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Lycéen élu au conseil communal : «Je suis déterminé à m’investir à fond»


«Les campagnes politiques ne sont pas encore assez tournées vers la jeunesse. Il faut améliorer ça». (Photos : fabrizio pizzolante)

À seulement 18 ans, voilà Hugo Da Costa propulsé conseiller communal de Betzdorf. Sous les couleurs du parti libéral, ce lycéen à la tête bien faite, aujourd’hui plus jeune élu du pays, devrait vite s’imposer dans le paysage politique.

Il a bouclé ses examens en même temps que sa campagne électorale : Hugo Da Costa, élève au lycée Aline Mayrisch de Luxembourg, a décroché dimanche son tout premier mandat de conseiller communal à Betzdorf, où il vit avec sa famille, et espère briller tout autant pour les résultats du bac.

Passionné de politique depuis l’enfance, le jeune homme de 18 ans fait une entrée remarquée dans la cour des grands : sous la bannière du DP, il devient le plus jeune élu du Luxembourg, ce qui n’a pas échappé au Premier ministre qui, en déplacement en Irlande, lui a adressé un chaleureux message de félicitations. Nous l’avons rencontré.

Ces communales ont vu de nombreux jeunes candidats se présenter. Un bon signal pour la vie politique luxembourgeoise, non?

Oui, et notamment Jill Goeres à Bech, qui est maintenant la plus jeune bourgmestre à tout juste 20 ans, c’est incroyable! C’est un vent de jeunesse qui a soufflé sur ce scrutin et c’est très positif, car c’est ce que les gens demandent : un renouveau. Pour qu’une commune ou un pays évolue, il est nécessaire, à un moment, que de nouvelles idées s’imposent.

Toutefois, peu ont été élus. Qu’est-ce qui a fait la différence pour vous? 

Pas mal d’éléments ont compté, à commencer par l’esprit ouvert des habitants de Betzdorf, qui ont eu le courage d’oser le changement, et pas seulement pour moi d’ailleurs. Les autres jeunes candidats ont également fait de très bons scores. Il y a eu une vraie volonté de leur donner leur chance, même dans cette commune rurale qu’on peut penser plus fermée au changement.

Ensuite, j’ai énormément travaillé! Les quatre semaines de la campagne ont coïncidé avec mes quatre semaines d’examens, donc il a fallu s’organiser, et je me suis retrouvé à tracter dans les boites aux lettres la nuit (il rit). Enfin, j’ai été soutenu par ma famille et mes amis qui ont activé un véritable réseau et parlé de moi autour d’eux. Un bouche-à-oreille crucial pour une première candidature, quand on n’a pas encore pu faire ses preuves.

Vous n’avez que 18 ans mais déjà un long parcours d’engagement derrière vous…

Oui, c’est vrai. Mon lycée offre de nombreuses opportunités en ce sens pour les élèves. J’ai été délégué de classe, puis délégué de solidarité, ce qui revêt un volet plus social, avec l’organisation d’une collecte de fonds et la mobilisation des élèves pour un projet humanitaire.

Pour qu’un pays évolue, il est nécessaire que de nouvelles idées s’imposent

Je suis ensuite entré au comité des élèves, en tant que trésorier et représentant à la Conférence nationale des élèves des lycées (CNEL), et parallèlement, j’ai été élu président de la commission des Affaires étrangères au parlement des jeunes à 15 ans, avant de prendre la présidence de l’institution l’année suivante. Fin 2021, j’ai pris ma carte au DP, le parti dont je me sentais le plus proche depuis longtemps, avec la volonté de me lancer pour de bon en politique.

Certains membres de votre famille font-ils de la politique? 

Non, personne à la maison, mais on a toujours eu des débats et des discussions sur l’actualité, l’économie, donc c’était très présent. Et un cousin au Portugal a été maire et m’emmenait avec lui à la mairie quand j’étais petit, ça m’a marqué.

Mais le véritable déclencheur pour moi, ce sont les élections législatives de 2013 : j’avais neuf ans et, face à mon père qui soutenait un parti, je me suis amusé à en défendre un autre, par esprit de contradiction. Le hasard a voulu que ça tombe sur le DP, parce que le bleu était ma couleur préférée. Quand Xavier Bettel est devenu Premier ministre, ça m’a motivé et je me suis réellement intéressé à la politique.

Vous l’avez rencontré?

Oui, quand j’avais 12 ans, pour un défi scolaire : j’avais rédigé tout un devoir sur le thème de l’Europe, et j’ai eu la chance d’être invité dans son bureau pour lui poser mes questions. Je me rappelle des piles de dossiers, des drapeaux…

Et qu’est-ce qui vous a convaincu de rejoindre les libéraux?

C’est une idéologie qui me correspond, et c’est un mouvement qui soutient l’Europe et s’engage en faveur des valeurs européennes de liberté, de démocratie. Ce qui me tient particulièrement à cœur.

Au niveau local, quels sont les enjeux à Betzdorf? 

