« L’ordre, l’ordre, l’ordre »: Emmanuel Macron a martelé sa réponse aux émeutes urbaines lors de son interview sur TF1 et France 2 depuis la Nouvelle-Calédonie, assurant qu’il n’y avait « pas de majorité de rechange » pour mieux défendre le bilan contesté de son gouvernement.
Le chef de l’État a atterri en fin d’après-midi (le matin à Paris), à l’aéroport La Tontouta de Nouméa pour débuter une visite au cours de laquelle il doit se pencher sur le casse-tête institutionnel du territoire d’Outre-mer, sur fond de menace de boycott d’une partie du camp indépendantiste.
À son arrivée, il a fait part de sa volonté d’ouvrir « une nouvelle page » sur le statut de l’île, après les trois référendums d’autodétermination qui se sont soldés par un « non » à l’indépendance.
Ce déplacement coïncide avec la toute fin des « cent jours d’apaisement, d’unité, d’ambition et d’action » que le président s’était donnés mi-avril pour relancer son second quinquennat après la crise des retraites.
Lors de cet inhabituel entretien accordé aux journaux télévisés de 13 heures un 24 juillet, en pleines vacances d’été et dix jours après un 14-Juillet sans prise de parole, il a défendu le bilan de cette période.
« Il y a eu parfois des jours avec et il y a eu aussi des jours sans », a relevé Emmanuel Macron en duplex, peu après sa descente d’avion, après quelque 24 heures de vol et à 16 000 kilomètres de la capitale. Mais « le gouvernement a avancé, décidé, fait passer des textes, été efficace, ce qui justifie ce choix de confiance pour Madame la Première ministre ».
Il a aussi félicité son ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin pour sa gestion des récentes émeutes, alors que la Macronie avait bruissé de spéculations sur la possibilité de le voir prendre la tête du gouvernement.
Celui qui avait demandé en mars à Elisabeth Borne d’élargir sa majorité relative, aux mêmes JT de 13 heures après l’adoption de sa réforme contestée des retraites, a minimisé lundi l’échec de la cheffe du gouvernement.
« Il n’y a pas de majorité de rechange » à l’Assemblée nationale, a-t-il estimé, assurant ne pas croire « aux coalitions » de gouvernement « formelles ».
Pour l’adoption de la prochaine réforme la plus épineuse, celle sur l’immigration, il a dit avoir « bon espoir » que « les oppositions républicaines » puissent « aider à bâtir un texte ». Mais, au nom de « l’efficacité », il a suggéré qu’il n’exclurait pas un recours à l’article 49.3 de la Constitution pour le faire adopter sans vote, comme la retraite à 64 ans.
Revenant sur les émeutes de fin juin, d’une violence inédite, après la mort du jeune Nahel tué à bout portant par un policier lors d’un contrôle routier, le chef de l’État a martelé : « l’ordre, l’ordre, l’ordre ». Et le « retour de l’autorité à chaque niveau », a-t-il ajouté, expliquant vouloir ouvrir le chantier de « l’autorité parentale ».
Il a aussi épinglé le rôle des « réseaux sociaux », plaidant pour « trouver un ordre public numérique qui permette de prévenir ces débordements ».
Au moment où la polémique enfle au sujet des propos du patron de la police nationale Frédéric Veaux, qui a affirmé qu’un policier n’avait « pas sa place en prison » avant son éventuel procès, Emmanuel Macron a tenté de trouver une position d’équilibre.
« Je comprends l’émotion (…) chez nos policiers », confrontés à la violence lors des émeutes, a dit le président. Mais « nul en République » n’est « au-dessus de la loi », a-t-il prévenu.
Très attendu sur les réformes concernant l’école, désormais sous la houlette du nouveau ministre Gabriel Attal, le chef de l’État a réitéré la promesse d’avoir « un professeur devant chaque classe » à la rentrée.
Au-delà, sans faire d’annonce nouvelle, Emmanuel Macron a réaffirmé avec force son « cap » : « l’indépendance et la justice », « pour financer un modèle social juste ».
Autant de mots d’ordre également déclinés par Elisabeth Borne qui a réuni ce lundi à Matignon l’essentiel de sa nouvelle équipe ministérielle. « Nous devons dès maintenant anticiper les crises de l’été, préparer la rentrée et aussi enrichir notre action en tirant tous les enseignements des violences urbaines », a-t-elle relevé.
Emmanuel Macron « n’imprime plus aujourd’hui (…) il y a un décalage gigantesque avec l’urgence sociale, la relance économique, l’urgence écologique qui s’exprime dans le pays », avait estimé dimanche le député socialiste Jérôme Guedj sur BFMTV.
La prise de parole du chef de l’État avant la pause estivale était attendue, mais l’Élysée a tergiversé jusqu’à la dernière minute sur la forme qu’elle prendrait.
Le 17 avril, en décrétant les « cent jours », Emmanuel Macron avait donné rendez-vous aux Français le 14 juillet pour « un premier bilan ».
Mais il a préféré d’abord remanier son gouvernement, ce qu’il a fini par faire la semaine dernière, au terme d’un long suspense et comme à contre-cœur, confirmant le maintien d’Elisabeth Borne par un SMS de ses conseillers aux journalistes, et évoquant de simples « ajustements ».
Après l’entretien, la visite en Nouvelle-Calédonie peut vraiment commencer mardi.