Les joueuses ont témoigné de l’impact de la révélation des faits et dénoncé le déni dans lequel leur ancien entraîneur se serait muré. L’avocat de ce dernier a défendu un «homme malade».
Les victimes présumées souhaitent que leur ancien entraîneur de volley-ball «paye» pour les actes dont il est accusé, mais également pour l’exemple. L’enquête de police démontre que pendant des années, de 2011 à 2016 au moins, il leur a volé leur intimité sur les terrains, dans les vestiaires et jusque dans les chambres de certaines d’entre elles alors mineures.
Celles dont il aurait «abusé de la confiance de manière perfide» n’auraient été que «des supports sur lesquels se masturber», selon les propres mots du prévenu, avant de partager ces images avec d’autres hommes. Plus de 4 900 images envoyées à 139 hommes, parmi lesquels son coprévenu.
«Nos parents nous disent de nous méfier des inconnus, de ne pas monter en voiture avec eux, de ne pas accepter de bonbons. On le fait et nous nous retrouvons quand même ici», témoigne une des victimes présumées à la barre. Mais le loup était apparemment dans la bergerie. L’impact sur la vie des victimes présumées identifiées serait incommensurable, selon leurs avocates.
Une jeune voisine du principal accusé a passé le domicile familial au peigne fin à la recherche de caméras cachées. Une joueuse explique craindre le moindre téléphone dégainé dans un lieu public ou hésiter à aller à la plage. Une autre a peur que les images puissent réapparaître un jour. D’autres pensent aux enfants qu’elles n’ont pas encore. Toutes ont du mal à faire confiance et à se sentir en sécurité jusque dans leur sphère intime.
La salle d’audience du tribunal d’arrondissement de Luxembourg, pleine à craquer de jeunes femmes, transpire d’émotion et de colère. «Je regrette qu’il ne soit pas capable de nous regarder dans les yeux pour nous présenter des excuses, alors qu’il n’a jamais eu de mal à nous regarder à travers la lentille de sa caméra», s’emporte une des joueuses et amie de la fille de l’entraîneur.
«Ma cliente était dégoûtée, humiliée, détruite» et «a perdu pied» après avoir découvert les images la concernant aux termes de son audition de trois heures à la police, explique Me Valérie Dupong. «Il était son entraîneur et un ami de la famille. Elle le considérait comme un deuxième père et ne s’est jamais imaginée que certains de ses gestes pouvaient cacher une intention sexuelle.»
Les dégâts occasionnés au sein des familles de victimes présumées seraient énormes, témoigne l’ancienne bâtonnière. Le déni affiché par les deux prévenus les rendraient «dangereux». Par leurs actes, ils ont, selon elle, alimenté «un fléau qui met les enfants et la société en danger». 85 millions de contenus pédopornographiques ont été signalés en Europe en 2021. Soit une augmentation de 600 % ces dix dernières années. 8,7 millions de documents pédopornographiques auraient été effacés par Facebook en trois mois en 2018, selon Me Dupong.
«Son pur et malsain plaisir»
«Mon client est un homme malade», a souligné l’avocat de l’entraîneur. «Son plus grand salut a été que les faits soient portés en audience publique.» Cela lui aurait permis de «prendre conscience» de la gravité de ses actes et l’aurait aidé à «se sortir de la spirale infernale» dans laquelle il se trouvait piégé.
«Accordons lui cette honte intérieure», propose Me Schons avant de demander à la 9e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg de «ne pas céder aux sirènes des parties civiles, même si je comprends leur révolte» et de poser un acte juridique contre l’impunité tout en n’omettant pas «la réintégration sans risque du prévenu à la société».
Faire des aveux complets aurait exigé «un effort énorme pour reconnaître jusqu’où il est allé pour son pur et malsain plaisir», avance l’avocat. «Il a admis la cruauté et la crudité des faits face à vous.» Me Schons demande au tribunal de faire preuve d’humanité en lui tendant la main. Il plaide en faveur d’une peine n’excédant pas les 5 années de réclusion – «une peine très sévère pour un malade» – assortie d’un sursis probatoire intégral permettant au prévenu de soigner son trouble pédophile.
Le parquet a requis une peine de 8 ans de prison assortie en partie du sursis probatoire et une amende à l’encontre de l’entraîneur de volley-ball, ainsi qu’une peine de 4 ans de prison assortie en partie du sursis probatoire à l’encontre de son coprévenu, soulignant la multiplicité et la gravité des faits qui leur sont reprochés.
Le procureur a retenu l’atteinte à la vie privée à leur encontre ainsi que le fait d’avoir fabriqué, détenu, diffusé, enregistré ou consulté des images et des vidéos à caractère pédopornographique et le grooming, de même que l’attentat à la pudeur dans le chef exclusif de l’entraîneur.
«Une peine disproportionnée», estime l’avocat du coprévenu qui a permis de faire éclater les faits. Il plaide en faveur d’une peine de réclusion maximale de 2 ans assortie du sursis probatoire intégral pour lui permettre de soigner «la tendance pédophile» décelée par un expert psychiatre. L’homme aurait saisi la gravité de ses actes, selon l’avocat qui souligne la différence avec l’impunité régnant sur internet pour des faits jugés intolérables par la société.
Le prononcé est fixé au 13 juillet prochain.