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[Série] Que cache l’humour trash de Rick and Morty ?


Dans la saison 6, sortie fin 2022, Rick et Morty trouvent un ennemi inattendu en la personne de Jésus-Christ… qui maîtrise le kung-fu ! (Photo : adult swim)

Réservée aux adultes, la série d’animation trash et déjantée Rick and Morty est devenue un phénomène mondial en dix ans parce qu’elle porte une «réflexion sur la condition humaine», selon ses fans et son équipe.

La série d’animation Rick and Morty, production de la chaîne américaine Adult Swim, suit les aventures spatiotemporelles d’un scientifique alcoolique et dégoûtant, Rick, et de son petit-fils, Morty, ado mal dans sa peau et victime des projets fous de son papy. Pour fêter ses dix ans et à l’approche de sa septième saison, elle a eu droit à une conférence dédiée au festival international d’animation d’Annecy. «Cela montre que Rick and Morty est un succès international», a lancé devant une salle comble le président d’Adult Swim, Michael Ouweleen, rappelant qu’elle est diffusée dans 112 pays. «Cela n’a pas toujours été le cas», a-t-il ajouté au sujet de cette série initialement pensée pour un public de niche.

L’heure étant à la fête, le sort de Justin Roiland, cocréateur avec Dan Harmon (Community) et doubleur principal de la série, écarté en janvier après des accusations de violences conjugales rejetées depuis par la justice, n’a pas été abordé. Michael Ouweleen, le coproducteur exécutif Steve Levy et la comédienne Spencer Grammer, qui double Summer, la sœur de Morty, ont préféré revenir sur l’explosion du phénomène.

Bave, rots, gore et humour scato

C’est avant le lancement de la saison 3 en 2017, lors d’un passage au Comic-Con, grand-messe de la pop culture à San Diego, en Californie, qu’ils ont pris conscience de l’ampleur de ce succès. «C’était fou», s’est souvenu Spencer Grammer, évoquant les milliers de personnes voulant assister à la projection, les fans déguisés ou tentant de sauter sur leurs «voiturettes de golf».

Si les audiences mondiales de la série, popularisée dans le monde par Netflix, ne sont pas disponibles, il n’est pas rare de croiser dans la rue des fans vêtus d’un t-shirt aux couleurs des personnages. Sydney Vercammen, une étudiante belge de 23 ans venue de Rome, était au festival d’Annecy. Elle adore «cette série complètement folle et belle à regarder». Même si elle n’est «pas très élégant» et peut repousser les profanes, avec son grand-père baveux – une parodie du Doc Brown de Back to the Future – ponctuant ses paroles de rots, ses scènes gores et ses blagues scatologiques. Elle est, pour cette raison, peut-être plus appréciée de la gent masculine, concède la jeune femme. Mais elle a renforcé l’importance de ses personnages féminins à «mesure que la société a évolué» sur les questions féministes, selon Spencer Grammer.

«Nihiliste» et «décomplexée»

La série est aussi appréciée pour ses nombreuses références. On peut notamment y voir des chiens se rebeller dans une parodie de Planet of the Apes ou le personnage de A Nightmare on Elm Street, Freddy Krueger, qui hante un pastiche du film Inception. Surtout, «elle explore la condition humaine» et «pose plein de questions sur l’univers et la vie», a fait valoir Steve Levy.

Un constat partagé par Chris Le Guelf, auteur du livre La Philosophie Rick and Morty, publié en septembre aux éditions Opportun. Cette série «nihiliste» et «décomplexée traite de manière explicite des questions philosophiques et scientifiques», explique l’auteur. En particulier depuis le tournant survenu durant la première saison, où les deux héros abandonnent leur famille dans un monde devenu invivable pour atterrir dans une autre dimension. Ils y prennent la place d’autres versions d’eux-mêmes, décédées après une expérience, et dont ils enterrent les corps dans le jardin familial.

Rick découvre alors «qu’il y a autant de versions de lui-même que d’univers, que sa mort n’a absolument aucun intérêt, que rien n’a de sens, que rien n’est grave». À partir de là, «il va apprendre à se défaire de ses illusions» et «accepter l’absurdité de l’existence», analyse Chris Le Guelf.