Aldo a fui en Albanie, son pays d’origine, après avoir tiré sur un homme à Remich en novembre 2020. Il a fait partie des fugitifs les plus recherchés par Interpol jusqu’à son arrestation.
L’hélicoptère de la police tournait au-dessus de la Cité judiciaire un peu avant 15 h, hier après-midi. C’était une des parties visibles du dispositif de sécurité mis en place dans le cadre du procès d’Aldo, un Albanais de 33 ans qui a figuré sur la liste des «Most Wanted» d’Interpol après avoir tiré sur un homme à Remich le soir du 24 novembre 2020, le blessant à la jambe gauche et au pied droit.
Sa victime ne devrait sa survie qu’à sa fuite et au manque de précision des tirs du prévenu qui est accusé de tentative d’assassinat et de meurtre, a estimé le président de la 12e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg. Aldo conteste avoir voulu attenter à sa vie. Il aurait uniquement cherché à se défendre. Des éléments à décharge se trouveraient sur des images de vidéosurveillance, selon son avocat, Me Stroesser, qui a demandé au tribunal de bien vouloir les lui transmettre pour garantir l’équité du procès. 134 GB au total.
Au moment des faits, Aldo, cuisinier de formation, se trouvait, selon ses dires à l’expert neuropsychiatre, à Remich depuis une semaine dans le but de louer un restaurant à côté du café Seven où il avait passé la soirée des faits avec trois amies. Une «prise de bec» a eu lieu avec deux hommes, dont la victime. Aldo n’aurait pas apprécié que Jürgen flirte avec les filles. Endrit dit avoir éloigné Jürgen du bar en l’accompagnant jusqu’à la mairie. Aldo raconte que quelques minutes plus tard, un homme lui aurait demandé de sortir devant le bar, où une demi-douzaine d’hommes l’attendaient armés de matraques et de couteaux.
L’un d’eux l’aurait piqué à la jambe droite. Aldo aurait tiré une première fois en l’air avant de mettre cet homme en joue et de lui tirer dans la jambe pour se défendre. Endrit, quant à lui, prétend ne pas avoir vu le groupe d’hommes. Il serait revenu au café lorsqu’il a entendu le premier tir. «J’avais caché un bout de bois dans la manche de mon blouson pour me défendre au cas où. J’ai essayé de le sortir quand je me suis retrouvé face à lui», explique le trentenaire à la barre de la 12e chambre criminelle. «J’ai voulu aller voir ce qui s’était passé. Je n’imaginais pas que j’allais me retrouver seul face au tireur.»
Arrêté à Bruxelles
Cette fusillade en plein cœur de Remich a laissé des traces dans la chair de la victime et sur les façades des immeubles autour de la place du Marché. Cependant, aucun des protagonistes n’est capable d’en expliquer la raison. «S’il avait voulu me tuer, il aurait facilement pu me rattraper et m’abattre», insiste la victime. D’origine albanaise lui aussi, le trentenaire pense qu’Aldo a pu être surpris ou se sentir menacé. Le président de la chambre criminelle se demande si les deux hommes pourraient avoir eu un contentieux lié au trafic de stupéfiants.
Aldo a déjà été condamné en Italie pour sa participation à un trafic de drogue important et son nom, comme l’a écrit le Luxemburger Wort en avril 2022, est apparu dans des affaires liées aux stupéfiants aux portes du Grand-Duché, notamment dans l’affaire dite de la «Pizza Connection» à Sarrebruck qui concernait un trafic de cocaïne. Des éléments qui colorent ce procès et expliquent l’important dispositif policier déployé autour et dans le tribunal d’arrondissement.
Le soir des faits, Aldo et les trois filles se sont réfugiés au domicile d’un ami qui les a aidés à gagner Bruxelles dès le lendemain. De là, il est rentré en Albanie où il a séjourné pendant un an avant de revenir à Bruxelles. Il y a été arrêté le 11 décembre 2021 par les policiers du FAST (Fugitive Active Search Team) Belgium et des zones de police de Bruxelles Capitale et Bruxelles Nord grâce à des informations du FAST Luxembourg. Aldo était recherché depuis le 11 février 2021 à la suite de l’émission d’un mandat d’arrêt européen par un juge d’instruction luxembourgeois. Le grand jeune homme mince a été placé en détention préventive le 17 mars 2022. Selon nos confrères, Aldo avait dû quitter l’Albanie après avoir blessé deux personnes par balles à la suite d’une dispute.
La jeune femme qui est accusée de lui avoir fourni l’arme utilisée à Remich est également appelée à comparaître en tant que co-autrice présumée des faits. Son ADN a été retrouvé sur une des cartouches. Elle ne s’est pas présentée hier et sera donc jugée par défaut. Le principal témoin des faits a également brillé par son absence en ce premier jour de procès. La chambre criminelle a décidé de le déclarer témoin défaillant et de le condamner à une amende de 500 euros. Il a désormais pour obligation de se présenter au tribunal demain matin s’il ne veut pas y être escorté par la police vendredi, a prévenu le juge.
Cet après-midi, ce sera au tour des enquêteurs de la police judiciaire et technique d’apporter un peu de lumière sur ce qui s’est produit au pied du pont de Remich.