Profondément divisés, les pays européens vont tenter une nouvelle fois cette semaine de s’accorder sur un principe de répartition pour l’accueil des réfugiés, arrivés par milliers en Autriche ce week-end après avoir été ballotés d’un pays à l’autre d’Europe centrale.
Dimanche, François Hollande a haussé le ton à l’égard des pays frileux qui refusent un système des quotas. «Aucun pays» européen «ne peut s’exonérer» de cette répartition «des réfugiés relevant du droit d’asile», «ou alors nous n’appartenons plus au même ensemble fondé sur des valeurs et des principes», a déclaré le président français.
Les chefs de la diplomatie de six pays de l’ancienne Europe de l’est majoritairement opposés à une répartition contraignante des demandeurs d’asile (Pologne, République tchèque, Slovaquie, Hongrie, Roumanie et Lettonie) rencontrent lundi à Prague leur homologue luxembourgeois Jean Asselborn dont le pays préside actuellement l’Union Européenne.
Ces pays avaient signifié dès le 11 septembre leur opposition à la politique de quotas obligatoire défendue par la chancelière allemande Angela Merkel pour les demandeurs d’asile, créant un fossé est-ouest sur le sujet en Europe.
Depuis cette date, les tensions n’ont cessé de s’accentuer, avec d’un côté le rétablissement des contrôles aux frontières dans plusieurs pays de l’UE, et de l’autre, l’accroissement du flot continu de migrants tentant de rejoindre par tous les moyens un eldorado supposé en Europe du nord.
Plusieurs réunions, lundi à Prague et mardi à Bruxelles, vont tenter de lever les incompréhensions pour construire un consensus en vue du Conseil européen de mercredi. L’objectif est de faire en sorte que 120.000 réfugiés relevant du droit d’asile, chassés de Syrie et d’Irak par la guerre, soient répartis automatiquement selon un sytème de quotas, entre tous les pays de l’Union.
« Dernière chance »
Selon le Haut Commissariat des Nations unies aux réfugiés (HCR), le conseil européen de mercredi est probablement la «dernière chance de l’Europe de parvenir à une réponse unie et cohérente» face à la crise des migrants.
«Avec plus de 442 440 réfugiés et migrants ayant traversé la Méditerranée cette année, quelque 2.921 morts, et 4.000 personnes arrivant quotidiennement sur les îles grecques, la crise s’amplifie et se transmet d’un Etat à l’autre sans aucune solution», a souligné le HCR dans un communiqué.
Le conseil européen devrait aussi se pencher sur l’aide à apporter aux pays frontaliers de la Syrie (Turquie, Liban et Jordanie) qui n’ont plus les moyens d’entretenir les camps où s’entassent des millions de réfugiés.
Lundi, le patron de l’agence européenne de surveillance des frontières Frontex, Fabrice leggeri a insisté sur la nécessité d’instaurer «de façon urgente» une politique européenne frontalière «homogène», réclamant aussi à l’UE un «soutien humain» plus important pour surveiller les frontières.
Message repris par la Pologne qui s’est déclarée lundi en mesure d’accueillir plus de réfugiés que les quotas proposés à condition que l’UE rende ses frontières extérieures plus étanches. Le flot ne s’est pas tari ce week-end. Dans la nuit de dimanche à lundi, quelque 3 400 migrants sont arrivés en Autriche depuis la Hongrie, portant à 22 700 le nombre de personnes fuyant la guerre ou la faim, arrivées dans le pays au cours du week-end.
Ventes de gilets de sauvetage
En Hongrie, les migrants continuaient de passer lundi par trois postes frontières restés ouverts Beremend, Zakany/Gyekenyes et Barcs, après la construction de barrières de barbelés le long de la frontière avec la Serbie.
Malgré son opposition ferme, les propos martiaux du Premier ministre populiste Viktor Orban et des kilomètres de barbelés installés à ses frontières, la Hongrie a commencé sans mot dire ce week-end à transporter des milliers de migrants jusqu’à proximité de la frontière autrichienne.
En Slovénie, plus de 2 500 personnes sont entrées dans le pays ce week-end et 150 personnes attendaient lundi matin à Harmica (Croatie) de pouvoir traverser la frontière. En revanche, l’AFP a constaté lundi matin qu’il n’y avait plus aucun migrant au poste frontière de Bregana en Croatie.
«Des bus sont venus entre 3 heures et 5 heures emmener les 250 ou 300 réfugiés qui restaient», raconte Domagoj Margetic, un bénévole. Le trafic a repris sur la zone poids lourds où étaient installés les migrants, les barrières métalliques ont été ouvertes et les camions passent à nouveau en Slovénie.
Plus au sud sur la route de l’exil, au moins treize personnes, dont six enfants, sont mortes ce week-end au large des côtés turques non loin de la Grèce après la collision d’un ferry et de leur canot pneumatique en pleine nuit. A Bagdad, les ventes de gilets de sauvetage ont explosé pour les candidats au départ et aux dangereuses traversées de la Méditerrannée.
AFP/M.R.