Notre commune a les mêmes préoccupations que beaucoup d’autres au Luxembourg : on parle logement, on parle infrastructures pour piétons et cyclistes, mobilité aussi, pouvoir transiter entre les villages plus facilement, alors que le réseau luxembourgeois est centralisé sur la capitale. Avancer sur ces sujets est l’objectif, peu importe le bord politique d’ailleurs. À cela s’ajoute le défi du vivre-ensemble dans nos communes touchées par le phénomène «dortoir».

La coalition CSV-LSAP est reconduite tandis que votre parti maintient ses deux sièges. Un résultat satisfaisant? 

La bonne nouvelle, c’est qu’on reste stable, avec une équipe nouvelle, ce qui est un bon signal. Mais très honnêtement, mon but était de décrocher un troisième siège, qu’on se retrouve en position favorable pour intégrer la majorité. Donc non, je ne suis pas satisfait. On mènera une politique d’opposition constructive, en aidant ceux qui sont aux responsabilités à réaliser leurs projets le mieux possible. «Bloquer pour bloquer», ce n’est pas ce que les gens attendent.

Sur quels dossiers avez-vous envie de vous investir?

J’aimerais être présent partout! Néanmoins, si je devais privilégier un sujet, ce serait la jeunesse. On va pousser cette thématique parce que c’est un enjeu fort pour les communes. D’abord, elles doivent faire en sorte que leurs jeunes aient l’envie et la possibilité de rester, c’est-à-dire pouvoir se loger.

Contre le désintérêt des jeunes, il faut travailler sur l’accès à l’information

Elles ont aussi un rôle à jouer pour lutter contre le désintérêt des jeunes pour la vie politique. On propose donc de créer un conseil communal pour les enfants et les jeunes, où ils pourront à la fois exprimer leurs opinions et leurs idées, et mesurer très tôt l’importance des décisions qui sont prises au niveau communal et l’impact sur leur quotidien. On veut également donner plus de moyens à la maison des jeunes pour développer ses activités et l’encadrement.

Ce désintérêt des jeunes pour la politique, vous le constatez autour de vous? 

Je pense qu’il est relatif, mais il existe : les gens lisent les programmes très tard, certains ne savent pas, jusqu’au jour de l’élection, pour qui voter, et c’est un problème. C’est compliqué dans ces conditions de s’informer correctement, de creuser certains sujets.

C’est pourquoi l’accès à l’information est très important. Or, actuellement, les campagnes politiques ne sont pas encore assez tournées vers la jeunesse. On le sait depuis longtemps : ils s’informent autrement, via les réseaux sociaux notamment, donc il faut des contenus riches et pertinents, ce qui manque. Il faut améliorer ça.

Il y a aussi un gros problème avec l’engagement. Le Jugendrot souligne dans un rapport que seule une petite portion de jeunes s’investissent dans des associations. C’est dommage, car dans ce contexte, on développe son savoir-être, on crée du lien, du contact. Et c’est dans l’échange que vient l’envie de parler politique.

Ex-président du parlement des jeunes, Hugo Da Costa entre aujourd’hui dans la cour des grands, sous les couleurs du DP.

Le DP laisse de la place à ses jeunes pousses? 

Oui, c’est un parti qui est clairement derrière ses jeunes et les soutient. Parmi les Jonk Demokraten, dont je fais partie, on a plus que doublé le nombre de nos mandats – on est à plus de 30, si je ne me trompe pas. C’est la preuve que le DP veut pousser le renouveau, et pour moi, c’est un cadre idéal pour travailler.

La prochaine étape, ce sont les législatives?

Je m’attendais à cette question! (il rit) Je sais que d’autres partis ont déjà fixé leurs listes, même si elles ne sont pas encore rendues publiques, mais pas nous. Des noms circulent, mais on n’a encore démarré aucune discussion.

Est-ce que ça vous fait envie?

Quand on aime la politique, on a envie de s’engager à tous les niveaux. Mais on vient de me confier un mandat local, dans lequel je suis déterminé à m’investir à fond. Donc, pour l’instant, je n’y pense pas. Sans compter que ces législatives arrivent très vite, et que je vais entamer mes études.

Si on venait me chercher, je ne dirais pas non d’office, je ne dirais pas oui non plus… Ce n’est pas ma priorité actuelle. Et puis, je suis très jeune, si je me présentais, quelles seraient mes chances d’être élu? Il faut aussi se poser cette question.

La suite c’est quoi?

Des études de droit l’an prochain, à combiner avec mon mandat de conseiller communal, ce qui va être sportif, j’en suis conscient, mais ça ne m’effraye pas (il sourit). Je me suis engagé, les électeurs m’ont donné leur confiance, donc je le ferai.

4% des candidats âgés de 18 à 24 ans

Lors de ces communales, un quart des 3 847 candidats était âgé de 25 à 39 ans et seulement 4% de 18 à 24 ans. Hugo Da Costa fait partie de la petite douzaine de candidats âgés de 18 ans qui a tenté sa chance, tandis que les 18-21 ans représentaient 70 personnes en tout.