en finit pas d’attirer les foules dans la vraie vie. En témoignait la file d’attente de 300 mètres longeant le Grand Rex, temple parisien du cinéma, pour l’avant-première de sa série, quelques jours avant sa sortie vendredi sur Amazon Prime Video.
«Je sens que je vais pleurer, je ne sais pas pourquoi», s’impatientait Milane, 18 ans, qui a découvert Squeezie il y a huit ans avec ses lives de jeux vidéo. «Je ne peux même pas dire que c’est une de mes idoles, parce que j’ai vraiment l’impression d’être proche de lui», ajoute l’étudiante, qui se délecte aujourd’hui de ses autres concepts, «tous géniaux», de «Thread horreur» (des histoires horrifiques) à «Pire date», un jeu de faux rendez-vous galants.
Dans la veine de Ne montre jamais ça à personne, la série sur Orelsan réalisée par le frère du rappeur, Merci internet devrait encore renforcer la proximité entre Squeezie – Lucas Hauchard de son vrai nom, qui fêtera samedi ses 28 ans – et ses fans. On y découvre sa vie en coulisses, devant la caméra de son «meilleur ami», le vidéaste Théodore Bonnet, qui le suit depuis dix ans et avec lequel il a monté une boîte de production.
Raconter le «conflit générationnel»
Le projet, imaginé «aux alentours de 2019», visait à «faire comprendre à nos parents notre quotidien» de créateurs de contenus, explique Théodore Bonnet. Ce «conflit générationnel, que beaucoup d’ados de l’époque ont vécu», selon le réalisateur, s’illustre dès le premier épisode de la série, où interviennent les parents de Squeezie. On découvre ainsi comment est née la passion du jeune Lucas, plein de tics, pour les jeux vidéo, ses premiers pas face à la caméra offerte par son père, «encourageants», tandis que sa mère, «normale», s’inquiète de le voir «passer sa vie derrière un ordinateur».
Difficile à l’époque d’imaginer que sa chaîne YouTube, lancée en janvier 2011 sous un pseudonyme inspiré du titre Squeeze It du DJ néerlandais Tiësto, deviendrait son métier. Alliant petits sketchs et «gaming», le compte YouTube de l’adolescent voit progresser son nombre d’abonnés jusqu’à dépasser le million, à seulement 17 ans.
Majeur et le bac en poche, il quitte le domicile familial et se professionnalise au contact d’autres pionniers de la plateforme comme Cyprien. À l’inverse de ce dernier, en froid avec son ancien acolyte, nombre de leurs pairs comme Natoo, Gotaga, Léna Situations ou Mister V interviennent dans les épisodes. «Par le prisme de Lucas, on voulait aussi raconter l’histoire des créateurs de contenus et d’internet», insiste Théodore Bonnet.
Entrepreneur multimillionnaire
Touche-à-tout, Squeezie, devenu un entrepreneur multimillionnaire avec la vente en 2015 de sa régie publicitaire à Webedia, a depuis lancé sa propre agence de communication d’influence ainsi qu’une marque de vêtement, sorti un album de musique et une BD, et monté une équipe d’e-sport. Il a surtout diversifié et fait monter en gamme ses vidéos, rassemblant jusqu’à 60 000 spectateurs pour la deuxième édition du GP Explorer, une course de Formule 4 suivie en direct par un record de 1,3 million de personnes sur la plateforme Twitch.
Ses divertissements parviennent également à séduire des publics plus âgés, à l’instar des parents de Manon, une fan de 24 ans qui regarde «en famille» le jeu «Qui est l’imposteur?», auquel ont participé les comédiens Pierre Niney, Camille Cottin et Marion Cotillard, les humoristes Éric et Ramzy et Jonathan Cohen ou encore le rappeur Orelsan.
Si «les youtubeurs sont tous des monstres de travail, Lucas est encore un cran au-dessus, au point qu’il a totalement mis sa vie perso de côté pendant dix ans», fait valoir Théodore Bonnet, louant la capacité de son ami à «se renouveler d’année en année». De quoi justifier la «vraie pause» qui s’opérera selon lui sur sa chaîne pour «plusieurs mois» après la sortie du documentaire, «pour revenir en force».
Merci internet,
de Théodore Bonnet.
Amazon Prime Video.