Après six longues années d’attente, les joueurs peuvent se procurer à partir de vendredi le dernier épisode de « Zelda », la saga de jeux vidéo d’aventure-action de Nintendo, qui compte sur l’engouement autour de cette sortie pour muscler ses ventes de Switch.
Le nouveau volet de la saga Zelda, intitulé « Tears of the Kingdom », déchaîne déjà les passions depuis plusieurs mois, chaque extrait vidéo de ces nouvelles aventures de Link, l’elfe en tunique armé d’une épée, récoltant des millions de vues sur internet.
Avantagés par le décalage horaire, les joueurs en Asie-Pacifique étaient les premiers à pouvoir se procurer en magasin le jeu également disponible en téléchargement, mais certaines échoppes à Paris ou à New York avaient prévu d’ouvrir dès minuit pour attirer les fans les plus ardents de cette série.
« Il est difficile de mettre des mots sur ce qui fait l’aspect unique de Zelda », déclare à l’AFP Katsuhiko Hayashi, rédacteur en chef du magazine spécialisé Famitsu, une institution au Japon. « Il y a les puzzles à résoudre, les éléments d’action, un univers propre » à la série créée par Shigeru Miyamoto, créateur vedette de Nintendo et papa de personnages phares comme Mario ou Donkey Kong.
Un appel à l’exploration
Le premier épisode de « La légende de Zelda », sorti en 1986, détonnait à l’époque en abandonnant le joueur quasiment sans indications au milieu d’une vaste contrée parsemée de forêts, lacs, grottes et montagnes, inspirée des explorations d’enfance dans la campagne nippone de Miyamoto.
Sorti quelques mois seulement après « Super Mario Bros », il est à l’opposé du célèbre jeu de plateformes où le plombier moustachu court simplement de gauche à droite: ce titre « encourageait le joueur à explorer, découvrir et cartographier son univers et relever ses défis », explique Mark Brown, qui analyse sur sa chaîne YouTube la conception des jeux.
Une saga aux 125 millions de ventes dans le monde
« A l’époque, les jeux n’en étaient qu’à leurs balbutiements, mais Zelda offrait cette excitation, cet émerveillement de vivre une aventure », dit M. Katsuhiko Hayashi.
Le succès du jeu -dont le nom de la princesse est emprunté à la romancière américaine Zelda Fitzgerald- est immédiat, et son univers charmera des générations de joueurs mais aussi de créateurs de jeux.
La série, riche d’une vingtaine d’épisodes principaux distribués sur toutes les consoles successives de Nintendo, s’est vendue à ce jour à 125 millions d’exemplaires dans le monde.
Au tournant des années 2010, « Zelda » connaît cependant une crise d’identité, illustrée par des épisodes de plus en plus linéaires. « L’équipe de développement avait un sentiment de crise » qui l’a amenée à « repenser les fondamentaux », raconte Katsuhiko Hayashi. « C’était une période difficile pour Nintendo qui a procédé par tâtonnements. »
Le résultat de ces réflexions a abouti à « Breath of the Wild », un jeu en monde ouvert, bouffée d’air frais dans la série qui renoue avec la liberté des débuts.
« Meilleure vente historique »
Lancé en 2017 en même temps que la console Switch, Breath of the Wild, dont le titre lancé ce vendredi est la suite directe, est de loin le Zelda le plus vendu (29 millions d’unités).
« Ce jeu a vraiment placé la barre très haut pour le genre action-aventure en monde ouvert, et Zelda est toujours au sommet du genre », pense Katsuhiko Hayashi.
Nintendo compte sur le nouvel épisode de sa saga pour soutenir son activité en 2023/2024, alors que les ventes de Switch -qui entre dans sa septième année de commercialisation- sont attendues en net repli de 16,5%, à 15 millions d’unités, selon ses prévisions publiées mardi. Le nouveau « Zelda » devrait être « de loin le plus gros contributeur aux ventes de Nintendo pour cet exercice », anticipe ainsi Serkan Toto, analyste du cabinet Kantan Games.
Pour Charles-Louis Planade, analyste chez Midcap Partners, il pourrait même devenir « la meilleure vente historique » de cette licence. « C’est un jeu qui peut s’approcher du milliard de dollars de revenus, c’est très conséquent pour une société qui fait un chiffre d’affaires d’un peu plus de 10 milliards par an », dit-il à l’AFP.
Au global, pour son exercice 2023/2024, Nintendo s’attend à un bénéfice net de 340 milliards de yens (2,3 milliards d’euros), ce qui serait une chute de 21% sur un an.