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[Cinéma] Un documentaire  sur le fascisme italien qui tombe à pic


«Quand un cycle de fascisme recommence, il ne recommence pas exactement de la même façon, mais dans un nouveau contexte.»

À la Mostra de Venise, un documentaire revient, un siècle après, sur la «marche sur Rome» d’octobre 1922 et l’accession au pouvoir de Mussolini. À quelques jours de législatives où l’extrême droite est donnée favorite, il en appelle à la résilience.

La Marche sur Rome (Marcia su Roma en VO), un documentaire sur l’arrivée au pouvoir des fascistes en Italie en 1922 présenté à la Mostra de Venise, prend une résonance toute particulière alors qu’un parti d’extrême droite est donné favori aux législatives organisées dans la péninsule fin septembre. Dans ce documentaire présenté hors compétition au festival, qui a débuté mercredi, le réalisateur nord-irlandais Mark Cousins se concentre sur la manière dont le fascisme déforme la vérité, manipule l’opinion publique et promeut son propre récit.

Il dissèque l’habileté consommée avec laquelle Benito Mussolini, au pouvoir de 1922 à 1943, a utilisé ses films de propagande pour créer le mythe de la fameuse entrée de ses chemises noires dans la capitale italienne, connue dans les livres d’histoire comme «la marche sur Rome», suivie de l’accession au pouvoir du dictateur. Mark Cousins montre comment des prises de vue et un montage habiles peuvent contribuer à manipuler la réalité, n’hésitant pas à montrer des images de dirigeants populistes contemporains.

Du cinéma aux réseaux sociaux

Il souligne ainsi par ce geste que Mussolini n’a été qu’un précurseur dans l’utilisation d’images pour mobiliser les masses à travers un message promouvant le patriotisme, la force et l’héroïsme, à la différence qu’aujourd’hui ce sont les réseaux sociaux qui ont pris la place des films. «Quand un cycle de fascisme recommence, il ne recommence pas exactement de la même façon, mais dans un nouveau contexte», a-t-il expliqué après la projection. «Le fascisme s’adapte de manière quasi darwinienne pour coller à son nouvel environnement.»

Le film s’ouvre sur des images de l’ancien président américain Donald Trump défendant son recours, dans un tweet, à une citation de Musssolini. On y voit aussi Giorgia Meloni, dont le parti d’extrême droite Fratelli d’Italia est en tête des intentions de vote pour le scrutin du 25 septembre, la leader du Rassemblement national français Marine Le Pen, le Premier ministre hongrois, Viktor Orban, le président brésilien, Jair Bolsonaro, ou encore son homologue russe, Vladimir Poutine. «De nouveaux acteurs jouent des rôles» dans le droit fil de l’héritage fasciste, commente la voix de Mark Cousins.

Une désinformation toujours plus rapide

Giorgia Meloni, qui se présente comme une mère chrétienne, nie être fasciste, mais le réalisateur rappelle comment en juin elle s’est exprimée en faveur du parti espagnol d’extrême droite Vox, dénonçant «le lobby LGBT» et la «violence islamiste» tout en mettant en avant «l’universalité de la croix», symbole du christianisme. «C’est un langage digne des croisades», commente le cinéaste. Ses déclarations sont «très proches du fascisme et de la théorie du grand remplacement», selon laquelle les populations blanches et chrétiennes sont peu à peu remplacées par des musulmans à travers l’immigration.

Nous qui croyons en la démocratie, nous pouvons éteindre l’incendie et nous avons le devoir de le faire

Le documentaire analyse plan par plan le film A noi (À nous) d’Umberto Paradisi datant de 1923, qui a contribué à créer le mythe de la marche sur Rome en exagérant le nombre de chemises noires y participant et en masquant l’absence de Mussolini, qui n’y avait en fait pas pris part. «C’est un mensonge qui est entré dans le répertoire», commente la voix du réalisateur. Le film montre alors des images de hordes de partisans de Trump prenant d’assaut le Capitole à Washington le 6 janvier 2021 pour dénoncer la victoire électorale «volée» à leur mentor.

Pour Mark Cousins, la désinformation se répand encore plus vite et plus largement aujourd’hui à cause d’internet. «On ne pouvait pas atteindre un million de personnes en trois jours autrefois, mais aujourd’hui on peut!», a-t-il déclaré à la presse, notant qu’un «incendie faisant rage est plus difficile à éteindre qu’un brasier brûlant à petit feu». «Nous qui croyons en la démocratie et l’égalité et aux droits des minorités (…) nous pouvons éteindre l’incendie et nous avons le devoir de le faire!»

Un commentaire

  1. Effectivement la désinformation se trouve dans tous les médias dits « mainstream », qui véhiculent une propagande essentiellement « made in USA ».