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[Escrime] Giannotte aux portes de la finale


Flavio Giannotte a été tout près de vivre sa toute première finale en Coupe du monde.  (Photo : dynamo fencing)

COUPE DU MONDE À VANCOUVER Auteur d’une superbe compétition, Flavio Giannotte s’incline à la mort subite en tableau de 16.

Tout avait pourtant plutôt mal commencé. Pour joindre Vancouver, à l’autre bout de la planète, Flavio Giannotte avait galéré. Pendant plus de 40 heures entre changements d’avion, retards et autres problèmes techniques, il avait posé le pied en Colombie-Britannique qu’un jour après la date prévue. Et pour ne rien arranger, sans son sac, arrivé lui-même bien plus tard grâce notamment à l’insistance de sa maman.

Mais on connaît le garçon, on sait que tout ce qui peut lui arriver en dehors de la salle n’a aucune incidence une fois que l’épéiste grand-ducal pénètre sur la piste. Venu avec l’idée de faire un tableau de 64 pour accéder au top 50 mondial, le Luxembourgeois savait que s’il voulait y accéder directement, il lui faudrait être impeccable en poules : «Quand j’ai vu ma poule, je me suis dit qu’elle était correcte. Une vraie poule de Coupe du monde avec comme deux adversaires les plus durs un Israélien que j’ai affronté à Berne (NDLR : où il a accédé au tableau de 64) et un Américain. Sans cadeau mais rien d’exceptionnel.»

« Je savais que c’était le match à gagner »

De ses propres dires, «le premier match est tendu alors que je dois gagner plus facilement». Il remporte ses premiers tours. Puis vient celui de l’Israélien Fedor Khaperskiy : «Je savais comment le tirer. Je fais un super match techniquement et tactiquement. Je gagne 5-2.» Après un cinquième succès, son dernier adversaire est donc l’Américain Dylan Nollner : «J’étais super stressé. Je savais que c’était le match à gagner si je voulais passer directement au deuxième jour. En plus j’avais la pression, car Niklas (Prinz) venait de me dire qu’il avait tout gagné. Et je ne voulais pas être le deuxième Luxembourgeois!»

En effet, alors que Flavio Giannotte était sur le point à nouveau de sortir des poules sans perdre le moindre match, le seul autre représentant grand-ducal réalisait quant à lui le plus grand exploit de sa jeune carrière : accéder à son premier tableau de 64, le tout en réalisant un 6-0 : «Tout le monde ne parlait que de ça après les poules d’ailleurs. Je suis content pour lui», confiait son aîné.

Mais revenons à notre mouton américain : «On est à 2-2, je décide d’aller en mort subite. Je sais que je vais le faire. Que j’ai la bonne solution. Je prends la bonne décision et je touche. Je termine 7e sur plus de 200 tireurs, c’est ma place !»

Historique : 2 Luxembourgeois en t64 avec 6-0!

Après cette entame de rêve, les voilà tous les deux directement qualifiés pour le tableau de 64. Si pour Niklas Prinz, l’aventure s’arrêtera dès le premier tour face au Japonais Kou Nakajima (6-13), Flavio Giannotte ira lui plus loin. Beaucoup plus loin.

En tableau de 64, il hérite de l’Italien Giacomo Paolini : «C’est un partenaire d’entraînement à Turin. Je le connais très bien. Et dans ces conditions, il y a deux possibilités : soit c’est un match hyper-serré qui va à la mort subite. Soit un des deux s’échappe et l’autre ne le revoit pas.» Et c’est au second scénario auquel on va avoir droit : «J’ai rapidement pris le dessus en mettant de très belles touches. On s’était un peu chambrés avant le match. Lui s’est jeté une ou deux fois, je me suis engouffré. Après trois secondes, je lui mets une touche magnifique au pied, il était complètement perdu. Il ne savait plus comment faire.» Victoire 15-6 pour accéder en tableau de 32.

Où il retrouve un autre tireur transalpin, Federico Vismara : «C’est un des meilleurs mondiaux, je le connais aussi par les stages que je fais. Je savais que ce serait tendu mais qu’il ne fallait pas commettre la moindre erreur, sinon il te punit.» Face au 9e mondial, tout de même, Flavio Giannotte va tenir le choc. Et même mieux. Jusqu’à un certain point : «Je fais un petit trou, je mène 6-2 et ensuite black-out. Je fais le con. Je mène 7-6, mais je prends un carton car je touche mon épée avec ma main gauche et remettant mon gant en place. Je lui donne l’égalisation. J’avais peur que cette bêtise me sorte du match. Mais au lieu de cela, elle m’a donné la rage. On arrive à 13 partout, je mets la quatorzième puis la quinzième.»

Des regrets sur son dernier match

Le voilà en tableau de 16. Aux portes de la finale. Face à lui, le Français Alexandre Bardenet, actuel septième mondial, que Giannotte avait dominé aux derniers championnats du monde de Milan, en tableau de 64. Mais cette fois, ça va moins bien se passer : «Je m’étais échauffé avec lui le matin. Je savais qu’il était très fort et qu’il pouvait être chiant. Il n’a pas de parade. C’est bien si tu mènes. Mais s’il est devant, c’est très compliqué car il ne fait pas d’erreur.» Ça part très mal pour le Luxembourgeois, largement mené à l’issue du premier tiers.

Mais même sans coach sur place, il parvient à se concentrer. À se reprendre : «Pendant la minute de pause, j’ai pensé, j’ai réfléchi. Mentalement, j’étais impeccable. J’ai analysé ce qui s’était passé. Je reviens à 10 partout et là, je me dis que tout est relancé.» Les deux hommes arrivent à 13 partout : «Je l’invite à aller au pied, il tombe dans le piège, 14-13 pour moi. Et là… j’ai fait le con !»

Prochain rendez-vous capital : le GP de Doha

Et Giannotte d’expliquer : «Dans cette situation, contre un mec comme cela, tu ne te jettes pas. Tu attends 40-45 secondes pour le stresser, l’obliger à bouger et tu termines par une double. Mais là au bout de dix secondes, je fais une demi-fente. Une connerie qui ne sert à rien, lui allonge le bras et je lui donne la 14e gratuitement. J’essaie de me ressaisir. Je me dis que je ne vais pas me faire avoir une deuxième fois. Je décide d’aller à fond sur l’« allez« . C’est ce que je fais. Je me jette sur lui, je le touche mais l’arbitre annule la touche. Je demande à ce qu’il visionne la vidéo, il ne veut même pas le faire. Quand je lui fais la remarque, il me répond de me mettre en garde s’il ne voulait pas que je prenne un carton rouge.» Bref, on voit venir la suite. Au final, c’est Bardenet qui met la touche décisive, laissant Flavio Giannotte aux portes de la finale.

Même si, sur le moment, il était forcément déçu («Je n’ai pas eu le cran d’aller au bout de mon action. De montrer qui était le chef. Je m’en veux»), il repart 13e, son deuxième meilleur résultat en Coupe du monde après Heidenheim (12e), en février dernier. Et surtout, il confirme qu’il fait bien partie de l’élite mondiale de son sport. Place désormais à un tout petit peu de tourisme avant de vite reprendre l’entraînement. Pour un nouveau rendez-vous capital : le GP de Doha, en janvier. Une compétition où les points acquis sont multipliés par 1,5 par rapport à une Coupe du monde !