Il serait presque dommage, pour un peu, que le Luxembourg ne soit pas doté de ces instruments de mesure d’une portée douteuse comme on en trouve chez nos voisins afin de mesurer «l’influence des grandes personnalités» sur la vie d’une nation. Que vaudrait celle de Paul Philipp à l’échelle du Grand-Duché? Que vaudrait celle d’un homme qui ne cesse de rappeler à quel point il veut se tenir à l’écart de la politique, mais est parvenu, en 18 ans de présidence et à la force de sa légendaire bonhomie, à faire construire son stade de 10 000 places avec toutes les infrastructures nécessaires et surtout à le remplir?
Paul Philipp a été réélu samedi à la tête de la plus grande fédération du pays. Un peu moins d’une personne sur dix au pays y est licenciée et, pour lui, ce vote enregistré au centre culturel Paul-Barblé de Strassen a valeur d’entrée au Panthéon. Entre ses activités de joueur international, sélectionneur national et président, il aura usé sa vie au contact de la FLF et il dépassera le demi-siècle de présence dans l’institution, dont bientôt plus d’une vingtaine à la diriger. Ce qui pose autant de certitudes sur le crédit d’homme d’État dont il dispose auprès des clubs que sur les limites du système à se renouveler.
Paul Philipp semble effectivement traverser les décennies et rester cet homme providentiel qu’il a toujours incarné dans l’esprit du football luxembourgeois, qui semblait dire pourtant, ces dernières semaines, qu’un rafraîchissement commençait à se faire désirer. Aujourd’hui encore, il n’arrive pas à exclure de rester au-delà de 2026 et l’on en vient à se poser la question de savoir à quoi pourra bien ressembler le football national après lui.
Pourtant, Philipp construit aussi les conditions de sa suite. Lui qui aimerait modifier le droit de vote lors des congrès de la FLF souhaite un rééquilibrage au profit des petits clubs, qui ont trop peu de poids. S’il était survenu plus tôt, cela aurait pu coûter son poste au Commandeur tant Claude Kremer, son concurrent, semblait y avoir siphonné des voix. Il faut croire que les destinées exceptionnelles se construisent aussi avec un peu de réussite.