La diplomatie n’avait, semble-t-il, pas sa place entre les deux bandes rivales. Deux jeunes hommes ont été blessés dans une bagarre de nuit à Gasperich. Les versions s’affrontent.
Ils voulaient régler un différent en dialoguant et finalement ce sont les poings qui ont parlé. Vers 2 h dans la nuit du 24 au 25 août 2018, deux bandes rivales se sont affrontées dans le centre de Gasperich à Luxembourg. «Ils sont arrivés à notre rencontre. Ils étaient plus nombreux que nous», rapporte un témoin face à la 13e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg, «Ça devait être à un contre un.» Un cercle s’est formé autour des deux rivaux, Daniel et Garba, une vingtaine d’années chacun. Quelques coups pleuvent et les deux jeunes finissent par se séparer, rassasiés.
«Nous nous sommes éloignés et nous les avons laissés s’expliquer. Ils parlaient tranquillement. Jusqu’à ce qu’Ivo et Sully commencent à se battre. Daniel a profité que notre attention était détournée pour mettre un coup de poing à Garba qui est tombé à la renverse. Sa tête a heurté le sol.» La situation a dégénéré rapidement, précisent les témoins. Gilles a tiré sur Ivo avec un pistolet à air comprimé, le blessant à l’œil. Au sol, Garba est victime d’une crise d’épilepsie. «Sa tête saignait», se souvient le témoin. La bande rivale en a profité pour prendre la fuite.
«Nous étions cinq et ils étaient une quinzaine»
Quelque temps avant les faits, Daniel aurait asséné un coup de poing à Garba lors d’une soirée en boîte de nuit parce qu’il l’aurait bousculé. Le frère d’Ivo aurait déjà eu, lui aussi, maille à partir avec le jeune homme qui serait connu pour son impulsivité. Daniel et Gilles sont, entre autres, accusés de tentative de meurtre ainsi que de coups et blessures volontaires.
«J’avais entendu dire que la bande se faisait appeler « GP« et qu’il était impossible de dialoguer avec ses membres», indique un autre témoin qui assure avoir tenté de dissuader Garba de se rendre à Gasperich. «Nous étions cinq et ils étaient une quinzaine.» Il se souvient avoir entendu un coup de feu au moins et l’impact de la tête de Garba heurtant le sol. «J’ai vu Daniel lui mettre un crochet du droit dans la mâchoire», poursuit-il, mimant le geste. «J’étais sous le choc. Ma première réaction était d’embarquer les blessés et de les conduire à l’hôpital. Je n’ai pas pensé à appeler les secours et la police.»
«Garba était prêt à se battre»
Les amis des deux victimes présumées prétendent s’être rendus à Gasperich en paix. Sans avoir l’intention de se battre. Mais Daniel, apparement peu diplomate, aurait dit à Garba ne pas vouloir discuter et aurait donné le premier coup, selon le témoin. «Garba était prêt à se battre le cas échéant», explique un troisième témoin. «Je le connais depuis des années, il n’est pas du genre à être violent.» La réputation de Daniel et Gilles semble les précéder. «Ce sont des gens dangereux», poursuit le témoin.
«On raconte que Dan tabasse les gens dans les coins sombres.» «Pourquoi y êtes-vous allés alors?», questionne la présidente. «On pensait que Garba arriverait à régler les choses avec le dialogue», répond le jeune homme. «Vous dites tous que Dan a la réputation de frapper avant de parler. Vous saviez ce qui risquait d’arriver. C’est pour cette raison que vous l’aviez accompagné à Gasperich», estime la présidente, qui reproche aux jeunes de ne pas avoir calmé le jeu.
Des attitudes qui agacent la présidente
Les avocats de la défense, Mes Frank, père et fille, ainsi que Me Says ont mis en doute la volonté de dialoguer des victimes présumées. Pour eux, les jeunes hommes avaient une autre idée derrière la tête quand ils se sont rendus à Gasperich. «Ils nous avaient abordés à la Schueberfouer dans la soirée. Garba disait qu’il voulait son un contre un avec Daniel», se souvient un quatrième témoin, ami des deux prévenus. «Ivo a arraché mon téléphone de ma poche et m’a menacé pour que je lui donne le numéro de téléphone de Daniel. Ils nous ont dit qu’ils n’avaient pas peur des gens de Gasperich.»
La version de ce dernier témoin diffère de celle livrées jusqu’à présent. Il dit avoir voulu «réaliser le souhait de Garba» de se battre avec Daniel. Ivo avait «des gants remplis de sable, comme ceux des policiers». «Il a sauté sur Sully», poursuit le témoin qui a «pris la fuite quand Garba est tombé», mais n’aurait pas entendu les coups de feu tirés avec le fusil à air comprimé. «Tout s’est passé en face-à-face. Garba a vu le coup arriver.» «Vous êtes le seul à le dire», lance la présidente qui ne semble pas croire le témoin. Comme les autres avant lui, la juge le tance pour ne pas avoir prévenu les secours et avoir pris part à la bagarre. Elle paraît agacée par leur attitude à tous, toutes bandes confondues, le soir des faits.
Le suite ce jeudi après-midi avec les témoignages de deux jeunes appelés par la défense ainsi que des deux prévenus.